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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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séparation ?
    – Oh ! de grand cœur ! fit Juana, sans manifester
ni trouble ni embarras.
    Et sans plus se faire prier, elle tendit ses joues sur
lesquelles Pardaillan déposa deux baisers fraternels. Après quoi,
avec un naturel, une bonhomie admirables, il se tourna vers le
Chico et, le désignant à Juana :
    – Et celui-ci ? fit-il. N’est-il pas… un peu plus
qu’un frère pour vous ? Ne l’embrassez-vous pas
aussi ?
    Or, chose curieuse, la petite Juana qui avait chastement,
ingénument tendu ses joues appétissantes, la petite Juana, à la
proposition d’embrasser le Chico, rougit jusqu’aux oreilles. Elle
demeura muette et immobile baissant les yeux et tortillant le coin
de son tablier d’un air embarrassé.
    Et le Chico, qui avait rougi aussi, était, en voyant cet
embarras subit, devenu pâle comme une cire, crispait son poing sur
la table à laquelle il s’appuyait, ses jambes se dérobant sous lui,
et la regardait anxieusement avec des yeux embués de larmes.
    Et Pardaillan qui ne les quittait pas du regard, tortillant sa
moustache d’un doigt machinal, murmurait à part lui :
    – Sont-ils assez gentils !… Sont-ils assez
délicieusement bêtes !…
    Et avec un léger haussement d’épaules :
    – Pauvres petits !… Heureusement que je suis là, sans
quoi ils n’en sortiront jamais.
    Une chose dont Pardaillan ne se rendait pas compte, par exemple,
c’est qu’il était lui-même tout bonnement admirable.
    En effet, il fallait être Pardaillan, il fallait avoir son
inépuisable bonté de cœur pour s’oublier soi-même, comme il le
faisait, et ne songer qu’au bonheur de deux enfants qui s’adoraient
sans oser se le dire, alors que lui-même aurait eu si grand besoin
de soins, de repos et de fortifiants.
    Cependant, comme Juana demeurait toujours immobile, les yeux
baissés, l’air embarrassée, tortillant de plus en plus nerveusement
le coin de son tablier ; comme le Chico, de son côté, plus
embarrassé peut-être que sa petite maîtresse, n’osait faire un
mouvement, Pardaillan prit un air courroucé et gronda :
    – Mordieu ! qu’attendez-vous, avec vos airs
effarouchés ? Ce baiser vous serait-il si pénible ?
    Et poussant le Chico par les épaules :
    – Va donc ! niais, puisque tu en meurs d’envie… et
elle pareillement.
    Poussé malgré lui, le nain n’osa pas encore s’exécuter.
    – Juana ! fit-il dans un murmure.
    Et cela signifiait : Tu permets ?
    Elle leva sur lui ses grands yeux brillants de larmes contenues
et gazouilla avec une tendresse infinie :
    – Luis !
    Et cela signifiait : Qu’attends-tu donc ? Ne vois-tu
pas comme je suis malheureuse ?
    Et ils ne bougeaient toujours pas. Ce que voyant, Pardaillan
bougonna !
    – Morbleu ! que de manières pour un pauvre petit
baiser !
    Et, riant sous cape, il les jeta brusquement dans les bras l’un
de l’autre.
    Oh ! ce fut le plus chaste des baisers ! Les lèvres du
Chico effleurèrent à peine le front rougissant de la jeune fille.
Et comme il se reculait respectueusement, brusquement elle enfouit
son visage dans ses deux mains, et se mit à pleurer doucement.
    – Juana ! cria le nain bouleversé.
    Ce fut Pardaillan qui intervint encore et qui, le saisissant par
les épaules, le poussa aux pieds de la jeune fille. Si bien que le
Chico s’enhardit jusqu’à lui saisir les mains et, d’une voix
angoissée, prêt à pleurer lui-même, il demanda :
    – Pourquoi pleures-tu ?
    Ce n’était pas ce qu’avait espéré Pardaillan, qui haussa les
épaules avec une pitié dédaigneuse et grommela :
    – Le niais ! le sot !… Il n’en sortira pas !
Grands ou petits, les amoureux sont tous aussi stupides !
    Juana s’était laissée aller dans ce vaste fauteuil de chêne qui
était son siège préféré. Le Chico s’était agenouillé sur le
tabouret de bois, haut et large comme une petite estrade. Pressé
contre ses genoux, il tenait ses mains dans les siennes et la
contemplait avec cette adoration fervente qu’elle connaissait, qui
la flattait autrefois et qui aujourd’hui la faisait rougir de
plaisir et lui ensoleillait le cœur.
    Et si jeunes tous les deux, si frêles, si délicats, si
délicieusement jolis, ainsi campés : elle, légèrement penchée
sur lui, lui souriant à travers les perles humides qui
jaillissaient encore sous la frange joyeuse de ses longs
cils ; lui, la tête levée vers elle, ses traits fins et
délicats bouleversés par

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