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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Boris Thiolay
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professionnelle pour adultes handicapés situé à deux kilomètres du bourg, en pleine nature. Elle y avait enseigné la comptabilité. Mais elle était décédée depuis des années. L’homme a vérifié sur le registre d’état civil. « Le 18 octobre 1993 », a-t-il dit dans le combiné. Je n’ai pas cherché à en savoir plus.
    Combien d’enfants du Lebensborn ont essuyé ce désaveu maternel, le déni de leur venue au monde ? La réponse est enfouie dans les chemises cartonnées de couleur bleue.
    Chaque dossier ouvert dans la salle de lecture de Bad Arolsen révélait une nouvelle histoire, livrait un détail supplémentaire sur l’évacuation des Lebensborn , sur la difficulté d’identifier les enfants en 1945. Les feuillets dactylographiés égrenaient d’autres enquêtes, ponctuées de réponses en attente, de fausses pistes écartées. Ce suspens entretenu à des décennies de distance avait quelque chose d’insoutenable. Il était tentant de se précipiter sur les derniers documents, les plus récents, mais, souvent, leur chronologie avait été bouleversée. J’avais devant moi le cas de trois petites filles nées à Lamorlaye. Deux d’entre elles se trouvaient dans le convoi d’enfants arrivé en gare de Commercy en août 1946. Elles n’avaient donc pas été rendues à leur famille. Tout d’abord, Édith de V., née le 11 avril 1944. Un commentaire : « Toutes informations détruites ». Je ne suis pas parvenu à en obtenir davantage par la suite. Ensuite, Ingrid de Fouw, du 31 juillet 1944. Idem, aucune indication de ses origines. Mais je savais qu’Ingrid, rebaptisée Irène par l’Assistance publique, avait été placée chez une nourrice qui l’avait finalement adoptée, dans la Meuse. Elle avait témoigné de cela en 1975 dans Au nom de la race , le premier livre sur le Lebensborn paru en France. Cinq ans auparavant, en 1970, elle avait écrit à la Croix-Rouge, espérant trouver trace de son passé. Elle y soulignait l’unique indice que lui avait soufflé un jour un employé de l’Assistance publique : « Ma famille a été faite prisonnière dans les camps de concentration en Allemagne où je suis née également durant la guerre. Je suis la seule rescapée et je ne sais même pas qui sont mes parents… » C’est certainement le fait que le couvent d’Indersdorf soit situé dans les environs de Dachau qui avait fait naître cette confusion sinistre. Irène, croyant être la fille de résistants déportés, avait appris par retour de courrier qu’elle était née dans un Lebensborn . J’ai su, plusieurs mois après, en téléphonant à son fils, qu’elle n’avait jamais retrouvé ses parents. Toute sa vie, de rupture avec sa mère adoptive en divorce précoce, elle avait traîné cette blessure originelle. Elle a connu une fin tragique, en 2007, à Bordeaux.
    La troisième petite fille de Lamorlaye, Helga M., avait eu plus de chance, si l’on peut dire. Sa mère, Mariette, de nationalité belge et originaire de Gand, avait accouché le 20 juin 1944 au Lebensborn Westwald , en France, à 250 kilomètres de chez elle. Probablement pour des raisons de discrétion : une femme belge, célibataire, enceinte d’un soldat allemand ou d’un SS, n’était pas bien vue. L’enfant avait été emmenée au début du mois d’août, lors de l’évacuation de la maternité vers l’Allemagne. Mariette l’avait-elle suivie dans un premier temps ? Elle avait en tout cas fini par en être séparée, puisqu’elle s’était démenée, après la guerre, pour la retrouver.
    Au printemps 1946, elle reçut du Commissariat belge au rapatriement les informations suivantes : « Notre officier de liaison en Allemagne nous fait savoir que votre enfant Helga se trouve en ce moment au  Children center de l’UNRRA, situé à Indersdorf, près de Dachau. Elle sera rapatriée par la voie la plus sûre et dès que possible. » Au bout de quatre mois, aucune nouvelle. Madame M. avait alors écrit à Indersdorf, en suppliant qu’on lui rende sa fille : « Cette incertitude concernant ma petite fille que je vis pour la dernière fois quand elle avait cinq mois me rend malade. Oui, je sais, vous me répondrez que je peux être tranquille quant aux soins qu’on lui donne, que j’ai la certitude qu’elle est en vie… Mais où un enfant peut-il être mieux qu’au sein de sa famille ? » Si la petite fille n’avait pas encore été rapatriée, c’est parce que, comme

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