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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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chanteuse sur le port de Dieppe,
affecte le dandinement des marins et l’engueule. Celle-ci, sage comme une
image, châtain clair, peu de poitrine, le suce et prie Dieu parfois : le
diable soit de ses satanés signes de croix ! Louis-Henri en veut d’autres,
des pires. Toutes les grues trop pourries du quartier, refusées jusque par les
bouchers qui pourtant ne sont pas regardants (mais là, quand même, il ne faut
pas exagérer), le marquis les réclame pour lui. Et voilà son bilan de folles
Andalouses. Un matin, à une très grande et grosse putain flamande borgne, il
propose le solde de sa montre et demande :
    — Tu me
vends ta robe ?

 
22.
     
     
    Le visage dissimulé
derrière un éventail déplié et en robe de catin flamande, Montespan arrive au
château de Saint-Germain-en-Laye pour violer Françoise.
    Il s’est
débarrasséde sa perruque souilléeet a couvert ses épaulesd’une
pèlerine dont la capuche lui descend bas au front : jambes nues et poilues
sous la robe, les talons de ses grands pieds dépassent des courtes mules
féminines qu’il a chaussées. Travesti en femme, il déjoue les surveillances, va
frôlant les murs en courbant le dos et suit une domestique portant un plateau
plein de pains au lait parfumés à la bière, aromatisés aux épices, à qui il
demande en contrefaisant sa voix derrière l’éventail qu’il agite :
    — Ma
petite, je ne sais plus trouver l’appartement de Julie de Montausier. Vous
savez, là où habite aussi la nouvelle favorite du…
    — C’est
là, Madame.
    — Ah oui…
    Il attend qu’elle s’éloigne
puis ouvre la porte :
    — C’est
moi !
    Françoise, qui
conversait dans un canapé près de la vieille duchesse, bondit sur place en découvrant
son époux vêtu d’une robe qu’il hisse devant lui, démontrant qu’il bande tel un
bouc en rut :
    — Françoise,
j’ai trouvé la solution pour nous deux ! Après avoir passé un mois à
attraper des maladies honteuses, je vais te prendre et te contaminer. Ainsi,
quand le roi l’apprendra, il ne voudra plus de toi. Et nous, que nous importera
d’être poivrés puisque ce sera tous les deux. N’est-ce pas que c’est une bonne
idée, ma chérie ? !...
    Il envoie
voler sa robe de putain par-dessus tête et, nu, tend les bras, saisit sa femme
par les épaules, mais elle a un mouvement de recul et de fuite. La peau douce
de sa belle lui coule entre les doigts. C’est comme le bonheur qui s’en va
tandis qu’il gueule :
    — Je
t’enlèverai d’ici pour t’emmener en Espagne !
    Mais elle
n’est déjà plus qu’une tache floue devant la porte-fenêtre ouverte sur une
terrasse et le parc. Ventre arrondi et semblant peinte au lavis, elle dévale
les escaliers en courant alors qu’il crie :
    — Françoise !
Françoise, reviens où j’encule la vieille ! Bon, ben puisque c’est
ainsi...
    Il se retourne
vers la Montausier, la bite à la main. Elle devient un délire de dentelles
frisées comme ses cheveux blancs, regrette de ne pas avoir là son nègre qui
donnerait des coups d’ombrelle à ce fou. Il la poursuit autour des meubles et
lui parle à l’oreille. Elle va en faire une maladie de langueur. Il lui assène
des propos sanglants propres à craindre la damnation : « Vieille
morue, rabatteuse d’épouse, je vais me rôtir le balai dans tes fesses. Promis,
si je t’attrape, je t’encule. Tu vas contracter une bonne galanterie. » Ses autres paroles ne sont pas ménagées. Il n’y a injures qu’il ne lui vomisse
dans la nuque tandis qu’elle pousse les brames les plus perçants. Ça devient
les Petites-Maison ici. Elle appelle au secours en hurlant. Elle ne doit son
salut qu’à l’arrivée de valets alertés par ses hauts cris. Le marquis a juste
le temps de s’enfuir à poil par la porte-fenêtre, de disparaître comme le
méchant des pièces de théâtre. Des gardes entourent la duchesse tremblante de
peur : « Que s’est-il passé ? »
    — M. de
Montespan est entré ici comme une furie et a dit sa rage contre le roi, et à
moi toutes les insolences imaginables. Il a aussi voulu vio-vio-viol...
    Elle se met à
languir et à perdre son sang, à tenir des propos les plus incohérents. Un
sergent s’approche de la porte vitrée et ordonne :
    — Recherchez-le.

 
23.
     
     
    « Crt,
crt, crt », ça gratte trois fois à la porte. « Crt, crt, crt »,
ça gratte encore : c’est le code.
    — Qui
est-ce ?
    — Lauzun.
    Montespan

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