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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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mauvaise influence de la marquise dePompadour sur le roi. Plusieurs chansons la visent cruellement, mais d’autres n’épargnent pas le monarque jugé responsable d’une paix honteuse qui le déshonore. L’opinion publique se déchaîne contre lui et contre elle. Libelles injurieux, satires et chansons fleurissent de toutes parts. Le 12 février 1749, jour de la proclamation officielle de la paix, le peuple a boudé les réjouissances. Les quelques allégementsd’impôts promis par le ministère n’ont pas causé la moindre allégresse. Les Parisiens n’ont pas répondu au cri de « Vive le roi » lancé par le héraut d’armes venu annoncer la fin des hostilités. Pour comble de malchance, le soir du feu d’artifice, près de cent personnes ont trouvé la mort sur les quais. On attribue la responsabilité de ce malheur à l’impéritie du gouvernement royal. « Qu’annonce une telle paix, célébrée avec de telles horreurs ? », murmure-t-on. En cet hiver rigoureux, le coût de la vie n’a pas baissé. On sait les finances du royaume en difficulté. On accuse les manieurs d’argent qui entourent le roi et sa favorite pour laquelle on dépense des sommes exorbitantes. Un sentiment d’amertume pèse sur la capitale et on se répète à satiété certains vers qui font frémir d’horreur le roi et sa maîtresse :
    Lâche dissipateur des biens de tes sujets,
    Toi qui comptes les jours par les maux que tu fais,
    Esclave d’un ministre et d’une femme avare,
    Louis, apprends le sort que le ciel te prépare.
    Si tu fus quelque temps l’objet de notre amour,
    Tes vices n’étaient pas encore dans tout leur jour.
    Tu verras chaque instant ralentir notre zèle
    Et souffler dans nos cœurs une flamme rebelle […]
    Parmi ces histrions qui règnent avec toi
    Qui pourra désormais reconnaître son roi ?
    Tes trésors sont ouverts à leurs folles dépenses
    Ils pillent tes sujets, épuisent tes finances,
    Moins pour renouveler tes ennuyeux plaisirs,
    Que pour mieux assouvir leurs infâmes désirs.
    Ton État aux abois, Louis, est ton ouvrage ;
    Mais crains de voir bientôt sur toi fondre l’orage […]
    Tu ne trouveras plus des âmes assez viles
    Pour célébrer tes prétendus exploits
    Et c’est pour t’abhorrer qu’il reste des Français […].
    Malgré les prodiges de Mme dePompadour pour le distraire, le roi est retombé dans sa mélancolie maladive. Elle ne le laisse jamais seul, le secoue, l’agite pour le détourner de ses sombres pensées, essaie de le rassurer et de l’étourdir par une gaieté qu’elle sait feindre. Elle invite de plus en plus de monde aux soupers des cabinets et multiplie les escapades à Choisy, LaMuette, à La Celle et dans un ermitage près la grille du Dragon, à Versailles.
    Maurepaset d’Argenson insinuent àLouis XV l’idée de la sacrifier pour calmer l’opinion. Une estampe circule sous le manteau montrant le roi enchaîné à samaîtresse et àPuysieulx, se faisant fouetter par les monarques étrangers.
    Au début du mois de mars, plusieurs couplets injurieux ont mis le comble à l’indignation de la favorite :
    Les grands seigneurs s’avilissent,
    Les financiers s’enrichissent,
    Tous les Poissons s’agrandissent :
    C’est le règne des vauriens.
    On épuise la finance
    En bâtiments et en dépense ;
    L’État tombe en décadence,
    Le roi ne met ordre à rien, rien, rien.
    Le pamphlétaire fustige la beauté fanée de lafavorite, « sa peau jaune et truitée », ses dents « tachetées », son haleine empestée, sa « voix chevrotante » et sa vulgarité de « commère ».
    Elle veut qu’on prône
    Ses petits talents
    Et se croit au trône
    Ferme pour longtemps ;
    Mais le pied lui glisse,
    Le roi sort d’erreur,
    Et ce sacrifice lui rend notre cœur […].
    De toute évidence, l’auteur de ces « poissonnades » appartient au petit monde fermé de Versailles. On se doute que l’attaque vient des trois ministres ennemis de la favorite et l’on chuchote surtout le nom deMaurepas, qui a toujours cultivé l’art de l’épigramme insolente. Persuadée de sa culpabilité, Mme de Pompadour se souvient qu’il a naguère poursuivi de ses sarcasmes la duchesse deChâteauroux, dont il souhaitait la disgrâce. Bouleversée par la violence qui se déchaîne contre elle et contre le roi, elle redoute qu’une main criminelle ne veuille attenter à ses jours. Elle fait goûter tous les mets qu’on lui apporte et exige la présence

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