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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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rébellion contre
le pouvoir du roi quia décidé de mettre le siège devant cette place.
Voilà l’occasion tant attendue. Je vais nous endetter davantage pour équiper une
troupe et ne rêve plus que d’une bataille pour sortir de cette obscure
situation.
    — Tu ne
manges rien ? s’étonne la marquise en picorant avec ses doigts un peu de
lard dans l’assiette de son mari. Est-ce que ce sera dangereux ? Quel est le
problème avec cette cité ? N’est-ce pas celle qui défend Metz, Lunéville
et Nancy ?
    — L’année
dernière, Charles IV, duc
de Lorraine, avait accepté par traité de céder la ville de Marsal au roi de
France. Mais il revient sur sa promesse sous le prétexte fourbe que le traité
fut signé seulement par son neveu. Le roi annonce son intention d’envoyer un
corps expéditionnaire pour convaincre le duc d’honorer les engagements. Je me
suis porté volontaire avec enthousiasme.
    — Mais si
tu mourais, là-bas ? ! s’exclame Athénaïs, les yeux soudain embués.
    — Alors
le nom de Marsal, sourit Louis-Henri, te ferait souvenir de moi, mais il ne
m’arrivera rien. Cette campagne nous apportera un cortège d’avantages... Et
comme pour être agréable à Dieu iln’est pas indispensable de pleurer ni
de mourir de faim, rions, ma chère, et faisons bonne chère ! Je peux te
prendre l’huître, là ?
    Sous les
étoiles en direction de Paris, le carrosse des Montespan bringuebale sur la
route et le cocher sent bien que les secousses ne proviennent pas uniquement
des ornières du chemin royal. À l’intérieur du véhicule, Françoise-Athénaïs
chevauche son mari avec frénésie (les huîtres, asperges, haricots
vénériques ?...). Face à face et bouches en ventouse. La marquise serre
les cuisses pour empêcher la sortie du membre viril dans les cabotages.
Louis-Henri la retient de toutes ses forces, de tout son cœur :
    — Accroche-toi à moi sinon je
vais déconner.

 
4.
     
     
    À soixante pas
la minute et soutenue par le rythme d’une musique militaire  – tambours,
hautbois, fifres et trompettes — . une troupe de piquiers avance au pas
cadencé sous l’œil d’un capitaine à cheval : le marquis de Montespan.
    Il observe ses
soldats d’infanterie progressant sur la grande plaine entourée d’un plateau
circulaire, boisé par endroits. Marsal, la ville fortifiée qu’il faudra prendre
d’assaut, est au creux d’une cuvette naturelle.
    Les hommes au
pas décidé et sous le commandement de Louis-Henri sont des garçons de ferme
lourdauds trouvés par un sergent recruteur de la région de Chartres.
« Plusieurs d’entre eux seront certainement abattus... », avait émis
Athénaïs. « Qu’ils meurent en remuant la terre devant une place ennemie ou
en la remuant dans les champs de la Beauce, c’est toujours pour le service du
roi », s’était débarrassé son mari, d’un revers de phrase. Ces piquiers
portent une pique de deux toises pour s’opposer à la cavalerie adverse. Lorsque
les portes de la muraille vont s’ouvrir et que la cité lorraine donnera la
charge, ils devront crever le ventre des chevaux profondément. Ça promet des
jets de sang qui tachent les tissus et des déchirures dans des vêtements qui
ont quand même coûté... Le marquis fait ses comptes.
    La guerre est
une entreprise ruineuse. L’aristocrate qui achète une charge militaire doit
également financer sa compagnie : prévoir chevaux de monture, des
charrettes, des mules, ustensiles de ménage et de campement, tentes, lits,
vaisselle. Les soldats d’un gentilhomme n’ont ni droit au « pain du
roi » ni à l’uniforme payés sur son escarcelle personnelle. Louis-Henri
regarde avancer ses Beaucerons.
    Chacune de
leur tenue gris de fer complète  – veste, paire de culottes, bottes,
cravate, casque  –, ça fait dans les... mais il ne peut quand même pas
leur crier : « Attention aux habits ! » Et puis ça bouffe
aussi, un soldat qui va aller affronter un cheval : deux livres de pain de
munition, une livre de viande et une pinte de vin plus les cinq sols qu’on leur
doit par jour. Ah, ce sont des frais !... D’autant que le marquis s’est
aussi offert trois rangs de fusiliers  – un qui tire, un prêt à tirer, un
qui recharge son mousquet et tout le monde qui avance à tour de rôle derrière
les piquiers. Louis-Henri, sur un cheval blanc, leur commande de rester calmes
et muets pour entendre les ordres, leur rappelle qu’on se bat en

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