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Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS

Titel: Lebensborn - la fabrique des enfants parfaits: Ces Français qui sont nés dans une maternité SS Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Boris Thiolay
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Hadamar. C’est une petite ville coquette, d’architecture baroque, à mi-chemin entre Francfort et Bonn. La résidence du prince de Nassau-Hadamar, l’ancienne mairie du XVII e  siècle et ses deux ponts de pierre remarquablement préservés lui confèrent un charme désuet. Mais ce n’est pas pour son patrimoine que la ville est restée dans les mémoires. Au début de l’année 1941, la clinique psychiatrique, perchée sur une hauteur, devint l’un des six centres dédiés au programme T4 lancé par le régime nazi. Cette campagne d’euthanasie – dite aussi de « mort miséricordieuse » – était un massacre déguisé. À Hadamar, entre janvier et août 1941, plus de 10 000 personnes handicapées ou déficientes mentales furent gazées. De faux certificats de décès, prétextant une maladie incurable, étaient adressés aux familles. Ensuite, ce fut le tour de près de 5 000 « demi-juifs », de travailleurs forcés affaiblis par la tuberculose et de soldats traumatisés par les combats. Les malheureux furent assassinés par injection, ou bien moururent de faim dans les dortoirs de l’hôpital 4 .
    L’hôpital d’Hadamar est toujours en service. Depuis 1983, l’un des bâtiments abrite un mémorial que viennent visiter les élèves de la région. Le professeur Georges Lilienthal en est le conservateur. À mon arrivée, il improvise une courte visite. À la cave, quelques pièces ont été conservées en l’état. Une chambre à gaz, maquillée en salle de douche : le tuyau d’arrivée d’eau, les murs et le sol carrelés, la bouche d’écoulement, le décor faisait illusion jusqu’à la libération des vapeurs mortelles de monoxyde de carbone. Dans la pièce voisine, sous une lucarne, se trouve une table de béton, aux bords relevés, de la taille d’un corps humain. C’est une table de dissection. Les bourreaux pratiquaient des expériences sur les cadavres. Enfin, collée au mur de la troisième salle, une photographie grandeur nature reproduit la gueule de l’ancien four crématoire, encastré dans la brique. En 1941, une épaisse colonne de fumée noire s’élevait continuellement dans le ciel d’Hadamar.
    Le bureau du professeur Lilienthal se situe juste au-dessus de ces vestiges. Étrange endroit pour un historien. Cependant, la pièce est cernée de dossiers, de livres, l’ordinateur disparaît derrière des piles de papiers ; l’environnement classique du chercheur. Georg Lilienthal, la soixantaine, cheveux grisonnants et moustache fournie, est chaleureux. Je lui demande ce qu’il l’a amené à travailler sur ce sujet. Pendant son adolescence, dans les années 1960 à Wiesbaden, il avait entendu parler de la maternité SS qui avait fonctionné dans la ville pendant la guerre. Des années plus tard, à l’université de Mayence, un professeur lui avait demandé de préparer un exposé sur le Lebensborn . À l’époque, cette question était totalement oubliée.
    Devenu spécialiste de l’histoire de la médecine nazie et de l’eugénisme, il enseigne maintenant depuis plus de trente ans dans cette même université. Durant notre entretien, il revient à plusieurs reprises sur le caractère extrêmement secret du Lebensborn et de sa finalité. Hormis les premières années, l’organisation ne faisait pas de publicité. Les gens n’en entendaient parler que par le bouche-à-oreille. Les maternités et les crèches étaient généralement établies à l’écart des villes et des villages. Bien sûr, la présence d’inconnues, que l’on voyait parfois se promener avec un landau, suscitait la curiosité des riverains. Les allées et venues de ces femmes accompagnées d’officiels SS alimentaient toutes sortes de rumeurs et de fantasmes. Mais ce qui se déroulait à l’intérieur de ces grandes demeures gardées en permanence restait un mystère. Dans chaque établissement, un service de déclaration de grossesse permettait aux futures mères de se faire enregistrer, leur évitant ainsi tout contact avec l’état civil et les services sociaux locaux. Outre la confidentialité entretenue sur le nom du géniteur, les femmes célibataires étaient incitées à faire de fausses déclarations sur leur adresse et leur statut familial. Elles pouvaient être enregistrées en tant que « divorcées » ou « veuves », pour brouiller davantage les pistes. Dans certains cas, le courrier entre l’organisation et les mères circulait par l’intermédiaire d’adresses

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