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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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hésite
puis finalement ouvre la porte :
    — Comment
avez-vous pu me retrouver et connaître le... ?
    Le capitaine
des gardes de roi entre et scrute l’endroit :
    — Alors,
c’est là, dans un galetas de domestique sous les toits d’un bordel derrière la
place de Grève, que vous vous cachez depuis des mois.
    Louis-Henri
qui lorsque ça gratta à la porte avait soufflé sa chandelle, la rallume. La
flamme vacillante et motivante s’émeut au moindre souffle dans cette misérable
chambre de bonne seulement éclairée par un minuscule œil-de-bœuf.
    — Je n’ai
pas eu le temps de vous remercier, dit le marquis, mais si, quand j’étais nu
derrière ungrand chêne du parc, vous n’étiez apparu pour me couvrir de
votre manteau et me faire sortir du domaine, j’étais perdu.
    — Vous
êtes perdu, répond Lauzun. Votre affaire à Saint-Germain est un scandale inouï.
Vous devenez dans Paris un sujet à chansons.
    — Je
sais, le les entends à la fenêtre.
    — La
favorite, par crainte d’enlèvement, a maintenant des gardes devant sa porte. Et
la Montausier ne s’est jamais remise de la scène d’outrage. Sa raison a vacillé
au point qu’un jour, au sortir de la messe du roi, elle a cru rencontrer votre
fantôme vêtu comme elle et l’appelant par son nom. Elle a dépéri et est décédée
ce matin. Un verre de chicorée à ses lèvres l’a emportée. Une proche de Sa
Majesté... C’est à se retrouver écartelé par quatre chevaux et avoir les os
cassés à coups de maillet.
    — Pourquoi
m’avez-vous aidé ?
    « Crt,
crt, crt », ça gratte encore à la porte. « Crt, crt, cft » :
    — C’est
moi, Monsieur !
    Mme Larivière,
un panier de victuailles à la main, entre en râlant :
    — Ah, que
je n’aime pas ça, venir chaque semaine dans un bordel... Et puis ces ribaudes
qui descendent les marches avec leur baluchon, où vont-elles ? Ne regarde
pas par les portes entrouvertes des chambres, Dorothée ! continue la
cuisinière, dos tourné.
    Elle dépose
sur une petite table son lourd panier empli de saucissons, de plats cuisinés,
de fruits, de vin, et c’est alors seulement qu’elle découvre que le marquis a
un visiteur. Lauzun prend congé :
    — Montespan,
l’air de Paris va devenir irrespirable pour vous...
    Le Gascon
demande :
    — Pourriez-vous
me prêter un peu d’argent ?
    Le capitaine
sourit - « Il vous suffirait de plier les genoux pour en ramasser tellement
dans la cassette royale » - mais il laisse sa bourse joufflue sur la table
et referme la porte derrière lui. Louis-Henri fait la moue. La cuisinière
s’inquiète :
    — Que se
passe-t-il ?
    — On vous
a suivie, madame Larivière...
    — Mais
non, nous n’avons pas été suivies ! Nous faisons toujours très attention
et prenons chaque fois des chemins différents pour vous rejoindre dans cette
cachette.
    Le marquis
regarde par l’œil-de-bœuf. En bas, au bord de la Seine, les prostituées qui
l’ont hébergé embarquent. La domestique au teint olivâtre les observe
aussi :
    — Où
vont-elles ?
    — On les
punit en les exilant pour la Nouvelle-France où les femmes manquent tellement.
Dans des terres inexplorées, elles seront le repos du guerrier de gars qui
trappent la fourrure, surtout le castor. Elles vivront de blé d’Inde et de
graisse d’ours, dormiront dans des cabanes en écorce. Le triste embarquement
des filles de joie pour le Nouveau Monde...
    Louis-Henri
referme la fenêtre :
    — Madame Larivière, avec la petite, vous allez devoir
également quitter Paris. On pourrait aussi vous en vouloir. Quant à moi, je
sais maintenant que je dois me résoudre à laisser ma femme encagée à la cour et
que je vais être obligé de rejoindre la Guyenne, mais je ne partirai pas sans…

    Il frotte sa lèvre inférieure contre les dents du haut et
la mord, tergiverse puis se lance :
    — Madame
Larivière, vous garderez pour vous deux l’argent qui restera dans cette bourse,
mais d’abord je voudrais que vous fassiez des courses pour moi. Il faudrait aller chez un
marchand de tissus, trouver un peintre et…
    — Un
peintre ? Mais pour quoi faire ?

 
24.
     
     
    Le 20
septembre 1668, Montespan retourne à la cour de Saint-Germain-en-Laye, où
personne ne pensait qu’il aurait le culot de revenir. Et puis il y arrive en
quel équipage !...
    Devant la grille
dorée du domaine royal, s’approche l’étrange attelage du marquis. Sa berline de
voyage vert pomme a

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