Le Troisième Reich, T1
de
vingt-quatre heures avant, fut effacé d'un grand coup de pinceau. A vrai dire,
dans la longue déclaration où il expliqua au peuple allemand comment son
gouvernement avait épuisé tous les moyens diplomatiques de sauvegarder la paix,
le chancelier, sûrement aidé par Gœbbels, montra qu'il n'avait rien perdu de sa
maîtrise dans l'art du trompe-l’œil.
Dans sa réponse du 29 août 1939 (à la proposition de médiation
du gouvernement britannique), le gouvernement allemand se déclarait prêt …
…malgré son scepticisme quant à la volonté du gouvernement
polonais au sujet d'une entente générale, mais dans l'intérêt de la paix, à accepter
la médiation anglaise et sa suggestion. Le gouvernement allemand, tenant compte
de toutes les circonstances actuelles, a jugé nécessaire de faire remarquer
dans sa note que, pour éviter une catastrophe, il fallait, en tout état de
cause, agir vite et sans retard.
Dans ce sens, il s'est déclaré prêt à recevoir jusqu'au 30
août au soir un émissaire du gouvernement polonais, à condition que cet
émissaire soit vraiment muni de pouvoirs l'habilitant non pas seulement à
discuter mais aussi à mener des négociations et à les conclure.
Au lieu d'une déclaration sur l'arrivée d'une personnalité
polonaise, autorisée, le gouvernement du Reich, en réponse aux dispositions
qu'il avait manifestées en vue d'un accord, a reçu tout d'abord la nouvelle de
la mobilisation polonaise...
On ne peut pas exiger du gouvernement allemand de confirmer
toujours son accord en vue de l'ouverture de tels pourparlers et de se tenir
prêt dans l'attente, tandis que, du côté polonais, on n'entend que des
déclarations qui ne veulent rien dire et des échappatoires vides de sens.
Il ressort d'une démarche faite entre-temps par
l'ambassadeur de Pologne que celui-ci non plus n'est pas autorisé à discuter,
ni même à négocier.
Ainsi le Führer et le gouvernement du Reich ont attendu
vainement pendant deux jours l'arrivée d'un plénipotentiaire polonais. Dans ces
conditions, le gouvernement allemand considère que, cette fois, ses
propositions sont pratiquement repoussées, bien qu'il estime que celles-ci,
dans la forme où elles ont été portées à la connaissance du gouvernement
anglais, aient été loyales et exécutables.
Pour être efficace, la bonne propagande, Hitler et Gœbbels le
savaient d'expérience, ne doit pas simplement se payer de mots. Il lui faut des
actes, fussent-ils montés de toutes pièces. Ayant convaincu le peuple allemand
(et l'auteur peut s'en porter personnellement garant) que les Polonais avaient
rejeté la généreuse offre de paix du Führer, il ne restait
plus qu'à mijoter un fait qui « prouverait » que ce n'était pas l'Allemagne
mais la Pologne qui avait attaqué la première.
On se souvient que les Allemands avaient soigneusement préparé
cette entreprise douteuse sous la direction d'Hitler. Depuis six jours, Alfred
Naujocks, le spadassin intellectuel, attendait à Gleiwitz, près de la frontière
polonaise, l'ordre d'exécuter un simulacre de coup de main polonais contre la
station de radio allemande qui s'y trouvait. Le plan avait été révisé.
C'étaient des S.S. revêtus d'uniformes polonais qui devaient
exécuter le tir et des internés des camps de concentration, préalablement
drogués, qui devaient rester pour morts sur le terrain et figurer les «
victimes » — cette savoureuse partie de l'opération portait, comme nous l'avons
déjà vu, la dénomination éloquente de « Conserves en boîte ». Plusieurs de ces
simulacres d'attaques polonaises étaient prévus, mais la principale devait
s'effectuer contre la station de radio Gleiwitz.
A midi, le 31 août (expliqua Naujocks aux juges de
Nuremberg), je reçus de Heydrich le mot convenu pour l'attaque qui devait
s'effectuer dans la soirée : « Pour l'attaque en question, contacter Mueller,
Opération « Conserves en boîte ». Ce que je fis. Je demandai à Mueller de me
livrer l'homme auprès de la station de radio. Après l'avoir reçu, je le fis
allonger à l'entrée de la station. Il était vivant mais complètement
inconscient. Je pouvais me rendre compte qu'il vivait non à son regard mais à
son souffle. Je ne vis pas de traces de balles mais il avait le visage maculé
de sang. Il était en vêtements civils.
Nous nous emparâmes de la station de radio, comme nous en
avions l'ordre, et nous diffusâmes une allocution de trois ou quatre minutes
sur un
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