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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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button aux fades ( 7 ) », une famille d’hommes libres, venant de la région d’Erfurt, a été pourvue par notre souverain d’un domaine, en remplacement d’Aquitains qui avaient péri pendant la guerre, il y a de cela plus de vingt ans. Cette famille comptait à présent, outre Godfrid le père et Herta la mère, deux fils, l’aîné Albert qui sert aux confins de la Bretagne, et le cadet Gilbert qui était demeuré là, sans compter deux filles.
    — Tu as dit : « Cette famille comptait…» intervint Erwin. Dois-je comprendre… ?
    — Hélas ! oui, seigneur. Un journalier qui, à l’aube, se rendait à son travail, a aperçu Godfrid et son fils Gilbert, gisant sur le seuil de leur demeure, dans une mare de sang, égorgés, sous les yeux de Herta !
    — Égorgés ?
    — Oui, égorgés… On finit par apprendre que les meurtriers, au nombre de quatre ou cinq, revêtus de capuches qui dissimulaient leurs visages, avaient fait irruption avant l’aube, saisi le père et le fils à moitié endormis, immobilisé Herta, et traîné Godfrid et Gilbert devant leur demeure où, là, froidement, ils les mirent à mort.
    Un silence suivit cette description macabre.
    — Quand cela s’est-il produit ? demanda Erwin.
    — Il y a exactement vingt jours.
    — Pourquoi de tels crimes ? En a-t-on déjà une idée ? Car, bien entendu, tu n’as pu manquer de diligenter une enquête.
    Le comte Sturbius, l’air accablé, marmonna une vague approbation. Puis il précisa :
    — Dès que je fus au courant, je dépêchai sur place deux viguiers, Berthet et Godart, hommes fort avisés…
    — Pourquoi ne pas t’y être rendu toi-même ? Une telle succession de forfaits ne devait-elle pas te commander de t’en occuper sur place ?
    — Je me proposai de le faire au plus tôt. Mais, d’autre part, votre venue, seigneurs…
    Sturbius hésita de nouveau.
    — Et alors, tes collaborateurs… quels résultats ? lança Childebrand qui s’impatientait.
    Le comte de Bourges répondit d’une voix presque inaudible :
    — Deux jours après leur arrivée dans la Brenne, ils ont disparu…
    — Disparu ?
    Childebrand asséna sur la table un formidable coup de poing.
    — Comment ? Quoi ? cria-t-il. Disparus ! Des enquêteurs qui disparaissent ! Dois-je en croire mes oreilles ? Et à la suite d’un tel défi, qu’as-tu donc envisagé, entrepris ? Peux-tu me le dire ?
    Un chapelet de jurons acheva cette tirade.
    — Je n’ai été informé de ce nouveau drame, expliqua piteusement le comte de Bourges, qu’à cinq jours de votre arrivée. Que devais-je faire ? J’ai jugé que ma place était ici pour vous accueillir. J’ai donc envoyé au vicomte Farald, à Châteauroux, un courrier pour lui ordonner de réunir sur ces noyades, meurtres et disparitions tous les renseignements utiles, en ne ménageant ni son temps ni sa peine. Il devait, il doit toujours, se tenir prêt à venir ici, et dans les moindres délais, pour tout compte rendu ou toute démarche que vous estimerez nécessaire.
    — Combien de lieues jusqu’à Mézières-en-Brenne ? demanda Childebrand, d’une voix lourde de menaces.
    — Vingt-cinq, seigneur.
    — N’avais-tu pas le temps d’un aller retour pour nous en rapporter des informations vérifiées par toi-même, et récentes ?
    — Mais ne devais-je pas m’assurer qu’ici toutes les dispositions avaient été prises pour votre séjour ?
    — Je gage que l’archevêque Ermembert y aurait pourvu à notre satisfaction !
    Le prélat acquiesça d’une inclinaison de la tête avec un sourire de complicité bienveillante.
    Erwin qui, depuis un moment, le regard au loin, se caressait lentement le menton, intervint brusquement avec un air apparemment conciliant.
    — Bien ! Les choses sont ce qu’elles sont, n’est-ce pas, c’est-à-dire au point où les ont menées carence et négligence, dit-il. Conséquence : de toutes les tâches que, missionnaires du souverain, nous devons accomplir en Berry, l’une d’elles, à l’évidence, prend le pas sur les autres : rétablir l’ordre et la justice en Brenne, y faire cesser troubles et scandales. La situation réclame des initiatives immédiates ; avec mon ami, le comte Childebrand, nous allons en délibérer sur-le-champ.
    Les deux missi dominici se retirèrent pour un aparté.
    Au retour, sans préambule, Childebrand annonça, tandis que le diacre Dodon prenait note de la décision :
    — Nous, comte Childebrand et abbé Erwin, pourvus par l’empereur Charles le

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