Le pays de la liberté
cheval?ª
Les invités regardaient, fascinés mais horrifiés.
Sir George devint tout rouge. ´Personne ne m'a rien donné quand j'ai eu vingt et un ans! s'exclama-t-il, furieux. Je n'ai jamais hérité ne serait-ce que d'une paire de chaussures...
- Oh, au nom du ciel, fit-elle d'un ton méprisant.
Nous avons tous entendu raconter comment votre père était mort quand vous aviez quatorze ans et comment vous aviez travaillé dans une filature pour faire vivre vos súurs : ça n'est pas une raison pour imposer la pauvreté à
votre propre fils, non ?
- La pauvreté?ª D'un geste large, il désigna le ch‚teau, le domaine et la vie qui allait de pair avec tout cela. ´ quelle pauvreté ?
- Il a besoin de son indépendance : au nom du ciel, donnez-lui la propriété de la Barbade.
- C'est à moi ! ª protesta Robert.
Jay desserra les dents et retrouva enfin sa voix. ´ La plantation n'a jamais été convenablement administrée, dit-il. Je pensais la faire marcher plutôt comme un régiment: obliger les nègres à travailler plus dur et la rendre plus rentable.
- Tu crois vraiment que tu pourrais faire ça ? ª dit son père.
Jay sentit son cúur bondir. Peut-être Père allait-il changer d'avis.
Ábsolument! s'empressa-t-il de dire.
- Eh bien, pas moiª, dit brutalement Père.
Jay eut la sensation d'avoir reçu un coup au creux de l'estomac.
´ Je ne crois pas que tu aies la moindre idée sur la façon de diriger une plantation ni aucune autre entreprise, poursuivit Sir George d'un ton grinçant. J'estime que tu es mieux à ta place dans l'armée, o˘ on te dit quoi faire. ª
Jay était abasourdi. Il regarda le superbe étalon blanc. ´Jamais je ne monterai ce cheval, déclara-t-il. qu'on l'emmène. ª
Alicia s'adressa à Sir George. ´ Robert a le ch‚teau, les mines de charbon, les navires et tout le reste: doit-il avoir aussi la plantation ?
- C'est le fils aîné.
- Jay est plus jeune, mais il n'est pas un rien du tout. Pourquoi Robert devrait-il avoir tout ?
- En souvenir de sa mère ª, dit Sir George.
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Alicia dévisagea Sir George et Jay comprit qu'elle le haÔssait. Et moi aussi, se dit-il. Je hais mon père.
Álors, dit-elle, provoquant chez les invités des sursauts scandalisés, que le diable vous emporte. qu'il vous emporte en enfer. ª Là-dessus, elle tourna les talons et regagna la maison.
Les jumeaux McAsh habitaient une maison d'une seule pièce d'une quinzaine de pieds carrés avec une cheminée d'un côté et, de l'autre, deux alcôves fermées par des rideaux qui abritaient les lits. L'eau était fournie par un torrent qui passait derrière la rangée de maisons. La porte s'ouvrait sur un chemin boueux , descendant la colline depuis le puits de la mine.
Au fond de la vallée il rejoignait la route conduisant à l'église, au ch
‚teau et au monde extérieur. |
Pendant tout le trajet du retour, Mack n'avait cessé ' de penser à ce qui s'était passé à l'église, mais il ne dit rien et Esther eut le tact de ne lui poser aucune | question. De bonne heure ce matin-là, avant de par- | tir pour l'église, elle avait mis sur le feu un morceau j de bacon à bouillir et, quand ils rentrèrent, son odeur emplissait la maison, faisant venir l'eau à la bouche de Mack et lui remontant le moral.
Esther | éminça un chou dans la marmite tandis que Mack |
traversait la route pour aller chercher une cruche de bière chez Mrs.
Wheighel. Tous deux dévorèrent leur repas avec l'appétit gargantuesque de travailleurs manuels. quand il ne resta plus rien, Esther rota et dit: Éh bien, qu'est-ce que tu vas faire? ª
Mack poussa un soupir. Maintenant qu'on lui avait posé la question directement, il savait qu'il n'y avait qu'une seule réponse. Íl faut que je parte. Je ne
peux pas rester ici après tout cela. Je rappellerais sans cesse à tous les jeunes hommes du Glen qu'on ne peut pas défier les Jamisson. Il faut que je m'en aille. ª II s'efforçait de rester calme, mais sa voix tremblait d'émotion.
Ć'est bien ce que je pensais t'entendre dire. ª Les larmes montèrent aux yeux d'Esther. ´Tu t'attaques aux gens les plus puissants du pays.
- Mais j'ai quand même raison.
- Oui. Mais avoir raison ou tort, ça ne compte pas beaucoup en ce monde : seulement dans le prochain.
- Si je ne le fais pas maintenant, je ne le ferai jamais... et je passerai le restant de mes jours à le regretter. ª
Elle hocha tristement la tête. Ć'est certain. Mais s'ils essaient de
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