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Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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droiture.
    Mais certains, qui ne pouvaient nier cette apparence, ces attitudes de gentilhomme, murmuraient que le roi était un homme sans volonté qui se laissait aveuglément mener par des vilains, des traîtres, des voleurs qui avaient conquis sa confiance.
    Ils affirmaient que le roi négligeait ses devoirs, qu’il ne se souciait que de chasser, abandonnant à des étrangers, des Flamands, à de vils conseillers, les affaires du royaume, tout comme son père Philippe III le Hardi les avait abandonnées à son favori, Pierre de la Broce.
    J’ai lu ce qu’on écrivait du roi, grugé, dupé par les « vilains » qui le conseillaient :

    Les receveurs ont l’avoir
    Et le Roi a la réputation de prendre…
    Le Conseil du Roy prend et partage
    Et le Roi a la moindre part
    Mais le Roi ne doit plus être enfant
    Il pourrait connaître
    Qui lui donne ou pain ou pierre…

    Mais que penser alors du moine de Saint-Denis, frère Yves, qui, témoin de la mort du roi, a su brosser ce portrait de l’homme qu’il avait côtoyé et vu affronter la mort :
    « Ce roi était très beau, suffisamment lettré, affable d’aspect, de moeurs très honnêtes, humble, doux, trop humble, trop doux, exact aux offices divins. Il fuyait les mauvaises conversations. Il pratiquait le jeûne, il portait un cilice ; il se faisait administrer la discipline par son confesseur avec une chaînette. Simple et bienveillant, il croyait que tout le monde était animé d’excellentes intentions ; cela le rendait trop confiant et ses conseillers en abusaient. »

    J’ai connu ces conseillers sans jamais avoir participé au Conseil du roi.
    Je n’étais qu’un chevalier qui se tenait à portée de voix et qui pouvait donc aussi bien entendre les propos des conseillers que ceux de la reine Jeanne de Navarre ou de Charles de Valois, frère du roi.
    Et j’écoutais aussi ces seigneurs, ces chroniqueurs qui jugeaient que le roi favorisait les gredins, les étrangers, les roturiers :

    Le Roi qui est dur et tendre
    Est dur aux siens et doux aux étrangers
    France est condamnée à la servitude
    Car Français n’y sont point écoutés
    Qui sont nés de leur droite mère
    Ils sont aujourd’hui mis en arrière.

    Mais ces conseillers, même s’ils n’étaient point natifs d’Île-de-France, avaient choisi de servir Philippe IV le Bel avec la fidélité de vassaux. Ils avaient voué leur vie au roi de France.
    Ainsi Pierre Flote, que le roi retenait souvent auprès de lui, était issu d’une famille noble du Dauphiné. Il avait étudié le droit à Montpellier. Étranger ? Je sais qu’il est mort en chevalier français à la bataille de Courtrai, le 11 juillet 1302, aux côtés de Robert II d’Artois, neveu de Saint Louis.
    Un autre conseiller, Enguerrand de Marigny, était normand, et c’est la reine Jeanne qui l’avait fait entrer dans le cercle des proches du roi. Je ne peux le juger. Hardi financier, il rassembla sur sa tête toutes les haines et les jalousies et la mort du roi le livra à ses ennemis.
    Quant à Guillaume de Nogaret, qui, après la mort de Pierre Flote, devint le plus proche conseiller du roi, il était né à Saint-Félix-en-Lauragais, non loin de Toulouse. Ceux qui le craignaient disaient qu’il était la « hache » du roi. Il voulait qu’on le nommât « chevalier du roi de France ». Pour le service du roi il osa affronter le pape Boniface VIII, et fut pour cela excommunié.
    Lui aussi, comme Enguerrand de Marigny, finit frappé par la foudre de la haine.

    De Guillaume de Nogaret, je retiens le portrait qu’il a tracé de Philippe le Bel alors même que l’on présentait ce conseiller comme un démon :
    « Monseigneur le roi, écrivait-il, est de la race des rois de France qui tous, depuis le temps du roi Pépin, ont été religieux, fervents champions de la foi, vigoureux défenseurs de la Sainte Mère l’Église. Avant, pendant et après son mariage, il a été chaste, humble, modeste de visage et de langue. Jamais il ne se met en colère, il ne hait personne, il n’envie personne, il aime tout le monde. Plein de grâce et de charité, pieux, miséricordieux, suivant toujours la vérité et la justice, jamais la détraction ne trouve place dans sa bouche. Fervent dans la foi, religieux dans sa vie, bâtissant des basiliques, pratiquant les oeuvres de piété, beau de visage et charmant d’aspect, agréable à tous, même à ses ennemis quand ils sont en sa présence, Dieu fait aux

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