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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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se passe que vous avez heureusement des amis qui veillent sur vous. Il se passe que sous quarante-huit heures au plus tard, le Louvre doit être envahi, le roi massacré, moi exilée. Il se passe que les vaillants serviteurs que je viens de vous nommer sont venus m’avertir, et qu’à mon tour je vous avertis. Maintenant, sire, recouchez-vous, si vous voulez : je vais prévenir ces amis dévoués que leur délibération est inutile et que le roi veut dormir en paix…
    – Le Louvre envahi ! Le roi massacré ! répétait Charles en passant ses mains sur son front jaune. Je rêve. C’est de la folie…
    Catherine le saisit par un bras qu’elle serra nerveusement.
    – Charles, dit-elle d’une voix sombre, ce qui est un rêve, c’est que vous vous défiez de votre mère, de votre frère, de ceux qui vous aiment et dont l’intérêt même, à défaut de leur affection, vous garantit le dévouement. Ce qui est de la folie, c’est de vous livrer pieds et poings liés à ces maudits hérétiques qui ont horreur de notre religion, qui ont juré de faire triompher leurs détestables doctrines et qui, pour en arriver à leurs fins, sont obligés de commencer par tuer le fils aîné de l’Eglise… Qu’avez-vous fait, Charles ? Vous avez comblé ces gens-là des marques de votre affection, au point que la chrétienté catholique du royaume est réduite au désespoir, au point que trois mille seigneurs catholiques. Guise en tête, ont pris la résolution de sauver la France et l’Eglise malgré vous !… Vous voilà donc pris entre ces deux forces également redoutables : les huguenots, remplis d’orgueil, audacieux, ne connaissant plus de frein et résolus à nous imposer la réforme ; les catholiques, désespérés, furieux, acculés à la révolte suprême. L’instant est grave, sire ! Si grave que je me demande si, sur le point de tout perdre, honneur et couronne, nous ne ferions pas bien de sauver tout au moins notre vie en prenant la fuite ! Votre attitude d’aujourd’hui a mis le feu aux poudres. En jurant publiquement, en pleine rue, de venger un malheureux coup d’arquebuse qui a effleuré le cher amiral, vous avez soulevé le peuple entier, que deux miracles successifs ont averti des volontés divines. Le prévôt Le Charron m’est venu dire qu’il n’est plus maître des capitaines de quartier, et que partout la foule s’assemble autour des églises. En faisant crier l’édit qui désarme les bourgeois, vous avez accrédité le bruit que vous voulez faire massacrer les Parisiens par les huguenots. En vous faisant escorter par les hérétiques, vous avez signifié aux gentilshommes catholiques qu’ils ne vous étaient plus rien, et que, sous peu, il leur faudrait céder le pas aux huguenots. Voilà ce que vous avez fait, sire ! Oh ! je sais bien, moi, que vous voulez seulement la paix, et que vous avez entrepris de vous débarrasser des huguenots en les envoyant aux Pays-Bas, et que vous demeurez le roi catholique, le fils bien-aimé de Rome ! Mais qui voudra croire une mère dont l’affection est trop connue, et qui est par conséquent suspecte de partialité ! Je vous le dis, Charles : c’est à peine s’il nous reste quelques heures pour prendre une résolution suprême ! O mon Dieu ! ajouta-t-elle tout à coup en levant les bras, éclairez le roi, et dites-lui, vous, puisqu’il se méfie de sa mère, dites-lui que l’heure est venue de mourir ou de tuer !
    – Tuer ! gronda Charles. Toujours tuer !… Qui faut-il tuer, voyons !…
    – Coligny !
    – Jamais !
    Charles se redressa, livide, hagard. Les paroles de sa mère lui donnaient le vertige. Une exhorbitante terreur s’était emparée de lui. Il jetait autour de lui des regards de fou, et sa main s’incrustait au manche de son poignard. Mais la pensée de ce procès terrible qu’il faudrait faire à l’amiral (car dans son esprit, c’était de cela qu’il s’agissait) l’idée de faire condamner à mort cet homme qui était son hôte, qu’il avait attiré à Paris, qu’il avait fini par aimer, cela lui causait une insurmontable horreur.
    Il est vrai qu’il avait quelque temps cru sa mère ; il avait admis que l’amiral conspirait contre lui.
    Mais les preuves de l’innocence du vieux chef s’étaient accumulées si nombreuses, si évidentes dans son esprit qu’il avait dû se rendre à cette évidence.
    – Vous m’aviez dit, continua-t-il, que j’aurais les preuves de la trahison de Coligny et

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