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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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intégral de sa rançon, s’était évadé. Il sauta sur l’occasion.
    — Je ne peux pas faire autrement que de retourner me constituer prisonnier, dit-il. Si la justice et la bonne foi étaient bannies du reste du monde, elles devraient se retrouver dans la bouche et dans le cœur des rois !
    Puis, laissant son fils dans un pétrin épouvantable, il prit le bateau et s’en fut le cœur joyeux vers Londres où, le 10 janvier 1364, il put enfin serrer sa bien-aimée dans ses bras.
    Hélas ! « après avoir passé l’hiver en grandes réjouissances et récréations », nous dit Froissart, Jean II le Bon mourut subitement le 8 avril 1364.
    Il n’avait profité que durant trois mois de sa belle petite Anglaise…
    Mais ce galant et léger souverain était parvenu à tromper son monde. Et, bien que plusieurs chroniqueurs l’eussent accusé formellement d’être retourné en Angleterre pour retrouver une vie agréable et une douce amie, Jean II réussit à se faire dans l’Histoire la réputation flatteuse d’un roi qui préféra perdre la liberté et sauver son honneur… Cette légende est d’ailleurs perpétuée dans les manuels scolaires…

21
    L’amour prépare un roi fou à la France
    C’est très joli, l’inceste, mais il ne faut pas exagérer !
     
    Dr Pierre Rousset
     
    Au matin du 12 septembre 1360, une foule joyeuse et impatiente s’était groupée devant l’église de Dinan où deux fiancés recevaient la bénédiction nuptiale.
    En attendant que les nouveaux époux parussent sur le parvis, les commères commentaient l’événement avec cette saine verdeur dans le propos qui caractérise les gens dénués de complexes.
    — Pour Dieu, dit l’une, si ces deux-là peuvent s’accointer et jouer de la flûte douce, ils doivent bien en rendre grâce à messire le duc de Blois.
    — C’est vrai, répondit une jeune Dinannaise en riant, sans lui, sire Bertrand n’aurait jamais pris femme, tant il est béjaune devant une paire de tétins.
    Le mot fit rire la foule.
    Soudain, les cloches s’ébranlèrent, annonçant la fin de la cérémonie, les portes s’ouvrirent, et le couple le plus disparate qui se pût voir parut sur le seuil de l’église. Une jeune femme, fort gracieuse, au visage fin et intelligent, donnait le bras à un homme quasi monstrueux qui portait, sur de trop larges épaules, une tête énorme et ronde comme une boule. Elle s’appelait Tiphaine Raguenel, et lui, Bertrand du Guesclin…
    Après les avoir acclamés longuement, la foule accompagna les jeunes époux jusqu’en leur maison.
    Tout au long des rues, Bertrand du Guesclin souriait. Pour la première fois de sa vie, il était heureux. Depuis sa naissance, en effet, victime de son effrayante laideur, il avait quêté en vain la tendresse et l’amour. Battu par sa mère qui lui reprochait son visage camus et le traitait comme une bête, il avait fini par cacher son besoin d’affection sous une extrême brutalité, ce qui n’avait pas arrangé les choses, il faut bien le dire.
    Pendant des années, il avait pensé qu’aucune femme ne l’aimerait jamais.
    « Je suis trop laid, se disait-il, je leur fais peur. »
    Puis il avait connu Tiphaine Raguenel dans des circonstances curieuses. Un jour qu’il devait se battre en duel avec Cantorbéry, cette demoiselle, qui s’occupait d’astronomie et d’astrologie, avait prédit sa victoire aux habitants de Dinan [100] .
    Qu’une femme se soit intéressée à lui avait été doux au cœur de Bertrand, et il s’était battu avec une telle fougue qu’on avait dû lui retirer des mains le malheureux Cantorbéry, à demi déchiqueté.
    Après le combat, Bertrand s’était rendu auprès de Tiphaine et avait été fortement impressionné par l’étrange regard vert de cette jeune fille de vingt-quatre ans. Elle avait d’ailleurs achevé de le décontenancer – et de le séduire – en lui disant avec une grande douceur :
    — Sire Bertrand, je vous ai vu vous battre tout à l’heure, vous étiez fort beau.
    Du Guesclin était extrêmement timide. Bouleversé par l’émotion, il avait grimpé sur son cheval sans dire un mot et était parti faire la guerre pendant quatre ans…
    À son retour, par l’intermédiaire du duc de Blois, il avait demandé la main de Tiphaine. Agréé aussitôt, ce rude soldat, dont le courage et la hardiesse commençaient à remplir d’effroi « ceux d’Angleterre », avait pris sa grosse tête dans ses mains et

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