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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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inventer un dîner à partir de rien.
    Enfin, pas tout à fait. Plusieurs caisses de poules étaient empilées près de la coquerie. Elles s’étaient assoupies dans l’obscurité mais mon arrivée les avait réveillées. Elles piaillaient, battaient des ailes en agitant la tête et collaient un œil intrigué aux fentes de leur caisse. Je me demandai s’il y avait d’autres animaux sur le bateau. Je touillai la marmite, qui contenait une sorte de ragoût gluant, puis me mis en quête de pain. Il y avait certainement une substance farinacée à bord. Les marins vivaient de biscuits à base de farine de blé déshydratée ou de galettes au levain. Il y en avait forcément. Mais où ?
    Je les trouvai enfin : des galettes brunes dures comme pierre dans un filet suspendu à un crochet dans un recoin sombre. Sans doute pour les protéger des rats. Je lançai un regard nerveux autour de moi, au cas où. Il devait aussi y avoir des sacs de farine. Ah ! Ils étaient probablement dans la cale, avec les autres provisions… et les membres renfrognés de l’équipage d’origine. Bah ! On verrait plus tard, pour ce soir, il y avait de quoi faire dîner tout le monde.
    Attiser le feu puis fouiller la coquerie et le mess me réchauffa et me fit oublier mes douleurs. Peu à peu, la sensation d’incrédulité glacée qui m’habitait depuis le début des incidents commença à se dissiper.
    Ce n’était pas une bonne chose. En émergeant de mon état de stupeur, je prenais la vraie mesure de notre situation. Nous n’étions plus en route vers l’Ecosse, prêts à braver les dangers de la haute mer, mais vers une destination inconnue dans un navire que nous ne connaissions pas, manœuvré par un équipage terrifié et sans expérience. Nous avions commis un acte de piraterie, ainsi qu’une série d’autres crimes tels que résister à l’enrôlement et attaquer un vaisseau de Sa Majesté. Plus un meurtre. Je déglutis.
    Les vibrations de la lame heurtant un os résonnaient encore dans mon bras. Comment pouvais-je l’avoir tué ? Je n’avais pas pénétré la cavité thoracique et ne pouvais pas avoir sectionné un des gros vaisseaux du cou… Il avait dû être en état de choc, bien sûr, mais suffisait-il à lui seul… ?
    Je repoussai fermement cette idée. Je ne pouvais penser au canonnier pour le moment. Plus tard, me promis-je. Cela avait été de l’autodéfense, après tout. Je prierais pour lui, mais plus tard.
    Les autres pensées qui me venaient n’étaient guère plus encourageantes. Ian et Rollo… Non, ça non plus je ne devais pas y songer pour le moment.
    Je grattai le cul de la marmite avec une longue cuiller en bois. Le ragoût avait légèrement brûlé au fond mais était toujours mangeable. Il contenait des os et était épais et grumeleux. Je refoulai un haut-le-cœur, y ajoutai de l’eau d’une cruche et le mis à nouveau à cuire.
    La navigation. Voilà un thème sur lequel je pouvais m’attarder. Il était profondément préoccupant mais dépourvu des connotations émotionnelles des autres sujets de mon ordre du jour mental. La lune était-elle bientôt pleine ? Je tentai de me souvenir de son aspect depuis le pont du Teal la veille au soir. Je ne l’avais pas remarquée, donc elle devait être loin d’être grosse. Une pleine lune se levant sur la mer était un spectacle époustouflant ; elle traçait sur l’eau un chemin lumineux qui vous donnait envie d’enjamber le bastingage et de marcher sur ce rayonnement paisible.
    Non, je n’avais rien vu de tel la nuit précédente. Je m’étais rendue sur le pont tard dans la nuit plutôt que d’utiliser le pot de chambre car j’avais besoin d’air frais. Je m’étais arrêtée uninstant devant le garde-corps pour contempler la crête phosphorescente des longs rouleaux, une belle lueur d’un vert surnaturel illuminant l’intérieur des vagues. La proue traçait un sillage luisant dans la mer.
    Ce serait une nuit sans lune, ou avec un mince croissant, ce qui revenait au même. Nous ne devions pas nous approcher de la côte dans le noir. J’ignorais où nous étions mais je savais que le littoral autour de la baie du Chesapeake était connu pour ses courants, ses bancs de sable, ses estrans et sa dense circulation navale. Smith nous avait dit que nous avions passé Norfolk…
    — Mais où est donc Norfolk, bordel ! m’écriai-je, exaspérée.
    Je savais où se trouvait la ville par rapport à l’autoroute I-64 mais n’avais aucune

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