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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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des
milliers et des milliers de moines, de pénitents, de frères de cent
confréries diverses, se faisait entendre, encore lointain, se
rapprochant insensiblement, lugubre et terrible en même temps.
    Et dominant le tout, le glas continuait de laisser tomber,
lente, funèbre, sinistre, sa note mugissante.
    Tout cela : chants funèbres, clameurs, vivats, sonnerie du
bronze pénétrait, par la baie largement ouverte, dans la salle où
Fausta recevait le Torero, la remplissait d’un bourdonnement
assourdissant.
    Mais si les nerfs du jeune homme se trouvaient mis à une assez
rude épreuve, Fausta ne paraissait nullement en être incommodée. On
eût dit qu’elle n’entendait rien de ces bruits du dehors qu’elle
laissait intentionnellement pénétrer chez elle.
    Cependant dominant la gêne que lui causaient ces rumeurs,
mettant tous ses efforts à surmonter le trouble étrange que la
beauté de Fausta avait déchaîné en lui et qu’il sentait augmenter,
le Torero dit doucement :
    – Vous avez bien voulu témoigner quelque intérêt à une
personne qui m’est chère. Permettez-moi, madame, avant toute chose,
de vous en exprimer ma gratitude.
    Et il était en effet très ému, le pauvre amoureux de la Giralda.
Jamais créature humaine ne lui avait produit un effet comparable à
celui que lui produisait Fausta. Jamais personne ne lui en avait
imposé autant.
    Fausta lisait clairement dans son esprit, et elle se montrait
intérieurement de plus en plus satisfaite. Allons, allons, la
constance en amour, chez l’homme, était décidément une bien fragile
chose. Cette petite bohémienne, à qui elle avait fait l’honneur
d’accorder quelque importance, comptait décidément bien peu. La
victoire lui paraissait maintenant certaine, et si une chose
l’étonnait, c’était d’en avoir douté un instant.
    Mais l’allusion du Torero à la Giralda lui déplut. Elle mit
quelque froideur dans la manière dont elle répondit :
    – Je ne me suis intéressée qu’à vous, sans vous connaître.
Ce que j’ai fait, je l’ai fait pour vous, uniquement pour vous. En
conséquence, vous n’avez pas à me remercier pour des tiers qui
n’existent pas pour moi.
    À son tour, le Torero fut choqué du suprême dédain avec lequel
elle parlait de celle qu’il adorait. En outre, il ne laissait pas
que d’être surpris. Une pareille attitude ne correspondait pas à
l’enthousiasme manifesté par la Giralda à l’égard de cette
princesse qu’elle déclarait si bonne. Il y avait là quelque chose
qui le déroutait.
    Dès l’instant où cette princesse Fausta paraissait vouloir
s’attaquer à l’objet de son amour, il retrouva une partie de son
sang-froid, et ce fut d’une voix plus ferme qu’il dit :
    – Cependant, ce tiers qui n’existe pas pour vous, madame,
m’a assuré que vous aviez été pleine de bonté et d’attentions à son
égard.
    – Bontés, attentions – s’il y en a eu réellement – dit
Fausta d’un ton radouci et avec un sourire, je vous répète que tout
cela s’adressait à vous seul.
    – Pourquoi, madame ? fit ingénument le Torero, puisque
vous ne me connaissiez pas. Oserai-je vous demander ce qui me vaut
l’honneur insigne d’attirer sur mon obscure personnalité
l’attention, mieux, l’intérêt d’une princesse puissante et riche
comme vous paraissez l’être, jeune et belle, d’une beauté sans
rivale ?
    Fausta laissa tomber sur lui un regard profond, empreint d’une
douceur enveloppante :
    – Une nature chevaleresque comme celle que je devine en
vous comprendra aisément le mobile auquel j’ai obéi. Si vous
appreniez, monsieur, qu’on prémédite d’assassiner lâchement une
inoffensive créature, si vous saviez que tel jour, à telle heure,
de telle manière, on meurtrira cette créature qui vous est
inconnue, que feriez-vous ?
    – Par Dieu ! madame, dit fougueusement le Torero,
j’aviserais cette créature d’avoir à se tenir sur ses gardes, et au
besoin je lui prêterais l’appui de mon bras.
    À mesure qu’il parlait, Fausta approuvait doucement de la tête.
Quand il eut terminé :
    – Eh bien ! monsieur, dit-elle, c’est là tout le
secret de l’intérêt que je vous ai porté, sans vous connaître. J’ai
appris qu’on voulait vous assassiner et j’ai cherché à vous sauver.
La jeune fille dont vous parliez il y a un instant, devant être,
inconsciemment, je me hâte de le dire, l’instrument de votre mort,
j’ai fait en sorte que

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