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Le sang des Dalton

Le sang des Dalton

Titel: Le sang des Dalton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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regagné la pension où chaque membre de la bande avait évoqué ses divertissements.
    Bitter Creek Newcomb se faisait appeler « Slaughter Kid » en ville, histoire que tout le monde le prenne pour un Texan. Il avait passé sa première après-midi à tailler une flûte en roseau et sa soirée à récolter des poux de corps en compagnie d’une fille de ferme obèse du Missouri. Après s’être offert un bain chaud additionné de pétrole lampant, il s’était dès lors consacré au jeu, jusqu’au moment où, autour d’une table tapissée de velours vert, un gars de l’Alabama l’avait traité de sale tricheur. Newcomb avait frappé l’impudent à la pomme d’Adam avec une bouteille de whisky du Kentucky, le garçon était lourdement tombé sur le sol, et il aurait avalé sa langue comme une truite fraîchement pêchée si le barman ne l’avait rattrapée avec des pinces.
    Newcomb s’était imaginé que l’altercation allait en rester là et il était sur le point de rafler un pot de quatorze dollars quand, deux heures plus tard, le jeune homme l’avait assommé par-derrière avec la poignée d’une pompe à bière et l’avait étalé par terre. Newcomb avait tendu la main vers son revolver, mais son agresseur lui avait marché sur la main et lui avait cassé l’ongle du pouce avec le talon de sa botte.
    « C’est fini, maintenant ? avait maugréé Newcomb en suçant son doigt.
    — Oui, je crois bien », avait confirmé le garçon.
    Sa bouche tremblait et il avait les larmes aux yeux. Newcomb était resté un moment encore hébété sur le sol, à considérer le bas ensanglanté de sa chemise, dans lequel il avait enveloppé sa main.
    William McElhanie et moi courions les bordels  – même si Bill fut le seul à baisser son pantalon. Après un petit déjeuner à vingt-cinq cents composé de crêpes, d’un steak et de quatre œufs, nous mettions le cap sur les lupanars de l’autre côté de l’arroyo et nous nous postions sous quelque véranda, un brin d’herbe entre les dents, suffoquant de chaud dans nos costumes trois-pièces qui nous grattaient. Nous lorgnions les filles qui sortaient des cabinets à l’arrière, qui allaient chercher de l’eau au puits artésien ou qui étendaient leur linge dehors. Celles qui étaient indisposées se chargeaient des tâches ménagères le matin. Elles ne s’habillaient pas pour séduire. Elles avaient les cheveux défaits et leurs longues robes grises présentaient des taches noires au niveau des aisselles. On aurait pu les confondre avec des fermières revenant du poulailler avec des œufs. Le soir, calé dans les sièges en chintz du petit salon, McElhanie me confiait à voix basse les on-dit qu’il avait entendus à propos de celles qui étaient disponibles. « À ce qu’il paraît, elle est sèche comme de la pierre ponce », m’exposait-il. Ou encore : « Elle rembourre son chemisier avec des sandwichs. » McElhanie n’avait que seize ans à l’époque. Je me suis toujours demandé comment il avait tourné.
    Pendant le plus clair de sa première semaine en ville, mon frère se comporta comme un politicien. Il écoutait avec une attention exagérée, serrait quantité de mains, se présentait aux notables comme un ancien marshal adjoint et abreuvait les autochtones de bon whisky, alors que sur le chapitre de l’alcool, il était aussi intransigeant qu’une bonne femme d’une société de tempérance.
    Mais s’il récoltait des renseignements, il n’en dispensait guère, si bien qu’il y avait parfois des moments de silence et de gêne considérables quand il déjeunait avec des inconnus. C’était alors que je m’avérais utile, car j’étais capable de pérorer comme un vendeur de bicyclettes. Lorsqu’un banquier discourait sur la Bourse des céréales de Chicago, que ses idées commençaient à se tarir et qu’il se mettait à étudier sa fourchette, Bob m’adressait un signe de la tête et j’entreprenais de jacasser sur Billy le Kid, dont le véritable nom n’était pas William H. Bonney, mais Henry McCarty, né à Brooklyn ; il avait débarqué dans l’Ouest en voiture Pullman, vécu à Coffeyville quand il avait douze ans et débuté dans la carrière criminelle après s’être échappé par la cheminée de la prison de Silver City, où il était détenu pour avoir volé du linge. « Ce n’est pas reluisant, concluais-je, mais ce sont les faits. » Bob se carrait ensuite dans son fauteuil et dévisageait le

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