Le Troisième Reich, T1
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».
Quelle était donc cette position britannique que Dahlerus devait
exposer à Hitler ? Une certaine confusion règne à ce sujet.
Selon les notes sommaires de Halifax sur ses instructions
verbales à Dahlerus, elle se ramenait aux trois points suivants :
I. Assurance solennelle du désir de bonne entente entre A
et G B. (Les initiales sont de Halifax.) Pas un membre du Gvt. d'un avis
différent. II. G B. se doit d'honorer ses obligations envers la Pologne. III.
Règlement pacifique des différends germano-polonais (41).
Selon Dahlerus, la réponse britannique officieuse qui lui fut
confiée était plus compréhensive.
Naturellement, le point 6, l'offre de défendre l'Empire
britannique, était repoussé. Le cabinet britannique se refusait également à
toute discussion sur les colonies tant que l'Allemagne mobiliserait. Concernant
les frontières polonaises, il exigeait qu'elles soient garanties par les cinq
grandes puissances. Concernant le Corridor, il proposait l'engagement immédiat
de négociations avec la Pologne. Quant au premier point (des propositions
d'Hitler), la Grande-Bretagne était en principe désireuse de conclure un accord
avec l'Allemagne (42).
Dahlerus reprit l'avion pour Berlin le dimanche soir et vit
Gœring peu avant minuit. Le feld-maréchal ne jugea pas la réponse britannique «
très favorable ». Mais, après avoir eu, à minuit, un entretien avec Hitler, il
appela Dahlerus à son hôtel à une heure du matin pour lui dire que le
chancelier « adoptait la position anglaise », à condition que la version
officielle qu'emporterait Henderson le lundi soir y correspondît.
Gœring fut enchanté et Dahlerus encore plus. A deux heures du
matin, le Suédois réveilla Sir George Ogilvie Forbes, conseiller à l'ambassade
de Grande-Bretagne, pour lui communiquer ces bonnes nouvelles. Et aussi — tel
était devenu, à ses yeux du moins, son rôle — pour indiquer au gouvernement
britannique le sens qu'il devrait donner à sa réponse officielle. Cette note,
dont Henderson serait porteur dans la soirée, devrait, recommandait-il,
stipuler que la Grande-Bretagne s'engageait à persuader la Pologne d'ouvrir
immédiatement des négociations directes avec l'Allemagne.
Dahlerus (lit-on dans une dépêche de Forbes en date du 28
août, vient de téléphoner du bureau de Gœring les suggestions suivantes) qu'il
considère comme d'une extrême importance.
1. La réponse britannique à Hitler ne devra contenir aucune
référence au plan Roosevelt [224] .
2. Hitler craint que les Polonais ne tentent d'éviter les
négociations. La réponse doit donc établir nettement qu'il a été fortement
conseillé aux Polonais d'entrer immédiatement en contact avec l'Allemagne en
vue de pourparlers [225] (43).
Pendant toute la journée, le Suédois, qui avait repris espoir,
ne se contenta pas seulement d'accabler Forbes de ses conseils qui furent
dûment télégraphiés à Londres, mais il téléphona personnellement au Foreign
Office un message contenant de nouvelles suggestions destinées à Halifax.
A ce moment critique de l'histoire du monde, ce diplomate
amateur était, en fait, devenu le pivot entre Berlin et Londres. A quatorze
heures, le 28 août, Halifax, qui avait été mis au courant du conseil pressant
du Suédois, à la fois par l'ambassade de Berlin et par le coup de téléphone de
Dahlerus au Foreign Office, télégraphia à Sir Howard Kennard, ambassadeur de
Grande-Bretagne à Varsovie. Le diplomate alla trouver « immédiatement » le
ministre des Affaires étrangères, M. Beck, afin de lui demander qu'il autorisât
le gouvernement britannique à prévenir Hitler que « la Pologne (était) prête à
ouvrir immédiatement une discussion directe avec l'Allemagne ».
Le secrétaire au Foreign Office était pressé. Il voulait inclure
cette autorisation dans la réponse officielle à Hitler qu'Henderson devait
emporter le soir même à Berlin. Il recommanda donc à son ambassadeur de
téléphoner la réponse de Beck. A la fin de l'après-midi, Beck accorda
l'autorisation demandée, qui fut hâtivement insérée dans la note britannique
(44).
Henderson arriva à Berlin, muni de la réponse, dans la soirée du
28 août. Après avoir été reçu à la Chancellerie par une garde d'honneur qui
présenta les armes et fit retentir ses tambours (cérémonial diplomatique que
les Allemands tinrent à observer jusqu'à la dernière minute), il fut conduit en
présence d'Hitler, auquel il
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