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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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avec assurance et, de sa
voix très calme, presque douce :
    – Eh bien, Pardaillan, ne me reconnaissez-vous
pas ?…
    – Pardaillan ? répéta le chevalier, qui paraissait
faire des efforts de mémoire prodigieux pour fixer les souvenirs
confus que ce nom évoquait dans son esprit.
    – Oui, Pardaillan… C’est toi qui es Pardaillan, reprit
d’Espinosa en le fixant.
    Pardaillan se mit à rire doucement et murmura :
    – Je ne connais pas ce nom-là.
    Et cependant il ne cessait de surveiller celui qui lui parlait
avec une inquiétude manifeste. D’Espinosa fit un pas de plus et lui
mit la main sur l’épaule. Pardaillan se mit à trembler, et
d’Espinosa, sous son étreinte, le sentit chanceler, prêt à
s’abattre. Pour la deuxième fois, il eut ce même sourire livide, et
avec une grande douceur il dit :
    – Rassure-toi, Pardaillan, je ne veux pas te faire de
mal.
    – Vrai ? fit anxieusement le fou.
    – Ne le vois-tu pas ? dit l’inquisiteur qui se fit
persuasif.
    Pardaillan le considéra longuement avec une méfiance visible et,
peu à peu, convaincu sans doute, il se rasséréna et finalement se
mit à sourire, d’un sourire sans expression. Le voyant tout à fait
rassuré, d’Espinosa reprit :
    – Il faut te souvenir. Il le faut… entends-tu ? Tu es
Pardaillan.
    – C’est un jeu ? demanda le fou d’un air amusé. Alors
je veux bien être Par… dail… lan… Et vous, qui êtes-vous ?
    – Je suis d’Espinosa, fit lentement le grand inquisiteur en
détachant chaque syllabe.
    – D’Espinosa ? répéta le fou qui cherchait à se
souvenir. D’Espinosa !… Je connais ce nom-là…
    Et tout à coup, il parut avoir trouvé.
    – Oh ! s’écria-t-il, en donnant tous les signes d’une
vive terreur. Oui, je me souviens !… D’Espinosa… c’est un
méchant… prenez garde… il va nous battre !
    – Ah ! gronda d’Espinosa, tu commences à te souvenir.
Oui, je suis d’Espinosa et toi tu es Pardaillan. Pardaillan, l’ami
de Fausta.
    – Fausta ! dit le fou sans hésitation ; j’ai
connu une femme qui s’appelait ainsi. C’est une méchante
femme !…
    – C’est bien cela, sourit d’Espinosa. La mémoire te revient
tout à fait.
    Mais le dément avait une idée fixe et la suivait sans défaillir.
Il se pencha sur d’Espinosa et, sur un ton confidentiel :
    – Vous me plaisez, dit-il. Écoutez, je vais vous dire, il
ne faut pas jouer avec d’Espinosa et Fausta. Ce sont des méchants…
Ils nous feront du mal.
    – Misérable fou ! grinça d’Espinosa, impatienté. Je te
dis que d’Espinosa c’est moi. Regarde-moi bien.
Rappelle-toi !
    Il l’avait pris par les deux mains et, penché sur lui, à deux
pouces de son visage, il fixait sur lui son regard ardent comme
s’il avait espéré lui communiquer ainsi un peu de cette
intelligence qu’il s’était acharné à abolir. Et soit pur hasard,
soit qu’il eût réussi à lui imposer sa volonté, le fou poussa un
grand cri, se dégagea d’une brusque secousse, se rencogna dans un
angle du cachot, et d’une voix qui haletait, il râla :
    – Je vous reconnais… Vous êtes d’Espinosa… Oui… Je me
souviens… C’est vous qui m’avez fait saisir… J’étais alors, il me
semble, un autre homme… Qui étais-je ?… Je ne sais plus… mais
je vois… j’étais fort, vaillant… Vous m’avez fait souffrir… Oui,
j’y suis… la faim, l’horrible faim et la soif… et cette galerie
abominable où l’on suppliciait tant de pauvres
malheureux !…
    – Enfin ! tu te souviens !
    – N’approchez pas !… hurla le fou au comble de
l’épouvante. Je vous reconnais… Que voulez-vous ? Venez-vous
pour me tuer ?… Allez-vous-en ! je ne veux pas
mourir !…
    – Cette fois tu me reconnais bien. Oui, tu l’as dit,
Pardaillan, tu étais un homme fort et vaillant, et maintenant
qu’es-tu ? Un enfant qu’un rien épouvante. Et c’est moi qui
t’ai mis dans cet état. Tu me comprends un peu, Pardaillan ;
une vague lueur d’intelligence illumine en ce moment ton cerveau.
Mais tout à l’heure la nuit se fera de nouveau en toi et tu
redeviendras ce que tu étais à l’instant : un pauvre fou.
    « Et sais-tu qui m’a donné l’idée de t’infliger les
tortures qui devaient faire sombrer ton intelligence ? Ton
amie Fausta. Oui, c’est elle qui a eu cette idée que je n’aurais
pas eue, je l’avoue. Oui, tu l’as dit : je vais te tuer.
Oh ! ne crie pas ainsi. Je

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