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L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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m’envoie une centaine de lanciers sans même une miette de
pain à se partager. » Il m’avait invité dans sa tente, où il me servit un
vin pâle et aigre. « Je vous dois des excuses, Seigneur Derfel.
    — J’en
doute, Seigneur. » Pareille intimité avec un guerrier célèbre assez âgé
pour être mon grand-père me gênait.
    D’un geste de
la main, il me fit comprendre que ma modestie n’était pas de mise. « Nous
aurions dû être présents à Lugg Vale.
    — Le
combat paraissait sans espoir, Seigneur. Nous étions aux abois, vous ne l’étiez
pas.
    — Vous
gagnerez, n’est-ce pas ? » grogna-t-il. Il se retourna car un coup de
vent menaçait de faire tomber un copeau de bois de sa table couverte d’une
multitude d’autres copeaux de ce genre, chacun portant des listes d’hommes et
de rations. Il plaça un encrier dessus, puis posa à nouveau les yeux sur moi :
« J’apprends que nous allons retrouver le taureau.
    — À
Corinium », confirmai-je. À la différence de son maître Tewdric, Agricola
était un païen. Mais il n’avait pas de temps à perdre avec les dieux bretons :
seul Mithra l’intéressait.
    « Choisir
Lancelot ! « s’exclama-t-il avec aigreur. Il écouta un homme qui
donnait des ordres à ses troupes, n’entendit rien qui pût le faire sortir de sa
tente et reprit le fil de notre conversation :
    « Que
savez-vous de Lancelot ?
    — Suffisamment
pour parler contre lui.
    — Vous
offenseriez Arthur ? fit-il surpris.
    — Je n’offense
ni Arthur ni Mithra, répondis-je d’un ton revêche en me signant contre le mal.
Et Mithra est un dieu.
    — Arthur
m’en a parlé à son retour du Powys, reprit Agricola, et il m’a fait comprendre
qu’élire Lancelot scellerait l’union de la Bretagne. » Il s’arrêta, l’air
morose. « Il a insinué que je lui devais bien ma voix pour compenser notre
absence de Lugg Vale. »
    Apparemment,
Arthur ne reculait devant aucun moyen pour acheter des voix.
    « En ce
cas, votez pour lui, Seigneur, car son exclusion ne nécessite qu’une voix. Et
la mienne suffira.
    — Je ne
saurais mentir à Mithra, répliqua-t-il d’un ton tranchant, et, moi non plus, je
n’aime pas Lancelot. Il était ici il y a deux mois, pour acheter des miroirs.
    — Des
miroirs ! » Je ne pus m’empêcher de rire. Lancelot avait toujours
collectionné les miroirs et dans le palais de son père, sur les hauteurs d’Ynys
Trebes, il avait couvert les murs d’une pièce entière de miroirs romains. Ils
avaient dû tous fondre dans l’incendie du palais, lorsque les Francs avaient
investi la place. Et apparemment, Lancelot reconstituait maintenant sa collection.
    « Tewdric
lui en a vendu un magnifique en électrum, précisa Agricola. Aussi grand qu’un
bouclier et tout à fait extraordinaire. Il était si clair qu’on s’y voyait
aussi bien que dans une mare obscure par beau temps. Et il l’a payé un bon
prix. » Quoi de plus normal ? me dis-je, car les miroirs faits de cet
amalgame d’or et d’argent sont en vérité fort rares. « Des miroirs !
répéta Agricola d’un ton cinglant. Il aurait dû accomplir ses devoirs en
Silurie plutôt que d’acheter des miroirs. » Une corne retentit par deux
fois depuis la ville. Agricola reconnut le signal et attrapa son casque et son
épée. « L’Edling », grogna-t-il en m’entraînant dehors pour voir
Meurig quitter les remparts romains de Magnis. « Je campe ici pour me
tenir à l’écart de leurs prêtres », m’expliqua Agricola en regardant sa
garde d’honneur s’aligner en deux rangs.
    Le prince
Meurig avançait accompagné de quatre prêtres qui peinaient à suivre le cheval
de l’Edling. Le prince était un jeune homme. Quand je l’avais vu pour la
première fois, il n’y avait pas si longtemps, il n’était encore qu’un enfant,
mais il dissimulait sa jeunesse sous des dehors quérulents et irritables. Il
était petit, pâle et maigre et portait un mince filet de barbe brune. Il avait
la réputation d’un homme de chicane, qui trouvait goût aux arguties des
tribunaux et aux chamailleries de l’Église. Sa science était renommée : il
n’avait pas son pareil, assurait-on, pour réfuter l’hérésie pélagienne, qui
était le fléau de l’Église chrétienne en Bretagne ; il savait par cœur les
dix-huit chapitres du droit tribal des Bretons, et il pouvait réciter la généalogie
des dix royaumes bretons, en remontant jusqu’à vingt

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