Le Roman d'Alexandre le Grand
la rive, avant de nous y
aventurer avec la flotte. »
Il fit aussitôt hisser le drapeau
d’alerte et cria aux timoniers de virer de bord. Le chef d’équipage
hurla : « Rames à tribord, dehors ! » Et les rameurs du
flanc droit levèrent leurs rames tandis que les autres continuaient à pousser
le navire, qui se déporta vers la rive droite du fleuve. Au vu des signaux et
de la manœuvre du vaisseau amiral, les autres embarcations accostèrent à leur
tour et jetèrent l’ancre. Mais tandis que les équipages se livraient aux
opérations de mouillage, on entendit un grand cri. Des milliers de guerriers
apparurent soudain au sommet des collines qui dominaient le fleuve de l’est, et
fondirent sur l’armée d’Alexandre.
Le roi ordonna aux trompettes
d’emboucher leurs instruments. Alors les « écuyers » et les
attaquants sautèrent à l’eau, armés de pied en cap, et se précipitèrent vers
l’ennemi.
« Qui sont ces hommes ?
demanda Alexandre.
— Des Malliens, répondit
Néarque. Nous approchons de l’Indus. Ce sont des guerriers féroces et
irréductibles.
— Mes armes ! »,
ordonna le souverain.
Ses ordonnances accoururent aussitôt
avec sa cuirasse, ses jambières, son casque à crête.
« N’y va pas, Alexandre !
l’implora Roxane en s’accrochant à son cou.
— Je suis le roi. Je dois être
le premier. » Il l’embrassa rapidement et cria à ses hommes :
« Suivez-moi ! »
Brandissant son bouclier, il sauta à
l’eau et se dirigea vers la rive.
Des milliers de guerriers
débarquaient à terre parmi les sonneries de trompettes et les ordres prononcés
dans toutes les langues de la grande armée.
Dès qu’Alexandre eut mis le pied sur
le sol ferme il fut rejoint par les bataillons de l’infanterie lourde, tandis
que, plus en amont, commençaient à débarquer les chevaux et les soldats qui
allaient former les premiers escadrons de la cavalerie.
Après le succès du choc initial, les
ennemis reculèrent sous la pression des détachements macédoniens qui ne
cessaient de se renforcer, attaquant désormais en formation compacte. Dans
l’impossibilité de les repousser, les Malliens se résignèrent à la retraite,
sans cesser toutefois de résister en gravissant le flanc des collines. Ayant
reconquis alors l’avantage de la position, ils contre-attaquèrent avec une
énergie renouvelée. Le front hésita un certain temps jusqu’à ce que les navires
aient livré assez de chevaux pour former plusieurs détachements de cavalerie.
En fin de matinée, les cavaliers purent ainsi exercer une pression sur les
flancs des ennemis. Alors Alexandre monta sur son destrier, lui aussi, et mena
la charge. Mais on vit surgir au même moment une longue rangée de cavaliers
ennemis sur la crête des collines qui se dressaient de l’autre côté. Elle
fondait sur les escadrons du roi.
La bataille fit rage jusqu’à midi
environ, heure à laquelle les Macédoniens finirent par l’emporter en repoussant
les Malliens au-delà des collines. Une fois au sommet, Alexandre embrassa le
paysage du regard et découvrit cinq villes. L’une d’elles se distinguait par
ses fortifications massives en briques crues.
Le roi partagea alors son armée en
cinq colonnes et ordonna à chacune d’elles de se lancer à l’assaut d’une des
cinq villes. Il prit la tête de la cinquième colonne, la plus nombreuse, pour
attaquer la capitale avec Perdiccas, Ptolémée et Léonnatos. Au moment où il
s’apprêtait à crier ses ordres, Léonnatos lui dit : « Alexandre,
regarde ! Péritas s’est échappé du navire. » En effet, le molosse
gravissait la colline en courant à perdre haleine pour rejoindre son maître.
« Par Zeus ! pesta le roi.
S’il lui arrive quelque chose, je ferai fouetter le serviteur chargé de sa
surveillance. Va-t’en, Péritas, va-t’en ! Retourne auprès de Roxane.
Va-t’en ! »
Le chien sembla lui obéir, mais dès
qu’Alexandre se fut éloigné au galop à la tête de ses hommes, il se jeta de
nouveau à sa poursuite.
En milieu d’après-midi, la colonne
du roi avait presque atteint la muraille de la ville, où les Malliens tentaient
de se réfugier en se ruant à travers les trois portes de l’enceinte encore
ouvertes.
Entraîné par sa fougue, Alexandre,
qui avait aperçu une faille dans la muraille due à un manque d’entretien ou à
l’érosion des pluies, avait mis pied à terre et courait sur cette sorte de
rampe pour s’emparer de
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