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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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l’étroite corniche que sur la terre ; un geste de trop, un mouvement à faux, et ils étaient précipités ; ils n’y prenaient pas garde… Quand ils se rejoignirent, ils regardèrent en bas et virent qu’il n’y avait plus personne dans la cour !…
    – Voilà une manière de descendre, hein, chevalier ! fit le vieux.
    – C’est plus doux qu’un escalier, monsieur !
    – Et commode, donc !
    – Encore une douzaine de rangées…
    – Et nous nous trouverons portés à terre !
    Ils riaient ; ils étaient noirs de fumée et de poussière ; leurs yeux flamboyaient ; leurs mains s’étaient ensanglantées ; leurs habits étaient en lambeaux ; ils riaient comme des fous ; ils riaient, non de la fuite des assaillants, non du sauvetage fabuleux, ils riaient sans savoir, et ils avaient des faces terribles de titans escaladant l’Olympe et jetant le défi suprême au maître des dieux !…
    Un coup d’arquebuse retentit ; la balle fit tomber le chapeau du chevalier.
    – Ce n’est pas moi qui vous salue ! hurla-t-il.
    Les arquebusades se succédaient ; les balles sifflaient autour d’eux ; de la rue, deux ou trois cents reîtres les visaient, tandis que la foule poussait ses hurlements de mort…
    Alors le vieux longea la muraille et vint surplomber sur la rue…
    – Rangez vos crânes ! vociféra-t-il.
    On vit le titan soulever dans ses bras un moellon qu’il lança à toute volée.
    – Place, monsieur ! dit le chevalier.
    Et à son tour, il s’avança, tandis que le vieux se couchait sur la crête pour le laisser passer.
    Le moellon du chevalier traça sa courbe dans l’espace, tomba, rebondit parmi les hurlements d’épouvante.
    – Je crois que j’en ai écrasé une douzaine, dit froidement le chevalier.
    – Quatre de plus que moi ! Il me faut ma revanche ! cria le vieux routier.
    En effet, pendant que son fils lançait une pierre, lui, avait descellé un autre moellon ; ce fut au tour du chevalier de se coucher sur la crête pendant que le vieux s’avançait à l’extrême bord de la muraille…
    – Pan ! Pif ! Paf ! Pan ! Huit ! Douze ! Quinze ! A toi, chevalier !
    Pendant trois minutes, l’effrayante manœuvre se poursuivit ; à coups de moellons, les deux titans déblayaient la rue comme ils avaient déblayé la cour ; la muraille baissait ; ils descendaient à mesure d’un cran ; et finalement les arquebuses se turent !… Dans la rue, il n’y avait plus personne ! Les assaillants avaient reflué à droite et à gauche de l’hôtel se culbutant, jurant, hurlant… Damville, livide, saisit sa tête à deux mains, et tandis que là-haut retentissait le rire des titans, ceux qui environnaient le maréchal virent qu’il pleurait à chaudes larmes, de rage, de honte et de fureur !…
    La muraille avait baissé de sept à huit rangées de moellons…
    Les deux titans, voyant la rue libre et l’hôtel entièrement dégagé, dirent ensemble :
    – Partons !…
    Ils sautèrent sur le toit de la loge du suisse ; du toit, ils sautèrent dans la cour ; là, ils se regardèrent un instant et ne se reconnurent pas, tant leurs faces noires et sanglantes flamboyaient d’audace et d’orgueil !…
    Les Pardaillan, enjambant cadavres et décombres, traversèrent la cour en quelques bonds, escaladèrent le perron et se jetèrent dans la grande salle d’honneur de l’hôtel de Montmorency.
    Le chevalier, qui marchait le premier, se sentit saisi par deux bras puissants, enlevé, pressé sur une large poitrine : et le maréchal de Montmorency, l’embrassant sur les deux joues, murmura en frémissant :
    – Mon fils ! Mon fils !…
    Pardaillan, alors, jeta autour de lui un regard égaré : il vit Jeanne de Piennes qui, indifférente, souriait à son rêve ; il vit François de Montmorency qui pleurait ; il vit Loïse toute droite, toute pâle, qui l’examinait d’un air de suprême gravité, comme elle eût examinée quelque chose de colossal, d’émouvant et de grandiose.
    A travers les sanglots qui maintenant soulevaient sa mâle poitrine, François de Montmorency répétait :
    – Mon fils ! Mon fils !…
    Et ce mot disait sa gratitude infinie, son admiration, sa volonté d’exprimer le sentiment le plus haut et le plus humain qui soit dans l’homme…
    – Mon fils ! Mon fils !…
    Le chevalier laissa errer du maréchal à Loïse son regard ébloui. Et le titan se sentit faible comme un enfant…
    Il balbutia :
    – Votre fils !… oh !

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