Le Testament Des Templiers
plante grimpante enchevêtrée qui envahit les arbres de taille moyenne, dit-elle, en rompant l’enchantement. Les feuilles ressemblent à des pointes de flèche allongées. La saison est avancée, ne t’attends donc pas à des fleurs rose et blanc, mais il pourrait y avoir malgré tout quelques floraisons tardives. »
On entendait un bruit d’écoulement, et leurs bottes commençaient à coller dans la boue. Luc se demanda si le ruisseau allait grossir une des cascades de Barthomieu. Le long de la rive, il y avait une population mélangée de chênes verts et de hêtres, avec un épais sous-bois de mauvaises herbes et d’acacias épineux. Son jean s’accrocha dans les épines, et quand il se pencha pour se dégager, il entendit du latin sortir de la bouche de Sara, des mots harmonieux, comme si elle se mettait à chanter un hymne.
« Convolvulus arvensis ! Là ! »
Le liseron sans fleurs avait attaqué les jeunes arbres, exactement comme elle l’avait prédit. Ses pousses s’enroulaient étroitement autour du tronc et montaient en spirale bien au-dessus de leurs têtes.
Cette mauvaise herbe proliférait. Le problème n’était pas la quantité, mais le ramassage. Les lianes étaient tellement serrées autour du tronc qu’il était impossible de les arracher. Ils durent se livrer à un exercice méticuleux qui faisait mal aux doigts, consistant à couper et à dérouler les lianes, jusqu’à ce qu’ils aient rempli un autre sac de tiges et de feuilles.
« Et de deux ! Encore un. »
Elle marchait à nouveau devant et lui suivait. Les falaises et la rivière se trouvaient un peu plus loin. Elle rebroussa chemin en direction des prés. Elle avait étudié les cartes et savait qu’il y avait à proximité des rails de chemin de fer abandonnés depuis longtemps. Le dernier élément de leur quête risquait de se trouver sur un terrain autrefois cultivé et désormais en jachère. Ils cherchaient des buissons. Elle en parlait, mais il n’écoutait pas la leçon de botanique. Il souffrait et s’en voulait de s’être aussi mal comporté.
Cadre dans la pétrochimie, son père était un homme typique de sa génération, avec ses clubs privés, son goût pour l’alcool, son arrogance narcissique et ses jeunes maîtresses, malgré une femme adorable. S’il n’avait pas été victime d’une crise cardiaque, il serait probablement encore aujourd’hui en train de boire et de draguer, tel un Don Juan septuagénaire et pathétique.
Les gènes ou l’environnement – c’était l’éternelle question. Pourquoi Luc suivait-il les traces de son père ? Il avait vu l’effet que son comportement avait eu sur sa mère. Heureusement, elle avait pu retrouver son équilibre après son divorce, retourner aux États-Unis et reprendre sa vie en main après un quart de siècle passé à jouer l’épouse fragile d’un mari spécialiste du pétrole, et à se flétrir dans la chaleur du désert entre les murs des country clubs de Doha et d’Abu Dhabi, en se languissant de son fils unique qui avait été envoyé dans des écoles suisses.
Sa mère s’était remariée, avec un riche dermatologue de Boston cette fois, un homme sans grande personnalité ni prestance. Luc n’avait aucune affection pour lui et le tolérait à peine.
Brusquement, la question lui vint à l’esprit, aveuglante. Pourquoi avait-il repoussé Sara ? Leur relation n’avait-elle pas été la plus réussie de sa vie ? La plus satisfaisante ?
Pourquoi ne s’était-il jamais posé cette question ?
Les rails désaffectés étaient parallèles à la rivière, envahis par les mauvaises herbes à présent. Sara désigna une partie rectiligne et plate en bordure du champ et s’y dirigea tout droit. Luc lui emboîta le pas en silence, toujours obsédé par ses pensées.
Les rails n’étaient visibles que lorsqu’on était juste au-dessus. En fin limier, Sara jugea d’instinct qu’il valait plutôt aller vers le nord. Ils suivirent les rails, en ajustant leurs pas à l’espacement entre les dormants. Le long des rails, côté rivière, poussait une haie d’aubépines. Sara dit à Luc que cet environnement était tout à fait propice à ce qu’ils cherchaient.
Les nuages furent balayés par le vent et le soleil fit son apparition. Au bout d’une demi-heure, ils étaient toujours en train de longer les rails et Luc commençait à s’inquiéter pour les fouilles. Son téléphone mobile n’avait pas de couverture et il
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