Les Amours qui ont fait la France
le palais, refusant d’assister aux noces de son père et de sa fiancée…
L’union de Philippe et de Blanche fut courte. Les cinquante-six ans du roi ne purent rester longtemps à l’unisson des fougueux seize ans de la reine. Affaibli par des excès amoureux, « qui lui avancèrent ses jours », nous dit Brantôme, Philippe mourut un an plus tard dans un état de grande déchéance cérébrale.
Blanche semble n’avoir eu qu’un chagrin très limité ; pourtant, elle ne prit pas de nouvel époux. Au roi de Castille, qui tentait de la fléchir en lui disant qu’elle était jeune et belle, elle répondit fièrement :
— Une reine de France ne se remarie point !
Ce qui n’empêcha pas, dit-on, la gracieuse souveraine d’organiser son veuvage en compagnie du sire de Rabauges, son maître d’hôtel…
20
Jean le Bon mourut prisonnier des Anglais
pour l’amour d’une jeune Londonienne
En maintes occasions, l’histoire de l’Angleterre
se trouva intimement liée à l’histoire de France…
J.-C. Picard
Six mois avant la mort du roi, survenue le 22 août 1350, le prince Jean avait épousé par amour Jeanne d’Auvergne, fille de Guillaume XII, comte d’Auvergne et de Boulogne. C’était une jeune veuve au regard malicieux qui avait, de son premier mari, Philippe de Bourgogne, un fils de sept ans appelé Philippe de Rouvres « pour ce qu’il étoit né en le châtel de Rouvres emprès Dijon ».
De son côté, Jean avait sept héritiers, car, en dix-huit ans de mariage, Bonne de Luxembourg s’était appliquée à servir de son mieux la dynastie des Capétiens-Valois.
Le mariage avait été célébré à Nanterre, et les habitants de ce village s’étaient attendris en voyant la progéniture des nouveaux époux suivre le cortège. Tous ces enfants étaient fort beaux et, en constatant ce que le prince Jean et la comtesse Jeanne avaient pu faire séparément, chacun s’émerveillait à la pensée de ce qu’ils allaient pouvoir faire ensemble.
Le 26 septembre, le prince Jean, devenu roi de France, alla se faire sacrer à Reims. Cette solennité donna lieu à des fêtes fastueuses et à des réjouissances qui étonnèrent le menu peuple, lequel croyait naïvement la famille royale fort dolente de la mort du précédent roi et plus économe de ses écus en un moment où le pays tout entier était écrasé d’impôts.
Mais on oublia bien vite ces détails et, quelques jours après, les souverains firent leur entrée à Paris, qui les reçut magnifiquement. Défilant dans les rues fleuries et tendues de tapisseries, ils se rendirent au Louvre, tandis qu’une foule enthousiaste leur chantait des hymnes de bienvenue. Après quoi, les fontaines de vin que l’on avait installées aux carrefours se mirent à couler pour la plus grande joie des Parisiens.
Les fêtes durèrent huit jours. Elles étaient à peine terminées qu’une nouvelle vint combler d’aise le public encore ivre de danse, de banquets et de vin pétillant. On apprit, en effet, que le comte Raoul de Guines, connétable de France, qui avait été fait prisonnier par les Anglais en 1346, venait d’être libéré après avoir versé une partie de sa rançon. C’était un fort bel homme qui était très aimé dans le royaume, et dont les aventures galantes ne se comptaient plus. Il avait d’ailleurs séduit, pendant sa captivité, de nombreuses Londoniennes qui l’avaient vu partir « le cœur navré… ».
Dès son arrivée à Paris, le comte Raoul se rendit au Louvre pour saluer le roi. Le bruit s’en répandit rapidement, et une foule de Parisiennes, très excitées, courut à la poterne du château pour voir sortir le connétable et l’acclamer.
Mais la nuit tomba sans qu’elles l’aient vu, et elles durent rentrer chez elles fort piteuses et le cœur gros de chagrin. Le lendemain, pensant avoir plus de chance, elles revinrent, pour la plupart, monter la garde près du pont-levis. Hélas ! la journée s’acheva encore sans que le connétable parût.
— Sans doute, pensait-on, le roi Jean a-t-il organisé, en l’honneur du héros de la bataille de Caen, de grandes festivités.
À l’aube du troisième jour, les Parisiennes reprirent leur faction devant le Louvre. Soudain, une nouvelle frappa de stupeur la capitale : on apprit que le connétable avait eu la tête tranchée sur l’ordre du roi, « sans loi ni jugement ».
Cette exécution, qui ressemblait fort à un assassinat, ne fit pas
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