Le temps des adieux
impressionner, ricana Petronius en regardant Fusculus.
Comme on n’avait pas besoin de moi pour mener les fouilles, je m’éloignai sans répondre, me contentant de hausser les épaules. J’avais des problèmes personnels à régler.
Je me rendis chez mon père, sachant pertinemment qu’il serait à la Sæpta Julia. Je préférais laisser un message à ses domestiques disant qu’on avait retrouvé un de ses trésors syriens et que, par ailleurs, j’avais besoin d’un cadeau pour Helena. En apprenant que c’était son anniversaire, P’pa voudrait nous infliger sa présence… Heureusement, comme nous devions nous rendre chez ses parents à elle, nous pourrions y échapper.
Ceci étant fait, je passai voir ma mère. Elle était également sortie. Je m’arrangeai toutefois pour qu’une voisine cancanière m’aperçoive. J’étais très content de moi. J’avais rendu visite à mon père et à ma mère, en ayant réussi à les éviter tous les deux.
De retour Cour de la Fontaine, je saluai Cassius d’un geste et remarquai que quelqu’un occupait le magasin situé en face de sa boulangerie. Celui qu’Helena et moi avions visité. Je ne réussis cependant pas à voir si c’était pour y établir un commerce. J’allai visiter notre futur appartement à la lumière du jour : on pourrait vraiment le transformer en un logement décent. En inspectant ensuite ma charrette, je découvris que le nombre de saloperies enlevées dépassait le nombre de saloperies rajoutées. J’étais donc gagnant. Je n’aurais pourtant pas dû me réjouir aussi vite. Lenia m’aperçut au moment où je traversais la rue pour monter au sixième.
— Falco ! Il faut qu’on se mettre d’accord !
— Sur la façon dont tu vas te débarrasser de ton fiancé ?
— Toi, on peut dire que tu as de la suite dans les idées !
— Je veux simplement éviter que tu me charges de te trouver un motif de divorce dans deux mois afin de récupérer ta dot. Amasser des preuves contre Smaractus sera le travail le plus sordide que j’aurai jamais eu à faire.
— C’est simplement un personnage haut en couleur, le défendit la blanchisseuse.
— Tu veux dire un désastre ambulant !
— Il a juste besoin d’un foyer, assura-t-elle.
— Sa place, c’est sur un tas de fumier.
En voyant le tour que prenait la conversation, elle me laissa partir sans discuter des augures.
Je m’élançai dans l’escalier avec une belle fougue et ne m’arrêtai qu’un bref instant pour expliquer à la chienne Nux qu’il n’était pas question de me suivre. C’était une bâtarde hirsute, de diverses couleurs, aux yeux limpides pleins de mélancolie. Quelque chose dans ses grosses pattes touffues et dans son museau aux moustaches en bataille m’apparaissait dangereusement irrésistible. Je montai le reste des marches quatre à quatre pour la décourager.
L’après-midi tirait à sa fin. Les appartements devant lesquels je passais au cours de mon ascension me paraissaient plus calmes que d’habitude – moins d’enfants braillards, moins d’adultes en train de se disputer –, et les odeurs moins nauséabondes. Tout d’un coup, même si l’immeuble était branlant et bien trop peuplé, j’en venais presque à me dire que son propriétaire méritait de jouir d’une vie normale… Je tentai de me secouer pour ne pas m’attendrir. Me laisser entraîner à sa cérémonie de mariage avec Lenia dans le rôle du prêtre ne me disait rien qui vaille. Si j’acceptais, je me sentirais responsable de leur bonheur futur. Cette pensée m’arracha quelques jurons bien sentis.
En approchant de chez moi, j’entendis une voix d’homme en colère, puis celle d’Helena qui criait :
— Non ! Oh, non !
Je traversai le palier en deux enjambées. La porte étant restée ouverte, je bondis dans la pièce assez essoufflé, mais prêt à tout.
La voix d’homme appartenait au jeune Porcius, la nouvelle recrue de Petronius Longus. Il essayait, sans aucun succès, de calmer deux brutes qui devaient avoir envahi l’appartement peu de temps avant mon arrivée. L’un se payait même sa tête ouvertement, tandis que l’autre menaçait Helena. Il tenait en outre le bébé trouvé par les poignets et le balançait dangereusement.
— Je ne suis pas Falco, et cet enfant n’est pas le leur ! hurlait Porcius au moment où je fis irruption.
Je hurlai à mon tour :
— C’est moi, Falco !
Le géant qui faisait face à Porcius se
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