Le Troisième Reich, T1
Gœring
pour en discuter avec lui. » Hitler promit une réponse écrite à la
communication britannique pour le lendemain mardi 29 août.
« La conversation a été conduite, précisa Henderson à Halifax,
dans une atmosphère parfaitement amicale, en dépit d'une fermeté absolue des
deux côtés. »
La raison de cette mansuétude, Henderson, malgré toute
l'expérience personnelle qu'il avait de son hôte, ne la comprit pas pleinement.
Le Führer était toujours décidé à entrer en guerre contre la Pologne au cours
du week-end, mais il espérait encore, en dépit des affirmations du gouvernement
britannique et de Henderson, pouvoir maintenir l'Angleterre en dehors du
conflit.
Manifestement, Hitler, qu'encourageait l'obséquieux et ignorant
Ribbentrop, ne pouvait tout simplement se résoudre à croire, malgré tous ses
dires, à la sincérité de la Grande-Bretagne.
Le lendemain, Henderson ajouta un post-scriptum à son long
télégramme.
Hitler affirma avec insistance qu'il ne bluffait pas et que
le monde commettrait une grave erreur s'il le croyait. Je répondis que j'étais
pleinement conscient du fait, et que, de notre côté, nous ne bluffions pas non
plus. Hitler déclara qu'il s'en rendait parfaitement compte (47).
Il le disait, mais était-ce vrai? Dans sa réponse du 29 août, en
effet, il tenta délibérément de manœuvrer le gouvernement britannique d'une
façon qui, pensait-il, lui permettrait d'emporter ses achats et de garder son
argent.
La réponse britannique et les premières réactions qu'elle
suscita chez Hitler donnèrent naissance à Berlin à une flambée d'optimisme. En
particulier dans le camp de Gœring, où l'ineffable Dahlerus passait désormais
le plus clair de son temps. Le 29 août, à une heure du matin, il reçut un coup
de téléphone émanant d'un aide de camp du feld-maréchal, qui l'appelait de la
Chancellerie, où Hitler, Ribbentrop et Gœring avaient étudié la note
britannique après le départ de Henderson. Dahlerus apprit ainsi de son ami
allemand que la réponse britannique était très satisfaisante et qu'il y avait
tout lieu d'espérer que la menace de guerre était écartée ».
Dahlerus téléphona dans la matinée cette bonne nouvelle au Foreign Office. « Hitler et Gœring, annonça-t-il à Halifax,
considèrent qu'il existe désormais, nettement, une possibilité de règlement
pacifique. » A dix heures cinquante, il alla voir Gœring qui l'accueillit avec
effusion, lui serra les mains avec enthousiasme en s'exclamant : « C'est la
paix! La paix est certaine! » Fortifié par d'aussi joyeuses assurances, le «
courrier » suédois se rendit immédiatement à l'ambassade de Grande-Bretagne
pour communiquer la nouvelle à Henderson, qu'il n'avait pas encore rencontré
personnellement.
Selon la dépêche où l'ambassadeur décrivit leur entretien,
Dahlerus lui rapporta que les Allemands étaient fortement optimistes. Ils
avaient « donné leur accord » au « point essentiel de la réponse britannique ».
Hitler, précisa Dahlerus, ne réclamait « que » Dantzig et le Corridor — et pas
même la totalité du Corridor, mais seulement un étroit couloir le long de la
voie du chemin de fer menant à Dantzig. En fait, rapporta Dahlerus, le Führer était tout disposé à se montrer « très raisonnable ». Il
était prêt à faire des concessions pour s'entendre avec les Polonais (48) ».
Sir Neville Henderson, dont les yeux commençaient enfin à s'entrouvrir,
n'en était pas aussi certain. Il déclara à son visiteur, relate ce dernier,
qu'on ne pouvait croire un mot de ce que disait Hitler, pas plus que de ce que
disait l'ami de Dahlerus, Hermann Gœring, lequel avait
menti à l'ambassadeur « des quantités de fois ». Hitler, selon Henderson,
jouait un jeu malhonnête et cruel.
Mais le Suédois, désormais au cœur même des transactions, ne se
laissa pas persuader — son réveil devait être encore plus tardif que celui de
Henderson. Anxieux d'empêcher que l'inexplicable pessimisme de l'ambassadeur ne
contrecarrât ses propres efforts, il retéléphona au Foreign Office à dix-neuf
heures dix pour faire prévenir Halifax que la réponse allemande « ne
soulèverait pas de difficultés ». Mais, conseillait-il, le gouvernement
britannique devrait recommander aux Polonais de « bien se conduire (49) ».
Cinq minutes plus tard, à dix-neuf heures quinze, Henderson
arrivait à la Chancellerie pour recevoir du Führer la véritable réponse
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