Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Prisonnier de Trafalgar

Le Prisonnier de Trafalgar

Titel: Le Prisonnier de Trafalgar Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
Vom Netzwerk:
d’un sifflet mélancolique et solitaire salua son départ.  
    Hazembat vit souvent Mac Leod pendant les jours qui suivirent. Le docteur évacuait certains malades vers l’hôpital naval, prescrivait pour d’autres des nourritures frugales mais saines que le chief warden n’avait plus aucun mal à se procurer auprès du magasin des subsistances.  
    — Le surintendant a été renvoyé, expliqua-t-il à Hazembat, ainsi que plusieurs de ses subordonnés. Pendant quelque temps, la nourriture sera mangeable, mais il ne faut pas se faire d’illusions : la corruption reviendra. Those are the infirrmities of human naturre.  
    Topolino s’était imposé comme infirmier et aide-soignant du docteur qui semblait grandement apprécier ses services.  
    — Il m’a promis de me garder avec lui à l’hôpital, confia-t-il un jour à Hazembat. Fini, le ponton pour moi ! Puisque tu connais le docteur, tu devrais en profiter aussi.  
    — Je n’entends rien à la médecine !  
    — Moi non plus, mais tout s’apprend. Et puis il y a d’autres emplois à terre !  
    C’était exact. Un certain nombre de prisonniers, surtout ceux des ponts supérieurs, les plus anciens, s’étaient débrouillés pour trouver de l’embauche à terre. Avec la demande toujours croissante de la marine et maintenant de l’armée, l’Angleterre manquait d’hommes. Mais, pour obtenir un de ces emplois, il fallait des protections. On pouvait y parvenir en se mettant dans les bonnes grâces d’un gardien ou en recourant à un de ces agents recruteurs qui, sous des prétextes divers, visitaient parfois le ponton. Ils devaient y trouver leur compte et cette pratique rappelait trop à Hazembat le trafic des esclaves pour qu’il pût songer à y recourir.  
    Ce fut Mac Leod qui fit les premières avances.  
    — Ecoute, sailor, dit-il un jour. Il me semble que tu as fait tout le bien que tu pouvais faire ici. Cela fait un an que la bataille de Trafalgar a été livrée. Un an de ponton suffit à prouver ton patriotisme. Que dirais-tu de travailler à Portsmouth ?  
    — Je ne servirai jamais l’Angleterre, docteur, du moins tant qu’elle sera en guerre avec la France.  
    — Tout ce qu’on te demandera de servir, ce sont des pots de bière et des verres de gin. J’ai dit un mot de toi au propriétaire des Long Rooms. I I a besoin d’un serveur qui ait de la prestance et il ne trouve que des éclopés ou des vieillards cacochymes. Que dirais-tu de travailler pour le marquis de Sainte-Croix ?  
    — Le marquis de Sainte-Croix ? C’est un émigré ?  
    — Il n’est pas plus émigré que marquis. Il a acheté les Long Rooms bien avant la Révolution. C’est pour attirer les clients qu’il a pris ce titre. Les Anglais sont un peu snobs, tu sais. Les Long Rooms ont une clientèle choisie : des officiers de marine surtout, quelques militaires et des notables de Portsmouth. Le métier n’est pas difficile et tu sais comment te tenir devant un officier.  
    Quelques jours plus tard, Hazembat accompagna Mac Leod à Portsmouth. Ils y furent conduits par un canot dont l’équipage était composé de deux solides batelières qui tiraient sur l’aviron et manœuvraient la voile de tréou avec la vigueur et l’assurance de vieux marins. Les quelques gaillardises qu’elles lancèrent à Hazembat étaient sans équivoque.  
    La ville était animée, mais sale. Marchandes de poisson, matelots de corvée, marines en patrouille se pressaient dans les rues étroites et puantes. Les habitants des maisons avaient manifestement l’habitude de jeter leurs ordures par la fenêtre, et la rigole centrale, même quand il pleuvait, comme ce jour-là, avait du mal à emporter les immondices. Tout cela donnait pourtant une impression de santé et de vigueur qui impressionna Hazembat.  
    Les Long Rooms étaient un bâtiment bas, à l’angle d’une rue relativement large et propre. Dès qu’on entrait par la petite porte peinte en bleu, on se trouvait dans une atmosphère de confort tranquille et sans ostentation : tapis épais de laine solide, tentures aux motifs sobres, candélabres aux abat-jour verts, fauteuils de cuir. Au-delà de l’entrée, s’étendaient en succession deux vastes salons plus longs que larges. A cette heure de la matinée, ils étaient vides.  
    Le marquis de Sainte-Croix était un vieux petit monsieur en perruque poudrée, portant un habit à l’ancienne mode, avec culotte et bas de soie. Il examina

Weitere Kostenlose Bücher