Le Testament Des Templiers
“En mémoire éternelle du plus grand homme que j’aie jamais connu, saint Bernard de Clairvaux.” »
Luc passa le doigt sur l’auréole du saint sur la couverture.
« C’est lui ?
– Probablement.
– Aucun rapport avec les chiens ?
– En fait, si. C’est à lui qu’ils doivent leur nom mais, depuis, j’ai appris qu’il était nettement plus connu pour autre chose.
– Alors, dis-moi la suite.
– Je ne peux pas. »
Luc commençait à perdre patience.
« Pourquoi pas ? »
Hugo s’amusait visiblement.
« Je ne peux pas le lire. »
Luc en avait assez de jouer.
« Écoute, crache le morceau et ne fais pas l’imbécile. Pourquoi ne peux-tu pas le lire ?
– Parce que la suite est codée. »
5
C haque fois qu’il revenait dans le Périgord, Luc avait l’impression de rentrer chez lui. Tout y était vert, fertile, et chaleureux comme les bras d’une mère. Depuis sa plus tendre enfance, et les étés passés dans la maison de vacances familiale à Saint-Aulaye à patauger le long de la plage du village bordé par la Dronne, Luc n’avait jamais été aussi heureux que dans cette région.
Le terrain vallonné, les gorges profondes de la rivière, les falaises calcaires, les terrasses inondées de soleil qui s’étendaient au-delà des versants couverts de vigne, les parcelles de forêts denses, les pruniers et les chênes verts si abondants dans ce sol sablonneux, les villages anciens et les villes construites en grès qui jalonnaient les routes secondaires tortueuses – tous ces éléments lui tenaient à cœur et l’incitaient à revenir. Mais le plus important était les fantômes du Périgord ancien, des âmes lointaines qui le hantaient comme dans un rêve éveillé, des ombres qui se glissaient à travers les forêts, toujours inaccessibles.
Ses rêves d’enfant d’un homme primitif rôdant aux alentours, nourris par ses visites des grottes obscures de la région couvertes de peintures, ainsi que le roman de Jean Auel, Le Clan de l’ours des cavernes , qu’à onze ans il avait dévoré, lui avaient tracé sa voie, et mené jusqu’à l’université de Paris, à Harvard, et maintenant la faculté de Bordeaux.
Luc était allé chercher Hugo à la gare centrale de Bordeaux, la gare Saint-Jean, et de là, ils avaient pris la direction de l’ouest dans sa vieille Land Rover. Luc connaissait la route par cœur ; il aurait presque pu la faire les yeux fermés. La Land Rover, surnommée un jour la Glande Rover par un étudiant facétieux, avait plusieurs centaines de milliers de kilomètres au compteur. Le jour, lorsqu’une fouille était en cours, et malgré des amortisseurs défaillants, elle servait à véhiculer étudiants et matériel jusqu’au site, et, le soir, à conduire les jeunes archéologues, chargés de bière et de testostérone, jusque dans les cafés alentour et à les ramener.
Ils arrivèrent à l’abbaye avant le déjeuner et s’assirent avec dom Menaud dans le bureau de sa maison abbatiale, une pièce poussiéreuse remplie de livres, qui ressemblait plus à une tanière de professeur qu’à celle d’un ecclésiastique. Hugo fit les présentations et s’excusa de leur tenue. Soucieux de la mode comme il l’était, il déplorait de devoir assister à une réunion habillé en randonneur.
Hugo avait correspondu avec l’abbé au sujet des restaurations, et un calendrier avait été établi pour le retour de tous les livres. Mais à présent, dom Menaud était particulièrement impatient de voir de ses yeux le manuscrit de Barthomieu, et lorsque Hugo le sortit de son porte-documents, il le saisit comme un enfant gourmand à qui on tend une tablette de chocolat.
L’abbé passa cinq bonnes minutes à feuilleter les pages dans un silence absolu, étudiant le texte à travers ses lunettes à double foyer, puis il secoua la tête d’un air émerveillé.
« C’est vraiment remarquable. Saint Bernard, entre tous ! Et pourquoi ce Barthomieu a-t-il jugé nécessaire de se cacher derrière un code ? Et ces illustrations magnifiques ! Je suis ravi et étonné, et en même temps, je dois l’admettre, je crains de découvrir ce que tout cela signifie.
– Nous sommes bien d’accord, en convint Hugo pour l’apaiser, et sans se départir de son professionnalisme face à son client. C’est pour ça que nous sommes là. Nous voulons absolument trouver des explications, et le professeur Simard a gracieusement accepté de nous
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