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Les Aventures de Nigel

Les Aventures de Nigel

Titel: Les Aventures de Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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nous devons dîner dans un appartement qui vous appartienne ?
    – Un appartement qui m’appartienne ! Oui, sans doute, vous dînerez dans un appartement qui m’appartient, qui vous appartient, qui appartient à vingt autres, et où la table sera mieux servie et nous offrira meilleure chère et de meilleurs vins que si nous la tenions à frais communs. Nous allons dîner au plus fameux Ordinaire de Londres {57} .
    – C’est-à-dire, en langage ordinaire , à l’auberge ou à la taverne.
    – Auberge ! taverne ! s’écria lord Dalgarno ; non, non, mon cher nouveau débarqué ; ce sont des endroits où les citadins tachés de graisse vont boire un pot de bière et fumer une pipe ; où les fripons de gens de loi vont passer l’éponge sur leurs malheureuses victimes ; où les étudians du Temple font des plaisanteries aussi vides de sens que les coquilles des noix qu’ils ont mangées ; où la petite noblesse va boire du vin si maigre, qu’il rend hydropique au lieu d’enivrer. Un Ordinaire est une invention nouvelle, un temple consacré à Bacchus et à Comus, où la plus haute noblesse du jour se rassemble avec l’esprit le plus fin et le plus subtil du siècle ; où le vin, qui est l’ame même de la grappe la plus choisie, est exquis comme le génie du poète, vieux et généreux comme le sang des nobles. Les mets n’y ressemblent en rien à votre nourriture terrestre et grossière. On met à contribution la terre et la mer pour les fournir, et l’imagination de six ingénieux cuisiniers est sans cesse à la torture pour que leur art égale et surpasse même, s’il est possible, les matériaux précieux qui sont la base de leur travail.
    – Tout ce que je puis entendre à cette rapsodie, c’est que, comme je le disais, nous allons à une taverne choisie où nous serons somptueusement régalés, probablement en payant somptueusement notre écot.
    – Écot ! s’écria lord Dalgarno d’un ton d’indignation comique ; périsse ce mot vulgaire ! Quelle profanation ! M. le chevalier de Beaujeu, la fleur de la Gascogne, la quintessence de Paris, – qui peut dire l’âge de son vin à l’odeur seule, – qui distille ses sauces dans un alambic, à l’aide de la philosophie de Lulle, – qui découpe avec une précision si exquise, qu’il donne au noble chevalier et au simple écuyer exactement la portion d’un faisan qui est due à son rang ; – qui divise un becfigue en douze parts avec un tel scrupule, que de douze convives aucun n’en aura l’épaisseur d’un cheveu ou la vingtième partie d’une drachme de plus que l’autre ! quoi ! vous pouvez parler de lui et d’un écot dans la même phrase ! C’est l’arbitre général et bien connu dans tout ce qui concerne les mystères du hasard, du passage, du penneeck, du v erquire et de tant d’autres jeux. Beaujeu est le roi du jeu de cartes, le duc des dés. – Lui demander un écot comme à un nez rouge à tablier vert, fils d’un vulgaire tourne-broche ! – Oh ! mon cher Nigel, quel mot vous avez prononcé, et en parlant d’un tel personnage ! La seule excuse d’un tel blasphème, c’est que vous ne le connaissez pas ; et à peine la regardé-je comme suffisante ; car, avoir passé un jour à Londres, et ne pas connaître Beaujeu, c’est un crime dans son espèce. Mais vous allez le connaître, vous en bénirez le moment, et vous apprendrez à avoir horreur de la profanation dont vous vous êtes rendu coupable.
    – Oui, mais ce digne chevalier ne donne pas, je pense, toute cette bonne chère à ses frais.
    – Non sans doute ; il existe un cérémonial que les amis du chevalier entendent parfaitement, mais qui ne vous regarde pas aujourd’hui. Il y a, comme le dirait Sa Majesté, un symbolum à débourser. C’est-à-dire qu’un échange mutuel de politesse a lieu entre Beaujeu et ses convives. Il leur fait un don gratuit d’un bon dîner et d’excellent vin toutes les fois qu’ils consultent leur bonheur en se rendant chez lui à l’heure de midi ; et ceux-ci, par reconnaissance, font présent au chevalier d’un jacobus. Vous saurez ensuite qu’indépendamment de Bacchus et de Comus, cette princesse des affaires sublunaires, diva Fortuna, reçoit fréquemment des adorations chez Beaujeu ; et, comme il est le grand-prêtre officiant, il trouve, comme de raison, un avantage considérable dans la portion qu’il a dans l’offrande.
    – En d’autres termes, dit lord Glenvarloch, cet

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