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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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pénétrer dans les Prairies du Meurtre, traverser la Vallée de l’Ombre Mortelle. Derrière lui, Ranulf remarqua l’agitation de son maître et soupira de soulagement. « Maître Longue Figure », comme il appelait à part soi son compagnon, échappait enfin à ses rêveries de Noël.
    Ranulf, à vrai dire, s’était ennuyé pendant cette période de fête, davantage préoccupé par ses projets d’avenir et sur ses gardes devant Lady Maeve dont il redoutait la perspicacité. Il claqua de la langue : à présent le jeu avait repris. Il repensa avec plaisir à sa rencontre secrète avec le souverain après la première messe, au petit matin ce jour-là. Corbett et son épouse étaient sortis derrière le roi de la chapelle St Stephen puis étaient allés accueillir les juges du Banc du roi {6} , Hengham et Staunton. Édouard avait tiré Ranulf par la manche et s’était réfugié avec lui dans l’embrasure d’une fenêtre qui ouvrait sur la cour du vieux palais. Les yeux luisant comme ceux d’un chat en chasse, il avait attiré Ranulf à lui.
    — Vous allez partir pour Mistleham, en Essex, Maître Ranulf.
    — Oui, Votre Grâce.
    — Prenez soin de frère Corbett.
    — Bien sûr, Votre Grâce.
    — Vous êtes ambitieux, Maître Ranulf, vous avez l’oeil. Je peux faire beaucoup pour vous.
    Édouard était si près que Ranulf sentait l’odeur sucrée du vin de messe qu’il avait bu pendant l’Eucharistie.
    — Ne perdez pas Lord Scrope de vue. C’est un homme mauvais, qui s’agite beaucoup, sa nature est vile et ses humeurs meurtrières.
    — Oui, Votre Grâce.
    — « Oui, Votre Grâce », s’était moqué le souverain. Mais je vous préviens, Maître Ranulf, si Scrope menace Corbett, s’il représente un danger étant donné son détestable caractère...
    Il avait détourné le regard.
    — Monseigneur ?
    — Tuez-le, Maître Ranulf, tuez Scrope ! Ne montrez nulle merci à ce rebelle qui s’est arrogé le droit de justice !
    — En quel nom, Votre Grâce ?
    — En mon nom, Maître Ranulf. Gardez bien ceci, c’est pour vous, et vous seul.
    Édouard avait mis un rollet scellé dans la main de Ranulf et s’était éloigné.
    Le clerc principal de la chancellerie de la Cire verte avait déroulé le parchemin et lu le message : « Le roi Édouard à tous les officiers de la Couronne, shérifs, baillis et maires : ce que le porteur de cette missive a accompli, il l’a accompli pour le bien du roi et la sécurité du royaume. »

 
    CHAPITRE II
    « Ce jour-là, les juges commencèrent à délibérer. »
    Annales de Londres, 1304.
    Le père Thomas s’agenouilla au pied du jubé dans la pénombre glacée de son église paroissiale. Devant lui, sur des tréteaux drapés de pourpre et entourés de cierges funéraires à l’éclat fantomatique, gisaient les corps au visage cireux de Wilfred et d’Eadburga. Leurs horribles blessures, où le sang avait séché, n’étaient plus que des taches violacées et on avait lavé et oint leurs membres. Demain le père Thomas chanterait leur messe de requiem et leurs dépouilles seraient emportées dans le cimetière, par la porte des défunts, pour l’enterrement. Le prêtre bougea pour tenter de soulager les crampes de ses jambes et de ses cuisses. Combien y avait-il eu de meurtres jusqu’à maintenant ? Sept ? Oui, sept, c’était bien ça. Ces deux malheureux, et puis Édith et Hilda, fauchées alors qu’elles quittaient leur chaumière, Elwood, le fils du forgeron, abattu pendant qu’il faisait trotter un cheval pour que son père l’examine, Gwatkin le charretier et Theobald le fouleur. La lumière de la lampe du choeur détourna l’attention du père Thomas. Il scruta les ténèbres, leva les yeux vers la face torturée du Christ en croix puis regarda la pyxide au bout de sa massive chaîne d’argent qui surplombait le maître-autel. Il s’interrogea : tout cela était-il vrai ? Le Christ était-il bien mort et ressuscité ? Son corps ressuscité s’incarnait-il vraiment sous l’apparence de l’hostie ? Il ajusta l’étole écarlate autour de son cou et déplaça ses genoux osseux sur le dur dallage froid. D’un oeil apeuré, il observa les lieux. Tout n’était qu’ombre ! Seule la débandade des souris dans les coins sombres brisait le silence. La nuit était glaciale ! Le père Thomas songea à son lit douillet et au lourd chaudron, suspendu au-dessus du feu dans l’âtre, où mijotait un ragoût

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