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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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entre mon pays et le sien
tant qu’on ne m’aura pas fait justice. »
    Bedwin parut
alarmé, se frottant les mains pour se calmer et réfléchir à ce qu’il allait
dire. Rien ne lui vint à l’esprit et c’est finalement Owain qui répondit :
    « Dis ce
que tu as à dire, fit-il sèchement.
    — Un
groupe de gens de mon père avait reçu la protection du roi Uther. À la demande
d’Uther, ils sont venus dans ce pays travailler les mines et vivre en paix avec
leurs voisins ; pourtant, l’été dernier, quelques-uns de ces voisins sont
venus les massacrer et mettre leur campement à feu et à sang. Cinquante-huit
morts, dites-le à votre roi. Leur sarhaed sera la valeur de leur vie,
plus la vie de l’homme qui a ordonné le carnage, sans quoi nous viendrons
nous-mêmes demander réparation avec nos épées et nos boucliers. »
    Owain partit
d’un grand éclat de rire : « petite Kernow ? Nous avons la
frousse ! »
    Tout autour de
moi, les guerriers y allaient de leurs quolibets. Kernow était un petit pays et
ne faisait pas le poids à côté des forces de la Dumnonie. Mgr Bedwin tâcha
d’arrêter le tapage, mais la salle était pleine d’hommes excités sous l’effet
de l’alcool, et ils refusèrent de se calmer avant qu’Owain ne leur imposât le
silence : « Prince, dit-il, j’ai entendu dire que ce sont les
Irlandais au Bouclier-noir d’Œngus Mac Airem qui ont attaqué la lande. »
Tristan cracha par terre. « Si c’est eux, ils ont volé à travers le pays,
car personne ne les a vus passer, et ils n’ont pas volé un œuf aux Dumnoniens.
    — Parce
qu’ils ont peur de la Dumnonie, mais pas du Kernow », répliqua Owain et, à
ces mots, toute la salle partit de nouveau d’un grand éclat de rire.
    Arthur attendit
que les rires se fussent calmés.
    « Connais-tu
un autre homme qu’Œngus Mac Airem qui aurait pu attaquer les
vôtres ? » demanda-t-il courtoisement.
    Tristan se
tourna et chercha parmi les hommes accroupis par terre. Il vit le crâne chauve
du prince Cadwy d’Isca vers lequel il tendit son épée. « Demande-lui. Ou
mieux encore, fit-il en haussant le ton pour couvrir les lazzis, demande au
témoin que j’ai à l’extérieur. » Cadwy s’était redressé et criait qu’on
lui permette d’aller chercher son épée tandis que ses lanciers tatoués
menaçaient de massacrer le Kernow jusqu’au dernier de ses habitants.
    Arthur tapa du
poing sur la table. Le bruit se répercuta en écho dans la salle, imposant le
silence. Agricola de Gwent, assis à côté d’Arthur, gardait les yeux baissés,
car cette querelle ne le regardait pas, mais je doute qu’une seule nuance de
cet affrontement ait échappé à sa sagacité. « Si un homme verse le sang ce
soir, trancha Arthur, il est mon ennemi. » Il attendit que Cadwy et ses
hommes se calment, puis se retourna vers Tristan.
    « Fais
venir ton témoin, Seigneur.
    — C’est
un tribunal ? objecta Owain.
    — Laissez
entrer le témoin, insista Arthur.
    — C’est
un banquet ! protesta Owain.
    — Faites
entrer le témoin, laissez-le entrer », reprit Mgr Bedwin qui voulait en
finir au plus vite avec cette sale histoire. Approuver Arthur semblait être, à
ses yeux, la manière la plus rapide de la régler. Les hommes qui se tenaient à
l’écart se rapprochèrent pour entendre le drame mais s’esclaffèrent en voyant
paraître le témoin de Tristan, car ce n’était qu’une gamine, de neuf ans
peut-être. D’un pas paisible et digne, elle alla se poster à côté du prince qui
mit son bras sur son épaule. « Sarlinna ferch Edain. » Il indiqua le
nom de l’enfant puis lui pressa l’épaule d’un geste qui se voulait rassurant.
« Parle. »
    Sarlinna se
passa la langue sur les lèvres. Elle choisit de s’adresser directement à
Arthur, peut-être parce que, de tous les hommes attablés, il avait le visage le
plus bienveillant. « Mon père a été tué, ma mère a été tuée, mes frères et
sœurs ont été tués... » Elle parlait comme si elle avait répété son texte,
bien que nul, dans l’assistance, ne doutât de la vérité de ses dires. « Ma
petite sœur a été tuée, poursuivit-elle, et mon chaton aussi. » Elle
laissa échapper une larme. « Et j’ai vu faire. »
    Arthur hocha
la tête en signe de compassion. Agricola de Gwent passa une main dans ses
cheveux gris rasés de près, puis leva les yeux en direction des combles noirs
de suie. Owain se renversa sur son

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