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L'énigme des blancs manteaux

Titel: L'énigme des blancs manteaux Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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révélait toute l'importance. Plus il y réfléchissait, plus il était convaincu que le nœud de l'énigme se trouvait là. Mais le risque était grand d'attirer l'attention sur cette recherche. Dans l'ombre, grouillaient Mauval et son commanditaire et d'autres encore. Des ouvertures avaient sans doute été faites à des agents des puissances en guerre. Paris était pleind'espions anglais, prussiens et même autrichiens, les alliés de la France étant toujours avides de moyens de pression susceptibles de renforcer l'alliance et de peser sur les opérations.
    Il restait aussi à retrouver Marie Lardin dont le rôle exact échappait au jeune homme. Il ne croyait pas trop à cette soudaine et providentielle vocation monastique, et il éprouvait de la pitié pour cette jeune fille, presque une enfant encore. Il se souvint de leur dernière rencontre nocturne dans l'escalier des Lardin. Le visage d'Isabelle se substitua à celui de Marie. Avait-il lu la lettre de Guérande comme il convenait ? Le cœur, il le savait déjà, ne faisait pas toujours bon ménage avec le style. Pourquoi les êtres éprouvaient-ils tant de difficultés à exprimer leurs sentiments ? Il se souvint d'une phrase de Pascal apprise au collège : « Les mots diversement rangés font un divers sens et les sens diversement rangés font différents effets 72 . » Ce qui lui avait paru, il y a peu, artificieux devenait soudain touchant de maladresse. Il préféra s'efforcer de chasser cette idée. Rien ne devait le distraire de sa tâche.
    Bourdeau, le voyant si empli de sa réflexion et les yeux vides, s'était abstenu de le troubler. Mais déjà le bruit de leur voiture résonnait sous la voûte du Châtelet. Nicolas entraîna l'inspecteur dans le bureau de permanence. Le commissaire Desnoyers, du quartier Saint-Eustache, y consultait un registre. Il fallut attendre qu'il eût achevé.
    — Nous voici à la croisée des chemins, dit Nicolas, il nous faut choisir la direction à prendre.
    — Vous croyez que Saint-Louis a été tué ?
    — Je ne crois rien. Je constate que la montre, que lui avait offerte son maître, était aux mains de Rapace et de Bricart. D'autre part, si les débristrouvés à Montfaucon ne sont pas ceux du commissaire Lardin, à qui appartiennent-ils ? Pourquoi pas à Saint-Louis ? Il nous faut réfléchir à partir de ce que nous savons et des éléments dont nous disposons. Que les restes soient ceux de son cocher n'innocente pas forcément Semacgus, bien au contraire. Rappelez-vous les accusations de Descart. Pour Lardin, l'accusation de sa femme est formelle. Je crois que la procédure suivra son cours, et nous n'échapperons ni pour elle ni pour Semacgus au recours à la question préalable. Il y a trois morts en cause.
    — Et l'assassinat de Descart ?
    — Même chose. Si le moment de la mort de Lardin peut être précisé, celui-là au moins pourra être mis hors de cause, ce dont il n'a que faire vu son état. Vous avez fait chercher Sanson ?
    Bourdeau acquiesça.
    — Alors nous pourrons innocenter Lardin qui avait tout motif, lui aussi, de supprimer le cousin de sa femme. Quant à Semacgus et à Louise, rien ne permet d'écarter leur culpabilité. Reste à déterminer les raisons qui ont poussé le mystérieux assassin à mettre à sac la maison du docteur à Vaugirard.
    — Et Mauval ? Vous oubliez toujours Mauval...
    — Je l'oublie d'autant moins qu'il est mêlé à tout, je le répète.
    — Il paraît jouir d'une impunité extravagante.
    — Aussi bien, ne pourrons-nous le frapper qu'à coup sûr. Il ne faut jamais rater un serpent, on ne retrouve pas l'occasion de le détruire. Pour le moment, je dois réfléchir et rendre compte à M. de Sartine des derniers événements. Vous, Bourdeau, pressez Sanson et faites-moi rapport dès que possible. Vérifiez que Louise Lardin est maintenue ausecret et que son cachot est dûment gardé. Qu'on n'aille pas me la supprimer !

    Au moment où ils allaient se séparer, le père Marie apparut. Une jeune femme d'un genre « un peu raccrocheuse 73 » demandait Nicolas pour « une affaire grave et urgente ». Nicolas ordonna qu'on la fît entrer et pria Bourdeau de demeurer. Nicolas reconnut aussitôt la Satin. La cape brune dont elle était enveloppée dissimulait à peine la tenue légère fort décolletée et les fines chaussures de bal. Le fard de son visage était tombé et sa face était rougie de froid ou d'émotion. Nicolas la prit par le bras et l'invita à

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