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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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toujours amis ? Apparemment, nous ne le sommes plus. Soit ! Mais je croyais aussi vous avoir dit que j’avais besoin de vous pour sauver la reine et ses enfants.
    Sans répondre, Fersen s’éloigna de quelques pas, rejoignit la dame toujours debout à la même place, aussi immobile qu’une statue, lui dit quelques mots tout bas et revint auprès du chevalier.
    — Pardonnez-moi, dit-il. Je vous écoute !
    Sans lui donner ses sources, Gilles, en quelques phrases, le mit au courant du terrible danger qui menaçait la gondole royale, de l’envoi du filet à Sainte-Assise, sans en nommer l’auteur, et de ce que Tim Thocker, vieille connaissance de Fersen lui aussi en tant qu’ancien combattant de la guerre d’Indépendance, était en train de faire chez les Orléans.
    Avec simplement une exclamation horrifiée au passage du mot « poudre », Fersen l’écouta sans l’interrompre. Ce fut seulement quand Gilles se tut qu’il demanda, revenant cette fois naturellement à la vieille camaraderie d’autrefois :
    — Qui a fait cela ? dit-il seulement. Tu le sais ?
    — Oui. Et toi aussi si tu cherches bien. Mais ce nom-là est impossible à prononcer, de même que l’attentat serait impossible à prouver. À présent je crois que nous avons assez parlé et qu’il est temps d’agir…
    — Tu as raison. Viens ! Nous allons rejoindre le bateau où je comptais ramener cette dame… qui est l’une des femmes allemandes de la reine. Il est donc inutile que tu lui parles, elle ne te comprendrait pas.
    Le regard grave du chevalier plongea dans celui du Suédois dont, mieux que quiconque, il savait quels liens l’attachaient à la reine de France.
    — Y a-t-il une dame avec toi ? Je ne vois personne… Marche, je te suis !
    Silencieusement, les trois personnages embarquèrent. Gilles le premier avait sauté dans la barque et pris les avirons tandis que la dame s’installait à l’arrière, que Fersen détachait la chaîne et repoussait la berge du pied, avant de s’asseoir auprès de sa compagne. Celle-ci était parfaitement dissimulée à tous les regards. Outre le capuchon qui retombait plus bas que ses yeux, elle portait un masque vénitien dont la barbe de dentelle noire cachait tout le bas de son visage et rejoignait les liens soyeux de la mante. Elle aurait pu passer pour une statue d’ébène si le bas légèrement entrouvert de son manteau n’avait montré un coin de jupe claire.
    Gilles s’efforçait de ne pas la regarder mais ne pouvait se défendre d’une bizarre émotion en face de cette statue noire et droite si droite que le mot de majesté venait instinctivement à l’esprit.
    Le jeune homme rama vigoureusement jusqu’au milieu du fleuve puis plus doucement, plongeant ses pelles avec précaution et évitant les bruyantes éclaboussures, à mesure que l’on approchait du bateau plongé dans le silence. C’était l’heure où la nuit, avant de se laisser vaincre par le jour, faisait taire tous ses bruits qui sont comme les dernières défenses de la vie, l’heure entre toutes redoutée des angoisses nocturnes et des soucis accablants pour qui ne peut retrouver le sommeil, celle où la mort approche du lit des malades sur des pieds chaussés de velours noir…
    Le chant d’un coq voisin éclata, triomphant, à l’instant où le bord de la barque venait toucher la coque du navire et chassa les pensées lugubres du chevalier. Un autre lui répondit quelque part derrière les moulins, puis un autre de l’autre côté de la Seine.
    La dame se dressa dans le bateau, appuyée sur la main que lui offrait Fersen. Une forme féminine glissa d’une fenêtre entrouverte, s’approcha du bordage, fit retomber une courte échelle de corde et se pencha en tendant la main pour aider la voyageuse à prendre pied sur le pont. Puis les deux dames disparurent dans l’intérieur du bateau sans s’être retournées et sans qu’une seule parole eût été prononcée.
    — Écartons-nous, souffla Fersen et allons aborder un peu plus loin afin que je puisse retourner sur ce bateau au vu et au su de tous…
    Sans répondre, Gilles dégagea l’une des rames, l’appuya sur la coque dorée afin de reprendre du large et laissa la barque glisser doucement dans le courant jusqu’à ce que l’on eût dépassé les deux barges d’escorte, tout aussi silencieuses d’ailleurs que la gondole et encore plus obscures. Puis, reprenant ses rames, il alla toucher terre près du point d’amarrage de

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