Les 186 marches
Schutzhartlagerführer confisqua cette somme et personne ne sut ce qu’il en fit.
– Dans un autre cas particulier, la station dentaire « sauta ». Les détenus de la station dentaire, qui ne travaillaient pas le dimanche, s’étaient rendus au camp à leur lieu de travail pour y faire la cuisine. Ils ne cuisinaient pas, comme dans les autres kommandos de travail, sur des feux de bois, mais possédaient plusieurs réchauds électriques et un foyer électrique. Pour des raisons que l’on ne connaît pas, le S. S. Strabscharführer Struller vint le dimanche matin à la section dentaire pour procéder à un contrôle. Il trouva un rôti de veau dans le fourneau, trois sortes de pudding comme dessert. En outre, il y avait cinquante chemises en soie, des pyjamas et autres objets. Il y avait également des billets de banque étrangers, de la monnaie étrangère, des dollars américains, un lingot d’or pesant plus d’un kilo. Les cadavres de tous les détenus furent examinés au crématoire afin d’y trouver des dents en or. L’or fut soi-disant « encaissé » officiellement. Mais, il n’y eut pas de contrôle à ce sujet, de sorte que pratiquement, une grande partie de l’or passa dans d’autres mains. On « encaissa », en un mois, environ deux kilos d’or.
– Tous les détenus ayant un certain rang, au camp, s’habillaient luxueusement. Sous ce rapport il y régnait un état tout à fait caractéristique. Le vêtement bleu-blanc, rayé, ne fut porté que dans les camps extérieurs ou par les nouveaux arrivants qui se trouvaient en quarantaine. Tous les autres détenus portaient des vêtements civils qui avaient appartenu aux décédés. Ils portaient également des chaussettes, des chemises, des chaussures civiles, etc. Seul le numéro matricule peint sur un morceau de toile blanche, était cousu sur le vêtement. Ce n’est que dans les derniers temps que l’on coupa un morceau d’étoffe des vêtements civils, c’est-à-dire un morceau du veston et du pantalon. On plaça dans cette « fenêtre » un morceau d’étoffe de couleur bleue et blanche. Cela se fit parce que plusieurs détenus avaient tenté de prendre la fuite en vêtements civils et avaient enlevé les numéros matricules. De ce fait, on ne pouvait les distinguer de la population civile. Les chemises et les costumes furent ajustés sur mesure. Les détenus de la section politique devaient porter un costume civil, des chaussures civiles, une chemise propre. On ne leur livra rien. Ils devaient voler. Souvent, je fus interpellé par les S. S., parce que mon pantalon n’était pas repassé et parce que le pli avait disparu. De même, on ne pouvait pas porter de chaussures de bois. Un jour, je reçus une paire de souliers vernis.
– Chacun des S. S. de l’état-major de la kommandantur s’est fait servir par les détenus à maintes reprises. Les détenus fabriquaient des chaussures pour les femmes et les enfants des S. S., réparaient les montres, confectionnaient des costumes et des vêtements de dames.
– Pour terminer, qu’il nous soit permis d’aborder un chapitre monstrueux : celui des derniers jours avant la débâcle. La Croix-Rouge de Genève avait préparé un grand nombre de dons de charité – environ dix mille colis – et les avait expédiés au camp de Mauthausen, au camp de Buchenwald et peut-être vers d’autres camps. Pour des raisons que nous ne connaissons pas, tous ces colis furent transportés directement par camions de la Croix-Rouge à Mauthausen. Ils étaient destinés aux détenus des nations ayant adhéré à la Croix-Rouge internationale, c’est-à-dire, pratiquement à tous les détenus, sauf les Allemands et les Russes. Ces colis contenaient des vivres et des friandises : cacao, chocolat, lait en poudre, thé indien, café, pain de fantaisie, sucre en cubes, figues, conserves de viande, cigarettes, vin, pâtes alimentaires et même des hosties et autres objets du culte. Tout cela avait une valeur de plusieurs millions.
– Il faut dire clairement que les trois cinquièmes, au moins, des colis furent détournés et que leur contenu fut détruit avant d’arriver aux mains des destinataires. Tout d’abord, les détenus occupés au déchargement des colis, volèrent ce qu’ils purent. Au début, des colis entiers furent déchirés et on en enleva ce qui avait le plus de valeur, principalement le chocolat et le vin. Le reste fut répandu sur le sol et piétiné par les autres détenus
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