Le Troisième Reich, T2
Kluge, qui se trouvait en congé de maladie depuis quelques mois à la
suite d'un accident d'auto. Kluge fut aussitôt nommé en remplacement de
Rundstedt. Le général Blumentritt a raconté cette conversation téléphonique à
Wilmot (The struggle for Europe, p. 347) et à Liddell Hart (The German Generals
Talk, p. 205).
[258] Speidel cite l'écrivain Ernst Junger, dont les ouvrages avaient été très
populaires dans l'Allemagne nazie, mais qui s'était détourné du régime et
s'était joint de Paris au complot : « Le coup qui frappa Rommel sur la route de
Livarot, le 17 juillet, priva notre projet du seul homme assez fort pour faire
face simultanément à la guerre et à la guerre civile. » (Speidel, Invasion 1944, p. 119.)
[259] Ceci fut révélé lors de l'affaire de la « Rote Kapelle », en 1942, Quand
l'Abwehr découvrit qu'un grand nombre d'Allemands, occupant des postes
stratégiques et dont certains appartenaient à de vieilles familles très
connues, avaient organisé un réseau d'espionnage étendu pour le compte des
Russes. A un moment donné, ils avaient transmis des renseignements à Moscou à
l'aide de près de 100 postes émetteurs clandestins installés en Allemagne et
dans les territoires occupés de l'Ouest. Le chef de la « Rote Kapelle »
(Orchestre Rouge) était Harold Schulze-Boysen, petit-fils du grand amiral von
Tirpitz, un des chefs de la « génération perdue » de l'entre-deux-guerres,
personnage pittoresque fort connu à Berlin, où son chandail noir, son épaisse
crinière blonde et sa passion pour la poésie et la politique révolutionnaires
attiraient l'attention. A cette époque, il rejetait à la fois le nazisme et le
communisme, bien qu'il se considérât comme un homme de gauche. Au début de la
guerre, il parvint, grâce à sa mère, à entrer dans la Luftwaffe avec le grade
de lieutenant et réussit à se faufiler dans le service de « recherches » de
Gœring, le Forschungsamt, qui, ainsi que nous l'avons vu dans le chapitre
consacré à l'Anschluss, était spécialisé dans la surveillance des
communications téléphoniques. Bientôt, il organisa un vaste réseau d'espionnage
pour Moscou, à l'aide de complices sûrs dont il disposait dans chaque ministère
et bureau militaire de Berlin. Parmi ceux-ci se trouvaient Arvid Harnack, neveu
d'un théologien connu, un brillant économiste du ministère de l'Économie, marié
à une Américaine, Mildred Fish, qu'il avait connue à l'Université du Wisconsin,
Franz Scheliha, des Affaires étrangères, Horst Heilmann, du ministère de la
Propagande, et la comtesse Erika von Brockdorff, du ministère du Travail.
Deux agents soviétiques qui furent parachutés en Allemagne, où
ils furent appréhendés, dénoncèrent la « Rote Kapelle », et un grand nombre
d'arrestations suivirent.
Sur les 65 dirigeants accusés de trahison, 50 furent condamnés à
mort, dont Schulze-Boysen et Harnack. Mildred Harnack et la comtesse von
Brockdorff s'en tirèrent avec des peines de prison, mais Hitler insista pour
qu'elles fussent exécutées — et elles le furent. Pour impressionner les
traîtres éventuels, le Führer ordonna qu'on les pendît; mais il n'y avait pas
de gibet à Berlin, où le mode d'exécution traditionnel était la décapitation à
la hache; aussi les victimes furent-elles simplement pendues à l'aide d'une
corde attachée à un crochet de boucherie (emprunté à un abattoir). A dater de
ce jour, cette méthode de pendaison fut adoptée pour bien montrer qu'une mort
cruelle attendait ceux qui oseraient défier le Führer.
[260] Tous les quatre furent exécutés : Leber, Reichwein, Jacob et Säfkow.
[261] Il y a désaccord parmi les historiens sur le point de savoir si Stauffenberg
partit pour Rastenburg ou pour l'Obersalzberg. Les écrivains allemands qui font
le plus autorité en cette matière. Eberhard Zeller et le professeur Gerhard
Ritter, donnent des récits contradictoires. Zeller croit qu'Hitler était encore
à Berchtesgaden, alors que Ritter est sûr que le Führer était rentré à
Rastenburg. Malheureusement l'agenda du Führer, qui avait jusqu'à ce point
servi de guide infaillible à l'auteur, ne fut pas retrouvé intact et ne couvre
pas cette période. Mais les témoignages les plus sûrs, y compris un rapport sur
les mouvements de Stauffenberg rédigé au quartier général du Führer le 22
juillet, indiquent d'une manière assez concluante que, le 15 juillet, Hitler se
trouvait à Rastenburg et
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