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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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dans
l’obscurité pour crier : « Pézétairoï, présentez armes ! »
    Les fantassins brandirent leurs
sarisses tandis que l’âme de Péritas s’envolait en gémissant dans le vent, se
séparant pour la première fois de son maître depuis le jour de sa naissance.
    Philippe veilla le roi toute la nuit
en compagnie de Roxane et de Leptine. Vers l’aube, la reine s’assoupit, vaincue
par la fatigue, mais elle continua de gémir dans son demi-sommeil, tourmentée
par des pensées angoissantes.
    Héphestion et Ptolémée entrèrent
sous la tente au point du jour : à l’évidence, ni l’un ni l’autre
n’avaient fermé l’œil de la nuit. « Comment va-t-il ?
demandèrent-ils.
    — Il a passé la nuit. C’est
tout ce que je peux dire, répondit Philippe.
    — S’il meurt, nous brûlerons
cette ville et tous ses habitants : ce sera le sacrifice funéraire en son
honneur, dit Héphestion d’un air sombre.
    — Attends, répliqua Philippe,
la voix brisée par la fatigue. Il est encore vivant. »
    Deux autres jours s’écoulèrent, mais
les conditions du roi étaient loin de s’améliorer : elles s’aggravaient,
au contraire, laissant prévoir un funeste épilogue. La poitrine d’Alexandre
avait enflé en dépit du drainage que Philippe avait pratiqué, il avait une
grosse fièvre, un teint terreux, des cernes noirs, et il respirait à
grand-peine.
    Ses compagnons se relayaient devant
sa tente, soucieux de ne pas troubler son agonie, s’autorisant quelques heures
de sommeil uniquement lorsqu’ils étaient épuisés. Le campement, d’habitude fort
bruyant, était plongé dans un silence irréel, comme si le temps s’était arrêté.
    Ce soir-là, alors que la fièvre
montait encore et que le souffle du roi paraissait encore plus gêné et
douloureux que les jours précédents, Philippe se leva brusquement et sortit.
    « Où va-t-il ? demanda
Léonnatos.
    — Je ne sais pas, répondit
Héphestion. Je ne sais rien. Je ne sais plus rien… »
    Philippe traversa le camp tout en
jetant un rapide coup d’œil vers Aristandre qui continuait à immoler des
victimes sur son autel fumant. Il atteignit bientôt un lieu où se dressait un
gigantesque banyan. Il s’immobilisa devant la silhouette squelettique de
Calanos, plongé dans sa méditation.
    « Réveille-toi », lui
dit-il brutalement.
    Calanos ouvrit les yeux.
    « Nos dieux et notre science
sont impuissants. Sauve Alexandre, si tu en es capable. Autrement, va-t’en et
ne reviens plus. »
    Calanos se leva, léger et comme
privé de poids. « Où est-il ? demanda-t-il.
    — Sous sa tente. Viens »,
répondit Philippe.
    Calanos le suivit jusqu’au pavillon
royal, éclairé par des lanternes.
    « Éteignez tout, ordonna-t-il
d’une voix ferme, une fois à l’intérieur. Et laissez-nous seuls. »
    Serviteurs et compagnons
s’exécutèrent sur-le-champ. Alors Calanos s’assit sur ses talons derrière le
lit et fixa du regard la tête d’Alexandre, se raidissant comme un bloc de
pierre.
    Il demeura ainsi le lendemain, le
surlendemain et le jour suivant. À l’aube du quatrième jour, Philippe survint
et écarta le rideau de l’entrée pour faire pénétrer un peu de lumière à
l’intérieur de la tente. Tandis qu’il se lavait les mains dans une cuvette
avant de changer le pansement du roi, une voix faible s’éleva dans son
dos : « Philippe… »
    Il se retourna brusquement :
« Mon roi ! »
    Sa fièvre avait diminué, sa
respiration était régulière, son cœur battait faiblement mais à un bon rythme.
Il l’ausculta : le gargouillement sourd de son sang avait cessé. Il appela
Leptine. « Avertis la reine. Dis-lui que le roi s’est réveillé. Et prépare
sans tarder une tasse de bouillon, nous devons le nourrir : il est à bout
de forces. » Leptine s’éloigna et Philippe se précipita à l’extérieur, où
Lysimaque et Héphestion patientaient. « Dites à vos amis que le roi s’est
réveillé, leur lança-t-il.
    — Comment va-t-il ?
demanda Héphestion d’une voix inquiète.
    — Comment veux-tu qu’il
aille ? lui répondit le médecin. Comme un homme dont les côtes ont été
transpercées par une énorme lame. »
    Il retourna au chevet d’Alexandre.
C’est à ce moment seulement qu’il aperçut Calanos : il gisait sur le sol,
aussi inerte et froid qu’un cadavre.
    « Oh, grand Zeus ! s’écria
Philippe. Grand Zeus ! »
    Il ordonna à ses assistants de
l’installer sous sa

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