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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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trentaine d’années,
portant le costume d’officier des arquebusiers, se présenta.
    « Castruccio, lui dit-il, veux-tu m’accompagner ce soir
dans une expédition dangereuse ?
    – Vous savez bien que je suis toujours prêt à risquer ma
vie pour vous.
    – Bon. Trouve-toi donc ici ce soir, à dix heures, avec tes
amis Romani et Ghiberto, avec de bonnes dagues.
    – On y sera. »
    L’officier se retira. Altieri eut un sourire. Pour la première
fois depuis des années, un peu de calme descendit dans cette âme
tourmentée par les passions. En effet, de la visite du chef de
police, une conviction lui restait : c’est que Gennaro n’était
point contre lui. C’était un point capital. Bien que le succès de
la conspiration lui parût alors assuré, même au cas où elle serait
découverte avant l’heure, un homme aussi résolu et aussi subtil que
le chef de police pouvait tout faire manquer. Pour des raisons qui
lui demeuraient inconnues, la neutralité, sinon la bienveillance de
Gennaro, lui semblait acquise. Donc Altieri triomphait : il
serait doge !
    Enfin, Roland mort, c’était en peu de temps la conquête de
Léonore. Que Léonore eût voué une fidélité farouche, inébranlable à
Candiano vivant, cela se concevait… Mais cette fidélité avait duré
huit ans. Continuerait-elle envers la mort ?…
    C’était chose improbable, inadmissible…
    La fille si fière des antiques doges serait heureuse de son
titre de dogaresse. Son orgueil serait flatté dans toutes ses
fibres.
    Léonore capitulerait par orgueil… puis l’amour
viendrait !
    Oui, depuis bien longtemps, Altieri n’avait senti de pareilles
espérances gonfler son cœur.
    Aussi, très calme, songea-t-il dès lors à organiser pour le soir
l’assassinat de Roland Candiano… Et ce fut ce terme d’assassinat
qui se présenta tout naturellement à son esprit sans même qu’il en
éprouvât une surprise.
    Il sortit de son cabinet, calme, presque souriant.
    Mais sans traverser ses antichambres, par un escalier dérobé, il
monta à l’étage supérieur où se trouvait l’appartement de Dandolo
et de sa fille. Il espérait vaguement rencontrer Léonore.
    Et s’il la rencontrait, la braver pour ainsi dire, la dompter
d’un regard de triomphe anticipé, lui faire comprendre que de
grandes choses se préparaient.
    Il ne vit ni Léonore, ni Dandolo, et redescendit dans son
cabinet, entra dans les antichambres, causa gaiement avec plusieurs
officiers.
    Jamais Altieri n’était apparu à ses fidèles et à ses courtisans
avec un visage de joie. On l’avait toujours vu sombre.
    Ce fut un étonnement chez les uns, et presque une inquiétude
chez les autres. Car les courtisans d’Altieri, semblables à tous
les courtisans, ne se réjouissaient ou ne s’inquiétaient que
d’après l’impression que leur renvoyait le visage du maître.
    Altieri avait sa cour, comme Bembo avait la sienne, comme le
doge Foscari avait encore la sienne.
    Seulement les courtisans d’Altieri portaient tous le costume
militaire. Son palais ressemblait à un corps de garde où les
soldats eussent tous été des officiers de rang.
    Dans l’après-midi, comme le soir commençait à venir, Altieri
sortit de son palais. Il était seul et s’enveloppait d’un vaste
manteau qui lui couvrait en partie le visage.
    Altieri fit de longs détours dans Venise. Et comme bientôt la
nuit allait remplacer le soir, il arriva dans un des quartiers les
plus tristes et aussi les plus mal famés de Venise.
    Que venait y chercher le capitaine général ?
    Là vivaient les marins de basse catégorie, là vivaient aussi les
filles galantes, les malheureuses que la misère poussait, alors
comme aujourd’hui, à vendre leurs baisers pour un morceau de
pain.
    Là vivaient enfin les mendiants de toute sorte, ceux qui, le
jour venu, s’en allaient chanter en s’accompagnant de la guitare,
ou ceux qui allaient exhiber sur la place publique une plaie ou une
infirmité pour attirer la pitié et gagner une pièce de monnaie.
    Mais peut-être d’autres gens que des misérables, des mendiants,
habitaient-ils ce triste quartier…
    Altieri entra dans une sombre ruelle.
    Il marcha courageusement, bien qu’il fût seul.
    Nous disons courageusement…
    En effet, dans l’ombre s’agitaient des choses confuses, des
êtres qui sans doute devaient jouer au poignard aussi facilement
qu’à la
morra,
et du fond de la nuit, des yeux luisants le
suivaient à la piste, semblables à des

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