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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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sans obstacle. Les nobles perses qui suivaient l’expédition
avec leurs troupes s’entretenaient parfois avec les villageois. Le jeune homme
resplendissant qui montait le gigantesque cheval noir était leur nouveau Roi
des Rois, leur expliquaient-ils alors. Certains le saluaient parfois en agitant
des branches de saule. La nuit, le ciel était de plus en plus limpide, et les
étoiles ne cessaient de se multiplier sur l’immense voûte du ciel, comme des
fleurs dans un champ au printemps. L’absence de fumées et de vapeurs à cette
altitude rendait l’air plus limpide, leur apprit Callisthène, et leur
permettait de distinguer les astres plus nettement. Mais il y avait des soldats
pour croire que le ciel changeait à l’instar de la terre, et que rien ne
pouvait plus les étonner en ces lieux si lointains.
    Le campement était monté chaque soir
au coucher du soleil sur les rives du fleuve, et quand on allumait les feux des
bivouacs, cette grande multitude de soldats, à laquelle s’ajoutait une vaste
suite de femmes, de marchands, de porteurs, de bergers et de gardiens de
troupeaux avec leur bétail, avait une allure de ville ambulante.
    Un jour, la vallée du fleuve aux
mille ruisseaux s’élargit en un vaste plateau partiellement entouré d’une
chaîne de hautes montagnes enneigées qui brillaient au soleil en se détachant
nettement sur le ciel.
    « Le Paropamisos ! »,
s’écria Eumène, enchanté par ce spectacle. Mais Callisthène objecta :
« J’ai échangé des messages avec mon oncle Aristote ces derniers temps.
D’après lui, nous nous apprêtions à rencontrer les derniers contreforts de la
chaîne du Caucase, qui est la plus haute du monde.
    — Et il va falloir les
escalader ? demanda Léonnatos en indiquant les cols suspendus entre ciel
et terre.
    — Exactement, répondit
Ptolémée. Il est désormais certain que Bessos se trouve de l’autre côté, à la
tête d’une armée de Bactriens, de Sogdiens et de Scythes. Alexandre veut le
capturer à tout prix. »
    Léonnatos mit sa main en visière et
contempla une nouvelle fois l’imposante chaîne montagneuse dont le manteau de
neige et de glace lançait des éclats aveuglants ; puis il secoua la tête
et s’éloigna.
    L’hypothèse géographique de
Callisthène reçut l’assentiment du roi qui, les jours suivants, dénicha dans la
grande vallée fertile un emplacement idéal pour fonder une nouvelle ville et y
cantonner une partie du vaste cortège qui suivait l’armée en marche. Il l’appela
Alexandrie du Caucase et y implanta un millier de personnes ainsi que deux
cents mercenaires, qui préférèrent occuper ce lieu plutôt que d’affronter la
traversée vertigineuse des montagnes.
    Dans cet air limpide, sous ce ciel
aux couleurs éclatantes, sur ces prairies d’émeraude que séparaient les rubans
argentés du fleuve, les fantômes d’Artacoana semblèrent s’évanouir pendant
quelque temps, mais l’ombre ensanglantée de Parménion continuait de bouleverser
les nuits d’Alexandre. En proie à l’angoisse des ténèbres, il pénétra un soir
sous la tente d’Aristandre et lui dit : « Prends un cheval et
suis-moi. »
    Quelques instants plus tard, les
deux hommes qui avaient déjoué la surveillance de la garde, glissaient dans la
pénombre et gravissaient les pentes de l’immense chaîne montagneuse.
    « Qu’as-tu l’intention de
faire ? demanda le devin.
    — Je veux évoquer l’ombre de
Parménion, répondit le roi en fixant sur lui ses yeux fébriles. Peux-tu
l’appeler pour moi, Aristandre ? »
    Le devin acquiesça. « Si elle
rôde encore sur ces terres, je la conduirai vers toi, mais si elle a déjà
rejoint la demeure de l’Hadès, je ne pourrai l’atteindre sans mourir à mon
tour.
    — Il y a deux nuits, j’ai rêvé
que je le voyais gravir ce col. Il cheminait, le dos voûté, comme sous le poids
d’un lourd fardeau, et sa chevelure blanche se confondait avec la neige
immaculée. De temps à autre, il me faisait signe de le suivre d’un geste de la
main… sa grosse main calleuse de vieux guerrier. À un moment donné, il s’est
tourné vers moi et j’ai pu voir la blessure qui s’étalait sur sa poitrine, mais
je n’ai décelé dans son regard ni haine ni ressentiment. Ses yeux ne
traduisaient qu’une infinie mélancolie. Rappelle-le, Aristandre, je t’en
conjure !
    — Te souviens-tu de l’endroit
où tu as cru le voir ?
    — Là, répondit le roi en
indiquant le

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