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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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si
on te la demande. »
    C’est alors qu’une ordonnance
pénétra dans la salle, flanquée de deux pages, qui portaient les armes du roi.
« Sire, dit-elle, il est l’heure. »
    Les procès militaires en présence de
l’assemblée de l’armée étaient un vieux rite que les Anciens avaient conçu dans
le but d’infliger aux traîtres de terribles souffrances et une effroyable
honte. Ils étaient présidés par le souverain et se déroulaient devant tous les
guerriers, des généraux aux auxiliaires, en passant par les cavaliers et les
fantassins. Les membres de la cour, au nombre de dix, étaient tirés au sort
parmi les officiers les plus gradés et les soldats les plus âgés.
    Avant que le jour ne se lève,
l’armée se rangea sur la plaine déserte, appelée par une sonnerie de trompette
dont l’unique note, aussi tendue et coupante qu’une lame, résonna longuement en
semant l’effroi parmi les soldats. Les pézétairoï étaient disposés sur sept
rangs, armés de pied en cap, leurs sarisses au poing. Face à eux, la cavalerie
des hétairoï. À l’extrémité, fermant les deux files parallèles comme s’il
s’agissait d’un rectangle, les corps de l’infanterie légère d’assaut, les
attaquants et les « écuyers ». Ils avaient laissé un passage sur le
côté est, par lequel devaient entrer le roi, les juges et les prisonniers. Les
Grecs de l’infanterie mercenaire, les Thraces et les Agrianes n’étaient pas
admis à ce procès, car les Macédoniens ne pouvaient être condamnés que par
leurs compatriotes.
    On avait placé au milieu de la
formation des hétairoï une estrade juste un peu plus haute que le sol, sur
laquelle trônaient le siège du roi et ceux des membres de la cour.
    Le soleil surgit au-dessus des
montagnes et ses rayons frappèrent les pointes des sarisses en jetant sur elles
des éclats sinistres, ils se posèrent ensuite sur les visages des hommes,
immobiles dans leurs coquilles d’acier, sculptant leurs visages de pierre,
marqués par le soleil, le vent et le froid.
    Trois sonneries de trompette
annoncèrent l’arrivée du roi, suivi des juges, puis des prisonniers enchaînés.
Parmi eux se détachaient Philotas, dont le corps était martyrisé par les
tortures, et Amyntas, qui marchait d’un pas apparemment impassible.
    Quand les membres de la cour se
furent installés sur l’estrade, après le roi, le plus âgé d’entre eux lut les chefs
d’accusation. On fit défiler les témoins, dont un héraut répétait les
affirmations en criant afin que toute l’assemblée soit en mesure de les
entendre. Puis les membres de l’assemblée votèrent. Ils émirent un verdict
unanime pour tous les accusés : coupables.
    « Et maintenant, hurla le
héraut, répétant les paroles du juge le plus âgé, que vote l’assemblée !
On votera pour chaque accusé. Que ceux qui contestent le verdict déposent leur
épée sur le sol, et que tout le monde recule ensuite de dix pas afin qu’on
puisse procéder au dénombrement des épées ! »
    Les guerriers s’exécutèrent sous le
regard que les condamnés posèrent d’abord sur les régiments d’infanterie, puis
sur la cavalerie, dans l’espoir d’être sauvés par leurs frères d’armes. Mais
les épées qui brillaient sur le sol étaient chaque fois trop peu nombreuses.
Quand vint le tour de Philotas elles se multiplièrent, en particulier chez les
hétairoï, toutefois leur nombre demeura insuffisant. L’arrogance et la hauteur
du chef suprême de la cavalerie lui avaient aliéné essentiellement les soldats
de l’infanterie. Et le témoignage du page Cébalinos, que tout le monde avait
entendu, demeurait accablant.
    Contrairement aux autres accusés,
Philotas garda les yeux fixés sur Alexandre tout le temps que dura ce vote. Il
serrait les dents pour étouffer ses gémissements, et continua de regarder le
roi, même lorsqu’on le conduisit au poteau d’exécution. Il repoussa les
bourreaux, qui voulaient lui attacher les poignets et les chevilles, et se
dressa fièrement, bombant la poitrine face au détachement d’archers chargé
d’exécuter la sentence. Selon l’usage, l’officier qui les commandait s’approcha
de l’estrade pour demander au roi s’il avait décidé au dernier moment
d’accorder sa grâce.
    Alexandre ordonna :
« Visez le cœur, et du premier coup. Je ne veux pas qu’il souffre un
instant de plus. »
    L’officier acquiesça avant de
rejoindre son détachement et

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