Le pays des grottes sacrées
cicatrices
laissées, enfant, sur sa jambe par un lion des cavernes. C’est ainsi que Creb
avait décidé que le Lion des Cavernes serait son totem.
Les marques servaient ensuite à
identifier le chasseur qui avait abattu tel ou tel animal afin qu’il puisse lui
être attribué et que la répartition de la viande soit équitable. Non pas que la
personne qui avait tué la bête recevait toute la viande, mais elle choisissait
en premier les morceaux qu’elle voulait et, plus important, on lui attribuait le
mérite d’avoir fourni de la viande. Cela voulait dire louanges, reconnaissance
et obligation de rendre. Les meilleurs chasseurs distribuaient souvent la
majeure partie de leur viande uniquement pour accumuler du mérite, parfois à la
grande consternation de leur compagne, mais on s’attendait à une telle attitude
de leur part.
Levela envisagea de participer à
la chasse ; Beladora et Amelana déclarèrent qu’elles se feraient un
plaisir de surveiller Jonlevan en même temps que Jonayla, mais finalement
Levela décida de ne pas y aller. Elle n’avait commencé à sevrer Jonlevan que
depuis peu et elle l’allaitait encore de temps en temps. Elle n’avait pas
chassé depuis la naissance de son fils et avait l’impression de manquer
d’entraînement. Elle risquait de gêner plus que d’aider, pensait-elle.
Une fois les sagaies achevées,
Jondalar avait utilisé presque tous les silex qu’il avait trouvés pour
confectionner les pointes, les meilleures plumes avaient été fixées aux hampes
pour aider les sagaies à voler droit et le moment était presque venu de prendre
le repas qu’Ayla avait préparé. D’autres personnes avaient cueilli encore
beaucoup de myrtilles, dont la plupart étaient en train de sécher sur des
nattes tressées. Le reste cuisait sur des pierres chauffées dans le feu, dans
un nouveau récipient solide tissé avec des feuilles de lin et des tiges de jonc
qui poussaient dans un marais près du lac. Le sucre de la sauce obtenue
provenait uniquement des fruits mais on y ajoutait souvent le parfum de fleurs,
de feuilles et d’écorces de diverses plantes. Dans le cas présent, Ayla avait
trouvé de la reine-des-prés, dont les petites fleurs formaient un tapis
moutonnant et crémeux qui dégageait une senteur de miel, des fleurs bleues
d’hysope très aromatiques, remarquable remède contre la toux, ainsi que des
feuilles et des fleurs écarlates de bergamote. De la graisse était ajoutée pour
rendre le tout plus nourrissant.
Le repas fut jugé délicieux, un
véritable festin. La chair de la grouse les changeait de leur viande séchée
habituelle, elle apportait une saveur nouvelle et la cuisson au four dans le
sol l’avait attendrie, même celle, coriace, des vieux mâles. L’herbe dans
laquelle elles étaient enveloppées avait ajouté sa propre saveur et la sauce à
base de fruits enrichissait l’ensemble d’un agréable goût acidulé. Il y aurait
moins de restes que d’ordinaire pour le repas du matin, mais assez quand même,
surtout après adjonction de tiges basses et de rhizomes tendres de lin.
Tous étaient excités à la
perspective de partir chasser le lendemain. Jondalar et Willamar ne pouvaient
décider de la stratégie à adopter avec les autres avant de voir exactement où
étaient les bisons. Comme il faisait encore jour, Jondalar résolut de suivre à
nouveau les traces pour s’assurer qu’il parvenait encore à trouver le troupeau.
Il ignorait quelle distance il pouvait avoir parcourue. Ayla et Jonayla
l’accompagnèrent sur leurs montures, uniquement pour permettre aux chevaux de
galoper un peu. Ils trouvèrent les bisons, mais pas tout à fait au même endroit.
Jondalar se félicitait d’avoir encore suivi leur piste ; il était ainsi à
même de mener les chasseurs directement à eux.
Le fond de l’air était toujours
frais au petit matin, même au cœur de l’été. Et quand Ayla sortit de la tente,
elle en sentit aussi l’humidité. Une brume froide flottait au ras du sol, une
nappe de brouillard était suspendue au-dessus du lac. Déjà levées, Beladora et
Levela alimentaient un nouveau feu. Leurs enfants aussi étaient réveillés et
Jonayla se trouvait avec eux. Ayla ne l’avait pas entendue se lever, mais
l’enfant était capable de ne pas faire de bruit du tout quand elle le voulait.
Elle aperçut sa mère et arriva en courant.
Après avoir uriné, Ayla décida
d’aller se tremper dans le lac avant de retourner à
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