Le tombeau d'Alexandre
large du rivage de la mer Rouge.
— Le désert ?
— Ça va, se défendit-elle en le gratifiant d’une petite tape sur la poitrine, vous voyez ce que je veux dire !
— Je suis anglais.
— J’aime bien votre tatouage, lui avoua-t-elle en suivant du doigt les contours de l’étoile à seize branches dessinée dans des tons bleu et or sur son biceps droit. C’est quoi ?
— C’est l’étoile de Vergina, le symbole des Argéades.
— Des quoi ?
— L’ancienne famille royale de Macédoine.
— Comment ça ? Genre Alexandre le Grand ?
— Bravo...
— Quoi, vous êtes fan ? demanda-t-elle en fronçant le nez. J’ai toujours entendu dire que c’était une brute ivrogne.
— On vous aura mal renseignée.
Elle sourit, heureuse d’être contredite.
— Allez-y, alors. Racontez-moi.
Knox se renfrogna. Par où devait-on commencer pour décrire un homme comme Alexandre ? Malgré une mort prématurée, celui-ci avait fait de la Macédoine, première puissance du monde grec, le centre d’un empire dominant de façon incontestée l’ensemble du monde connu.
— Il y avait une ville appelée Multan en Inde. C’était vers la fin des campagnes d’Alexandre. Ses hommes en avaient assez de combattre. Ils avaient envie de rentrer chez eux. Mais il ne voulait rien entendre. Il a été le premier à gravir les remparts. Les défenseurs sont parvenus à pousser les échelles des autres assaillants, si bien qu’il s’est retrouvé seul. N’importe quel homme aurait sauté pour sauver sa peau. Mais vous savez ce qu’il a fait ?
— Quoi ?
— Il a sauté à l’intérieur des remparts. Seul. C’était la seule façon d’obliger ses hommes à le suivre.
Et ils l’avaient suivi. Dévastant la citadelle pour le sauver, ils étaient parvenus jusqu’à lui juste à temps. La blessure au poumon qu’il avait reçue ce jour-là avait probablement contribué à sa mort, mais aussi à sa légende.
— Il se vantait d’avoir des cicatrices sur tout le corps, excepté sur le dos, poursuivit Knox.
— Il avait l’air complètement dingue ! s’exclama-t-elle en riant.
Alexandre n’était pas un saint mais, dans le contexte de son époque, il avait été meilleur que la plupart de ses contemporains.
— C’était un autre temps. Vous savez, lorsqu’il a vaincu l’empereur perse Darius à Issos, il a capturé sa mère Sisygambis et l’a placée sous sa protection personnelle. Quand il est mort, elle a été si bouleversée qu’elle s’est laissée mourir de faim. Pas quand son propre fils est mort, quand Alexandre est mort. On ne fait pas ça pour un dingue.
— Mouais...
Apparemment, elle en avait assez entendu sur Alexandre. Elle s’agenouilla, posa la main gauche à plat sur le pont et passa par-dessus Knox pour attraper la glacière rouge et blanc. Elle ouvrit le couvercle et goûta à toutes les bouteilles gardées au frais. Elle prit son temps ; ses seins, qu’elle savait mettre en valeur, se balançaient librement dans son bikini un peu lâche et ses mamelons étaient roses comme des pétales. Knox eut soudain l’impression d’avoir la bouche sèche. Ce n’est pas parce qu’on sait que c’est de la provocation que l’effet n’est pas le même. Mais ce petit jeu lui fit penser à Hassan. Il fronça les sourcils et regarda ailleurs. Elle se rassit en se laissant tomber, une bouteille ouverte à la main et un sourire malicieux aux lèvres.
— Vous en voulez ?
— Non, merci.
Elle haussa les épaules et but une gorgée.
— Vous connaissez Hassan depuis longtemps ?
— Non.
— Mais vous êtes un ami à lui ?
— Je fais partie du personnel, chérie. C’est tout.
— Mais il est casher, hein ?
— Drôle de mot pour désigner un musulman.
— Vous voyez ce que je veux dire...
Knox haussa les épaules. Il était trop tard pour y penser. Hassan l’avait ramassée dans une boîte, pas au catéchisme. S’il ne lui plaisait pas, elle aurait dû dire non ; c’était aussi simple que cela. On pouvait être naïve sans être stupide. De plus, elle savait parfaitement quel jeu elle jouait avec son corps.
A cet instant, Max Strati apparut devant la rangée de cabines. Il marchait vers eux d’un bon pas.
— Qu’est-ce que tu fous ? demanda-t-il à Knox, le regard perçant.
Il était venu passer ses vacances à Charm el-Cheikh vingt ans auparavant et n’était jamais rentré chez lui. Il s’était fait une place en Égypte et ne
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