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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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tiers,
acte de justice, répète-t-il. Les souverains l’acceptent.
    Et pour apaiser l’opinion, le Résultat du Conseil est
aussitôt imprimé et répandu dans toute la France.
    On peut y lire :
    « Les députés aux États généraux seront au moins au
nombre de mille.
    « … Le nombre des députés du tiers état sera égal à
celui des deux autres ordres réunis et cette proportion sera établie par les
lettres de convocation. »
    L’élection se fera par bailliage et les curés pourront être
députés du clergé.
    Les patriotes exultent. Ce « bas clergé » des
curés partage souvent les opinions du tiers état.
     
    Dans toutes les provinces, on remercie le roi de sa décision.
    Il est le « Dieu tutélaire » et Necker son « ange ».
    Pourtant, il ne s’est prononcé ni sur l’assemblée unique, ni
sur le vote par tête.
    Mais l’espoir est grand.
    On ne doute pas que la justice et la raison l’emporteront au
cours de cette année électorale qui commence.
    Demain, c’est 1789.

DEUXIEME PARTIE
    Janvier
1789-17 juillet 1789
    « Ce
peuple paraît marcher
    de
lui-même »
     
    « Il n’y a plus d’obéissance nulle part et on n’est
même pas sûr des troupes. »
    Necker ,
février 1789

11
    Louis, depuis que cette année 1789 a commencé de s’écouler, vit
dans une angoisse qui le paralyse.
    La mort est là, qui s’approche.
    Il ne peut rien contre elle. Elle a choisi sa proie et même
un roi ne peut la lui disputer.
    Et cet agonisant c’est un enfant de huit ans, Louis-Joseph, le
dauphin, dont la naissance avait été pour Louis une flambée de joie, l’assurance
donnée par Dieu que la dynastie allait se prolonger, légitime et éternellement
renouvelée.
    Mais ce fils n’est plus qu’un corps souffrant, déformé.
    Il a murmuré à Louis et à Marie-Antoinette que sa mort sera
prochaine, qu’il attend cette délivrance, qu’il l’espère même.
    Louis et Marie-Antoinette ont pleuré. Mais les larmes n’empêchent
pas la mort de se saisir d’un enfant, fût-il fils de roi.
     
    Louis voudrait se recroqueviller sur cette douleur, ce
désespoir. Mais à chaque minute, il est arraché à son angoisse intime par ces
événements qui se succèdent, qui font de la quinzième année de son règne une
année cruciale.
    Et une autre angoisse, politique, nourrie de l’angoisse
intime, le saisit.
    Il s’interroge : et si la mort annoncée du dauphin
était le présage noir de la mort de la monarchie ?
    Il tente de se persuader que son fils cadet, âgé de quatre
ans, vigoureux, est désormais le successeur désigné. Mais l’aîné avait porté l’espoir.
    Et il va mourir.
    Pour Louis, c’est comme si un voile de deuil couvrait tout
le royaume. Et que le roi était aussi impuissant que le père.
     
    Et pourtant, il a accordé ce que l’opinion réclamait.
    Les élections pour les représentants aux États généraux vont
se dérouler dans tous les bailliages.
    Scrutin à un tour pour la noblesse et le clergé, à deux ou
trois degrés pour les paysans et dans les villes.
    À Paris, un régime particulier exige que l’électeur possède
soit un office ou une maîtrise, soit un grade universitaire, ou paie un impôt
de capitation de six livres, ce qui limitera le nombre d’électeurs à cinquante
mille sur six cent mille habitants.
     
    On se défie de la capitale.
    On a vu entrer, venant de toute l’Île-de-France, « un
nombre effrayant d’hommes mal vêtus, et d’une figure sinistre », paysans
affamés, chassés par la disette, vagabonds déguenillés, armés de grands bâtons.
    Ils côtoient les dizaines de milliers d’ouvriers, sans
emploi, jetés à la rue par la fermeture des ateliers.
    Le pain est si cher qu’il dévore tout l’argent d’une famille,
qui ne peut plus acheter autre chose, ni chaussures, ni vêtements, ni meubles. Et
les échoppes, les ateliers périclitent.
    On compte cent vingt mille indigents à Paris.
    Et cette situation fait craindre des violences.
    Et la disette, qui fait de Paris, en ce début d’année 1789, une
ville affamée, frappe tout le pays.
     
    L’hiver 1789, après une année de sécheresse et des averses
soudaines de grêle, qui ont saccagé les récoltes, est d’une rigueur extrême :
18 degrés au-dessous de zéro au mois de janvier 1789. La Seine gèle à Paris et
au Havre.
    Et on manque partout de grain.
    Les foules se rassemblent devant les boulangeries.
    « Chaque boutique est environnée d’une foule à qui

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