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Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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donc bien compromise, dit Jeffrey.
     
    Le banquier, actionnaire d'une compagnie maritime qui transportait le sucre de Cuba à New York, ne souhaitait que le maintien d'un profitable statu quo .
     
    – Avant que des volontaires ne se lancent dans une aventure du genre de celle qui, en 1851, coûta la vie à Narciso López et à plusieurs de ses compagnons, peut-être conviendrait-il de s'assurer de la complicité des révolutionnaires cubains, fit observer lord Simon.
     
    Mieux que son cousin, il connaissait l'île et les aspirations de sa population.
     
    – C'est pourquoi il est question d'envoyer à La Havane trois agents inconnus des Espagnols : un Français, un Napolitain et un Portugais. Ils auront pour mission de préparer, avec des indépendantistes cubains, l'accueil du corps des volontaires américains dont le gouvernement fédéral feint, pour des raisons diplomatiques, d'ignorer l'existence, précisa Jeffrey Cornfield.
     

    Deux jours avant le départ de Charles Desteyrac pour Pittsburgh, lady Ottilia annonça par télégramme son arrivée.
     
    – Ottilia sera là demain, avec Anaïs Sampson et son fils. Nous allons enfin voir comment est fabriqué un futur officier de l'armée des États-Unis qui prétend épouser ma fille ! dit gaiement lord Simon.
     
    L'atmosphère étant, ce soir-là, agréablement détendue, Charles Desteyrac se risqua à demander ce qui expliquait l'attrait des spéculations risquées auxquelles se livraient beaucoup d'hommes d'affaires new-yorkais. Il obtint de la part de son hôte un aveu circonstancié.
     
    – Que voulez-vous, monsieur, ici l'opinion publique et l'Église nous interdisent les plaisirs sensuels, les femmes, l'alcool, les jeux d'argent, même le luxe ! Alors, nous demandons de l'émotion aux affaires ! confessa Jeffrey, dont la déclaration déclencha une hilarité courtoise.
     
    – Eh bien, nous sommes plus libres et plus heureux sur mon île qu'à New York ! dit Simon Leonard en se versant un troisième verre de porto. Chez moi, cher cousin, et je vous invite à venir vous en rendre compte, il n'est interdit ni de caresser les femmes, ni de s'enivrer quand bon vous semble, ni même de perdre quelques livres aux cartes. Quant au luxe, il nous en est offert gratis pro Deo un choix impayable par la nature tropicale.
     
    – Hurrah ! lança Murray. Le lord des Bahamas a bien parlé !
     
    Charles, lui aussi approbateur, et que le porto rendait volubile, s'adressa à Jeffrey.
     
    – Votre cousin, monsieur Cornfield, est une sorte de Rhadamanthe, ce prince des Cyclades qui civilisa les insulaires ignorants et promulgua de justes lois. Grâce à lord Simon, Soledad est une île heureuse où il fait bon vivre et rêver. C'est pourquoi je me hâterai, après mon séjour à Pittsburgh –  Smoky City , la cité la plus enfumée de l'Union, m'a-t-on dit –, de retrouver notre île, son soleil, ses eaux changeantes, ses fleurs, ses fruits, le murmure des alizés dans les palmes, le chant des oiseaux moqueurs…, débita le Français.
     
    – Et, aussi, certaine jolie fille nommée Ounca Lou ! souffla discrètement Murray à l'oreille de son ami.
     
    1 Il existe à Bamburgh, dans le Northumberland, à une centaine de kilomètres au sud-est d'Édimbourg, un Grace Darling Museum où l'on peut voir souvenirs et portraits de l'héroïne, ainsi que la barque à bord de laquelle, avec son père, elle sauva, en 1838, cinq des passagers du vapeur Forfarshire .
     
    2 Ne pas confondre avec le Crystal Palace érigé à Londres pour l'Expositon internationale de 1851.
     
    3 Boisson servie frappée, composée de jerez , de sucre et de citron.
     
    4 M. Dugard, Ralph Waldo Emerson, sa vie, son œuvre , librairie Armand Colin, Paris, 1929.
     
    5 Régis Michaud, La Vie inspirée d'Emerson , librairie Plon, Paris, 1930.
     
    6 « Laissons le nègre à sa place ».
     
    7 Manuel Moreno Fraginals, Cuba/España, España/Cuba, historia comÙn , Mitos Bolsillo, Barcelona, 1998.
     

4.
     
    De lady Ottilia, Charles gardait le souvenir d'une belle mijaurée, pleine d'afféterie et d'arrogance. Quand, à l'heure du dîner, elle parut au bras de Jeffrey, ce soir d'août 1855, l'ingénieur, ébloui par la beauté de la femme, mais se rappelant le peu d'intérêt que la fille de lord Simon lui avait porté deux ans plus tôt, s'inclina avec raideur. Aussi fut-il surpris par la vivacité avec laquelle, à sa vue, Ottilia abandonna le bras de son vieux cousin

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