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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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d’échanger quelques mots avec ses officiers. Puis
il cria un ordre, et les archers encochèrent leurs flèches en visant. Un
silence de plomb s’abattit alors sur le campement. Les soldats de la cavalerie
tournèrent tous leurs regards vers Philotas, car ils savaient qu’il leur
apprendrait en cet ultime instant, en dépit de son état d’épuisement dû aux
tortures qu’il avait subies, comment mourait un commandant des hétairoï.
    L’officier donna l’ordre de tirer.
Avant que les flèches ne lui transpercent le cœur, Philotas eut le temps de
crier :
    Alalalàï !
    Et il s’écroula aussitôt dans la
poussière, le corps ensanglanté. Le prince Amyntas fut exécuté le dernier, et
nombre des guerriers présents ne parvinrent à retenir leurs larmes en voyant le
misérable épilogue qui concluait l’existence d’un jeune homme noble et
courageux, que le destin avait d’abord privé de son trône, puis de la vie, dans
la fleur de l’âge.
    Alexandre regagna son palais en
proie au plus grand abattement. Il était bouleversé à la pensée d’avoir perdu
un compagnon d’enfance et de jeunesse non sur le champ de bataille, mais devant
le poteau d’exécution ; tourmenté par l’idée qu’un jeune homme de son âge,
qui avait participé à toutes ses entreprises, à qui il avait confié la plus
haute responsabilité, après la sienne, avait fini par concevoir une telle haine
à son égard qu’il lui avait tourné le dos et avait conjuré contre lui. Mais la
mort de Philotas n’avait pas clos le chapitre des tromperies et des
épanchements de sang : Alexandre devait encore prendre une terrible
décision.
    Il convoqua le conseil de ses
compagnons après le coucher de soleil, sous une tente perdue en pleine
campagne. Eumène était également présent, mais pas Cleitos le Noir, qui avait
été chargé d’enterrer les condamnés. Il n’y avait pas de gardes à l’entrée, pas
de sièges, de table ou de tapis à l’intérieur. Ils délibérèrent donc debout, à
la lumière d’une unique lanterne.
    Ils n’avaient pas dîné, et leurs
visages ne traduisaient que l’amertume et le découragement.
    « Cette attitude ne vous
ressemble guère, commença Alexandre. Vous n’êtes pas intervenus pour épargner
la mort à Philotas.
    — Je suis grec, rétorqua
aussitôt Eumène. Je n’avais pas voix au chapitre.
    — Je le sais, répliqua
Alexandre, sinon tu ne te serais pas gêné pour t’exprimer en sa faveur en
public, comme tu l’as fait en privé. Mais la sentence a été émise par les
juges, approuvée par l’assemblée et exécutée. Ce qui est fait est fait.
    — Alors, pourquoi nous as-tu
convoqués ? », demanda Léonnatos d’une voix tremblante.
    Le spectacle de ce géant hirsute aux
yeux remplis de larmes était impressionnant.
    « Parce que ce n’est pas encore
fini, n’est-ce pas ? intervint Eumène. Quand on commence une œuvre, il
faut la mener à bien.
    — As-tu découvert d’autres
conjurés ? », l’interrogea Ptolémée non sans inquiétude.
    Le roi lui lança un regard plein
d’effroi, comme s’il devait affronter la plus ingrate des entreprises, le
devoir le plus répugnant, puis il dit d’une voix basse : « Quand je
suis rentré dans mes appartements après l’exécution, je me suis assis à ma
table et j’ai tenté d’écrire une lettre au général Parménion… » Ce seul
nom, prononcé entre ces quatre murs de toile, suffit à esquisser une tragédie,
dont les membres de l’assistance mesurèrent avec horreur l’énormité. »…
pour lui apprendre personnellement la condamnation à mort de son fils Philotas
par l’assemblée de l’armée et son exécution. Je voulais lui dire que j’avais dû
accepter ce verdict en qualité de roi, mais, qu’en tant qu’homme, j’aurais
préféré mourir pour lui épargner une douleur aussi atroce. » Eumène leva
les yeux vers lui et vit que ses joues étaient sillonnées de larmes : au
moment où il parlait, il ressentait la même souffrance que le vieux général.
« Or ma main s’est vite arrêtée. Une pensée angoissante m’interdisait de
continuer, et c’est cette même pensée qui m’a amené à vous convoquer. Aucun de
nous ne sortira de cette tente tant que nous n’aurons pas pris de décision.
    — Comment réagira Parménion,
voilà la question qui te tourmente, n’est-ce pas ?, le devança encore une
fois Eumène.
    — Oui, admit Alexandre.
    — Il t’avait déjà donné

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