L'énigme de l'exode
huitième CD contenait un cours d’anatomie montrant comment distinguer les travailleurs manuels des riches oisifs d’après l’épaisseur de leurs os et la courbure de leur colonne vertébrale.
Le portable de Gaëlle avait sonné. Elle avait regardé le numéro et pivoté sur sa chaise pour tourner le dos à Knox. Puis elle s’était engagée avec embarras dans une conversation à laquelle elle avait mis fin rapidement en promettant de rappeler plus tard.
— C’était qui ? avait demandé Knox.
— Personne.
— Tu devrais peut-être en parler à ton opérateur, si tu continues à recevoir des appels de personnes qui n’existent pas.
— C’était Fatima, avait avoué Gaëlle en soupirant.
— Fatima ?
Curieusement, Knox en avait conçu une certaine jalousie. Fatima était son amie et il lui avait présenté Gaëlle à peine une semaine auparavant.
— Qu’est-ce qu’elle voulait ? avait-il demandé.
— Je suppose qu’elle a appris que le chantier de Siwa avait été repoussé.
— Tu supposes ?
— D’accord, elle est au courant.
— Et elle t’a appelé pour compatir ?
— Elle est très intéressée par mon logiciel de traitement d’images, tu te souviens ?
Le onzième CD inventoriait une série d’artefacts islamiques et le douzième, diverses pièces en or et en argent.
— Elle veut que tu ailles travailler avec elle ?
— Siwa, ce n’est pas pour maintenant, de toute façon. Et je déteste être payée à ne rien faire. J’ai horreur d’être un boulet.
— Tu n’es pas un boulet. Comment peux-tu penser une chose pareille !
— C’est le sentiment que j’ai.
Le treizième CD recensait des peintures tombales de l’ère prédynastique. Knox inséra le quatorzième et lança un diaporama. Il avait déjà vu la moitié des images lorsqu’il eut l’impression d’avoir raté quelque chose. Il revint en arrière et découvrit, en haut à droite de l’écran, la sœur jumelle de la coupe qu’il avait vue tout à l’heure, posée à l’envers. Même forme, même couleur, même texture, même glacis. Mais aucune description, uniquement un numéro de référence.
Knox alla trouver Omar et lui indiqua le numéro de référence. Le directeur sortit un classeur de l’armoire à archives et en tourna les pages en suivant du doigt les entrées jusqu’à ce qu’il tombe sur la bonne. Perplexe, il fronça les sourcils.
— Ça ne peut pas être ça... Ce n’est même pas une coupe.
— Qu’est-ce que c’est ? demanda Knox.
— Un couvercle. Le couvercle d’une jarre.
C’était vrai. Maintenant qu’Omar le disait, c’était évident. Mais Knox n’était pas plus avancé. L’Égypte avait été le grenier du monde antique. De nombreuses marchandises avaient été acheminées par les divers ports d’Alexandrie. La fabrication de jarres pour le stockage et le transport avait donc été une industrie florissante.
— Je me suis trompé, admit-il.
Omar ne l’écoutait que d’une oreille.
— Ce couvercle ne vient pas d’ici, continua-t-il. Ni même d’Égypte.
— D’où vient-il, alors ?
Omar regarda Knox d’un air suspicieux, comme s’il craignait d’être victime d’une mauvaise plaisanterie.
— De Qumrân. C’est dans une jarre de ce genre qu’on a trouvé les rouleaux de la mer Morte.
Chapitre 2
I
Gare d’Assiout, Moyenne-Égypte
Gaëlle Bonnard commençait à regretter d’être entrée dans la gare pour aller accueillir Charles Stafford et son assistante. En général, elle aimait la foule, l’animation et le contact, surtout en Moyenne-Égypte, où les gens, chaleureux et expansifs, n’étaient pas encore aigris par la présence excessive des touristes. Mais la tension était de plus en plus palpable depuis quelques semaines. Une manifestation avait même lieu en ville cet après-midi-là, ce qui expliquait sans doute pourquoi seuls trois hommes des Forces centrales de sécurité se trouvaient sur le quai, habituellement criblé d’uniformes. Pour couronner le tout, un train avait été annulé pour défaillance technique. Il y avait donc deux fois plus de passagers que d’habitude, prêts à s’engouffrer dans le suivant et à se battre pour les places assises.
Les rails se mirent à vibrer. Les bestioles prirent la fuite. La foule avança. Le vieux train apparut en brinquebalant, toutes fenêtres ouvertes. Déjà les portes s’écartaient pour déverser un flot de passagers, chargés de bagages et pressés de se frayer un
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