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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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est sur le
déclin, mais la foule dut attendre que Morgane eût la certitude que l’heure
exacte était imminente avant que la cérémonie ne commence sur le cercle de
pierre qui couronnait le sommet de Caer Cadarn. Les pierres du cercle n’étaient
pas bien grandes, aucune n’était plus grande qu’un enfant penché, tandis qu’au
centre même, où Morgane s’agitait en s’orientant sur la lumière pâle du soleil,
se trouvait la Pierre royale de Dumnonie. C’était une pierre roulée, grise et
plate, que rien ne distinguait d’un millier d’autres ; pourtant c’était
sur cette pierre, nous apprenait-on, que le Dieu Bel avait oint son fils
humain, Bli Mawr, l’ancêtre de tous les rois de Dumnonie. Sitôt que Morgane fut
satisfaite de ses calculs, on fit venir Balise au centre du cercle. C’était un
ancien druide qui vivait dans les bois, à l’ouest de Caer Cadarn, et, en
l’absence de Merlin, on l’avait persuadé de venir et d’implorer la bénédiction
des Dieux. C’était une créature voûtée et pouilleuse, drapée de peaux de bouc
et de haillons, si crasseuse qu’on ne pouvait dire où commençaient ses
guenilles, où finissait sa barbe, mais c’est Balise, m’avait-on dit, qui avait
appris à Merlin nombre de ses secrets. Le vieil homme leva son bâton vers le
soleil d’eau, puis cracha dans un cercle en forme de soleil avant de succomber
à une terrible quinte de toux. Il s’affala sur un siège, à la lisière du
cercle, où il resta assis haletant, tandis que sa compagne, une vieille femme
que son accoutrement rendait presque impossible à discerner de Balise, lui
frottait mollement le dos.
    Mgr Bedwin
adressa une prière au Dieu des chrétiens, puis on promena l’enfant-roi autour
du cercle de pierre. On l’avait déposé sur un bouclier de guerre et emmailloté
dans une fourrure : c’est donc ainsi qu’on le présenta à tous les
guerriers, chefs et princes qui, devant l’enfant, tombèrent à genoux pour lui
rendre hommage. Un roi adulte aurait fait le tour du cercle en marchant, mais
deux guerriers dumnoniens portaient Mordred tandis que, derrière l’enfant, sa
longue épée tirée, marchait Owain, le champion du roi. Mordred était porté à
contre-jour, la seule fois de la vie d’un roi où il allait contre l’ordre naturel,
mais la direction malheureuse était délibérément choisie pour montrer qu’un roi
qui descendait des Dieux était au-dessus de ces règles mesquines qui obligent à
tourner en suivant la course du soleil.
    Mordred fut
ensuite déposé dans son bouclier sur la pierre centrale, où on lui porta des
présents. Un gosse déposa devant lui une miche de pain : symbole de son
devoir de nourrir son peuple ; puis un deuxième lui apporta un fléau pour
montrer qu’il devait être un magistrat pour son pays ; enfin, fut déposée
à ses pieds une épée pour symboliser son rôle de défenseur de la Dumnonie. Tout
au long de la cérémonie, Mordred ne cessa de brailler et de gesticuler avec
tant de vigueur qu’il faillit tomber de son bouclier. Son agitation découvrit
son pied bot et cela, me dis-je, devait être de mauvais augure, mais les
célébrants feignirent d’ignorer le membre claviforme, car les grands du royaume
approchaient l’un après l’autre pour ajouter leurs cadeaux. Ils apportaient de
l’or et de l’argent, des pierres précieuses, des pièces de monnaie, du jais et
de l’ambre. Arthur donna à l’enfant une statue d’aigle en or, qui laissa les
spectateurs bouche bée tellement il était beau, mais c’est Agricola qui fit le
cadeau de loin le plus précieux. Il déposa aux pieds du bébé l’accoutrement de
guerre du roi Gorfyddyd de Powys. Arthur s’était emparé de l’armure parée d’or
après avoir bouté Gorfyddyd hors de son campement, et il l’avait offerte au roi
Tewdric qui maintenant, par le truchement de son seigneur de la guerre,
restituait le trésor à la Dumnonie.
    Pour finir, on
retira le bébé turbulent de la pierre pour le remettre à sa nouvelle nourrice,
une esclave de la maison d’Owain. C’est alors que sonna l’heure d’Owain. Tous
les autres grands étaient venus emmitouflés dans leur fourrure pour se protéger
du froid, mais Owain s’avança sans autre vêtement que son pantalon de tartan et
ses bottes, sa poitrine et ses bras tatoués aussi nus que son épée tirée, que,
suivant la règle, il déposa à plat sur la Pierre royale. Puis, à dessein, le
visage méprisant, il fit

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