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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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soir, à lui servir lui-même son repas.
    Quelques jours après, Jean était à Bordeaux, capitale de la Guyenne que les Anglais occupaient depuis deux siècles. On l’y fit demeurer pendant quelque temps, puis il fut transféré en Angleterre.
    Naturellement, Jean II bénéficia d’un traitement tout à fait exceptionnel. Un personnage de cette importance ne pouvait être mis dans un cachot, ni même dans une quelconque « demeure surveillée » ; on l’installa magnifiquement au manoir de Savoy, où l’on peut dire sans exagérer qu’il fut plutôt traité en invité qu’en prisonnier.
    Édouard III lui permit même d’avoir près de lui sa domesticité habituelle, et Jean II fit venir de Paris de nombreux membres de sa suite, et jusqu’à son bouffon personnel…
    Cette captivité confortable dura quatre ans. Elle eût bien étonné le petit peuple français toujours prompt à s’apitoyer. Tandis qu’Édouard III, qui signait déjà « roi de France et d’Angleterre », établissait avec ses conseillers un traité de paix et calculait la rançon de Jean II, celui-ci était reçu fréquemment à Windsor, participait à de joyeuses fêtes et ne regrettait pas trop la France où, pendant ce temps, son fils, le dauphin [99] Charles, nommé lieutenant général du roi, était aux prises avec Charles le Mauvais, Étienne Marcel, la Jacquerie, etc.
    Il ne regrettait pas trop non plus la reine Jeanne d’Auvergne, car il avait fait la connaissance à Windsor de charmantes jeunes femmes qui venaient parfois, le soir, lui demander de leur raconter la bataille de Poitiers et qui s’attardaient…
    L’une d’elles lui plaisait plus que toutes les autres, à cause de son regard doré. Il la recevait secrètement dans sa chambre. Son nom ne nous est pas parvenu, mais certains historiens affirment qu’il s’agissait de la propre maîtresse d’Édouard III, la jolie comtesse de Salisbury, celle-là même qui fut à l’origine de l’ordre de la Jarretière.
    On connaît l’histoire : un soir, au cours d’un bal, cette charmante personne avait perdu une jarretière bleue, et le roi s’était empressée de la ramasser. Geste qui avait fait sourire les courtisans.
    — Honni soit qui mal y pense ! s’était alors écrié Édouard III. Ceux qui rient seront un jour très heureux et très fiers de porter un pareil ruban.
    Et, sur-le-champ, il avait fondé le célèbre ordre le la Jarretière.
     
    En 1360, enfin, après bien des pourparlers, l’Angleterre et la France signèrent le traité de Brétigny, et le roi fut libéré. Mais il devait payer une rançon de trois millions d’écus d’or, et les caisses de l’État étaient vides. Alors, il chercha de l’argent par tous les moyens, même les plus honteux. En effet, comme le dit l’historien Matteo Villano, « le roi de France vendit sa chair et son sang ». Il livra pour six cent mille florins sa fille Isabelle, qui avait onze ans, au fils du plus féroce tyran d’Italie, ce Jean Galéas Visconti qui faisait la chasse à l’homme dans les rues de sa capitale et jetait ses victimes vivantes dans des fours. Grâce à cet argent Jean II fut libéré. Il regagna aussitôt Paris, mais il trouva le Louvre plus triste que Windsor et la reine moins jolie que les Anglaises qu’il avait connues durant sa captivité. Bientôt, il s’ennuya. Sa mélancolie était si visible que Jeanne d’Auvergne, un jour, lui demanda pourquoi « il lui arrivait de laisser aller, en manière d’expiration, des soupirs aussi conséquents ».
    — C’est parce que je ne suis point encore déshabitué de Londres, répondit-il sans ménagement.
    La pauvre reine, qui avait tant souffert de l’éloignement de son mari, fut profondément blessée et dut s’aliter. Quelques jours plus tard, elle mourait de chagrin…
    Pour se changer les idées, Jean II décida de voyager et partit pour la Provence.
    En Avignon, il fit des projets de mariage avec Jeanne de Naples, mais y renonça en apprenant que cette charmante femme avait fait étouffer son précédent mari entre deux matelas.
    Après quelques excursions dans le Comtat, il reprit le chemin de Paris et revint par petites étapes en rêvant de Windsor, de la jolie comtesse qu’il avait laissée là-bas et du moyen qu’il pourrait trouver pour aller la rejoindre. Le destin allait le servir. À quelque temps de là, il apprit que son fils, qu’il avait laissé comme otage à Calais jusqu’au paiement

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