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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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sous-estimer, reprit Corbett d’un ton sec. Il y avait la fresque, les armes, et, me semble-t-il, il a découvert non seulement que Le Riche s’abritait à Mordern mais que presque tout son larcin s’y trouvait encore. C’en était trop. Les Frères du Libre Esprit étaient vraiment dangereux. Scrope était terrorisé. Comment avaient-ils eu vent de sa faute ? De sa conduite de Judas ? Quelqu’un – qui savait tout – avait-il survécu à la chute d’Acre ? Était-ce Gratian, voire Claypole ? De toute façon, il fallait les faire taire. Lord Oliver s’employa à répandre des rumeurs, des accusations contre ces malheureux, puis il frappa. Il endossa l’habit du seigneur défendant les siens, du fidèle enfant de l’Église attaquant les hérétiques. Les Frères du Libre Esprit furent massacrés sans tergiverser. Scrope ne trouva pas le butin et ne sut pas déchiffrer l’inscription sur le mur de la sacristie. Il les extermina tous et laissa pourrir les cadavres. Pourquoi ? Eh bien, en premier lieu, il constata qu’ils n’étaient pas les anges qu’ils faisaient semblant d’être. La découverte des armes et des plans du manoir de Mistleham a dû le réjouir : cela justifiait ses agissements. Mais il était aussi méfiant et voulait savoir si les Frères du Libre Esprit n’avaient pas des partisans cachés parmi les habitants de la ville, quelqu’un qui serait venu ici pour ensevelir les corps.
    Le magistrat s’interrompit. Maître Benedict avait blêmi et, aux prises avec ses souvenirs, contemplait les flammes d’un oeil éteint.
    — La féroce et impitoyable agression de Scrope, enchaîna Corbett, vous avait fort indigné, comme elle avait indigné tous les autres. Vous ne vous y attendiez certainement pas. Vous n’aviez jamais imaginé qu’un seigneur attaquerait au point du jour et passerait tout le monde au fil de l’épée. Vous n’étiez pas là pour prévenir vos compagnons que Lord Oliver avait décidé de les occire. Il n’avait pas le choix : cette fresque, sans parler de Le Riche... Non seulement notre malandrin avait dissimulé son trésor ici, mais peut-être avait-il narré aux Frères du Libre Esprit moult histoires sur un pacte secret l’autorisant à vendre à un maire et à un puissant propriétaire terrien les objets dérobés. Rien de surprenant à ce qu’on les ait fait taire si brutalement. Toutefois vous et votre complice, Dame Marguerite, avez été sincèrement bouleversés et vous êtes sentis coupables d’avoir conduit vos alliés vers une fin aussi terrible. L’abbesse avait eu vent des avertissements proférés par le Temple contre son frère ; et elle se mit donc, par votre entremise, à diffuser des menaces, à la fois de son propre chef et du vôtre, à propos des moulins de Dieu.
    Corbett prit la gourde et la lança sur la table. Le chapelain la déboucha avec maladresse, but avec avidité et la lui rendit.
    — Dame Marguerite vous a aussi parlé du Sagittaire, qui, des années plus tôt, avait bravé son frère. Vous avez décidé de le faire réapparaître. D’abord pour semer la terreur et punir les bourgeois de Mistleham qui avaient soutenu l’assaut de Lord Scrope contre les Frères du Libre Esprit et, ensuite, pour ourdir l’assassinat de Scrope. Vous avez choisi vos victimes, des innocents de la ville. Chaque fois, l’abbesse vous a servi à donner le change ; ce fut par exemple le cas lors du meurtre de Wilfred et d’Eadburga. Vous ne gardiez point la porte de St Alphege ; vous vous êtes esquivé pour commettre d’effroyables meurtres. Mais le temps passait. Dans une certaine mesure, vous et Dame Marguerite aviez perdu le contrôle des opérations. Le massacre, la pendaison de Le Riche et voilà que les émissaires royaux arrivaient à Mistleham... Vous complotiez avec ardeur. Vous vous êtes, le premier, rendu chez le père Thomas, en vous surnommant Belladone. Vous avez lancé un avertissement voilé, un ultimatum à Lord Oliver. Bien entendu, il a compris de quoi il retournait : ses vilenies l’avaient rattrapé. Vous saviez qu’il ne se repentirait point. Vous tramiez déjà son trépas. Visiteur habituel au manoir où vous et Dame Marguerite disposiez d’appartements, vous pouviez y dissimuler arcs et flèches. Une nuit vous avez pourchassé les mastiffs de Scrope : eux aussi avaient participé à l’attaque de Mordern. Et, plus important, c’étaient des chiens de garde. Aviez-vous d’abord drogué leur

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