Les chasseurs de mammouths
certaine
appréhension. Un long moment parut s’écouler, et les gens commencèrent à s’agiter.
Qu’est-ce qui pouvait bien prendre tant de temps ?
On avait laissé à Mamut le choix de l’instant. C’était une
seconde nature, chez le vieux chaman, de créer des effets dramatiques, presque
un instinct pour reconnaître le bon moment. Ayla sentit une main lui taper sur
l’épaule. C’était le signal qu’elle attendait. Elle avait dans une main un
morceau de pyrite de fer, un silex dans l’autre. Sur le sol, devant elle, se
trouvait un petit tas d’herbe à faire le feu. Dans l’obscurité totale de la
galerie, elle ferma les yeux, reprit longuement son souffle. Enfin, elle frappa
la pyrite avec le silex.
Une longue étincelle brilla, et, dans le noir absolu, la petite
lueur illumina uniquement la jeune femme agenouillée. Cela dura longtemps et
provoqua chez les membres du Camp un sursaut d’étonnement, des murmures de
crainte révérencieuse. L’étincelle mourut. Ayla, de nouveau, frappa le silex
contre la pyrite, mais plus près des herbes inflammables qu’elle avait
préparées. L’étincelle tomba dessus. La jeune femme se pencha pour souffler sur
le feu. L’instant d’après, les flammes jaillirent. Elle entendit des « oh »,
des « ah », des exclamations émerveillées.
Elle disposait sur le feu de petits fragments de broussaille.
Quand ils s’enflammèrent, elle ajouta des morceaux plus gros et des
branchettes. Elle céda ensuite la place à Nezzie, la regarda retirer du trou à
feu la pierre et les cendres et y transférer la flamme. Nezzie régla le
dispositif qui amenait l’air extérieur, parvint à enflammer les os. L’attention
du Camp tout entier s’était concentrée sur l’opération. Quand le feu prit pour
de bon, on comprit que le tout n’avait demandé qu’un moment. C’était de la
magie ! Qu’avait-elle bien pu faire pour créer si vite un feu ?
Talut agita le Bâton Qui Parle, en frappa par trois fois le sol.
— Quelqu’un a-t-il encore des objections à présenter contre
l’adoption d’Ayla par les Mamutoï et, particulièrement, par le Foyer du
Lion ? demanda-t-il.
— Nous montrera-t-elle sa magie ? questionna Frébec.
— Elle ne se contentera pas de nous la montrer. Elle a
promis de donner à chacun des foyers de ce Camp une de ses pierres à feu,
répliqua Talut.
— Je n’ai plus d’objections, dit Frébec.
Ayla et Jondalar fouillèrent leurs bagages pour rassembler
tous les nodules de pyrite de fer qu’ils possédaient et choisirent six des plus
beaux. La veille au soir, la jeune femme avait rallumé les feux dans chaque
foyer. Elle avait montré aux occupants la façon de procéder. Mais elle était
fatiguée, et il était alors trop tard pour chercher les pierres à feu avant de
se mettre au lit.
Les six pierres, d’un jaune grisâtre à l’éclat métallique,
faisaient un petit tas insignifiant sur la plate-forme. L’une d’elles,
pourtant, avait fait toute la différence entre l’adoption et le rejet d’Ayla. A
les voir, personne n’aurait deviné quelle magie se cachait au cœur de ces
cailloux.
Elle les ramassa et, les tenant entre ses mains, regarda
Jondalar.
— Puisque tous les autres voulaient bien de moi, pourquoi
auraient-ils accepté qu’une seule personne s’oppose à mon adoption ?
demanda-t-elle.
— Je n’en sais trop rien, répondit-il. Mais, dans un groupe
comme celui-ci, chacun est obligé de vivre avec tous les autres. Si une seule
personne ne supporte pas la présence d’une autre, cela peut amener de graves
rancœurs, surtout quand le temps retient tout le monde à l’intérieur pour une
longue période. Les gens finissent par prendre parti, les discussions peuvent
conduire à des batailles au cours desquelles il pourrait y avoir des blessés ou
pire encore. La fureur, alors, se déchaîne, quelqu’un a soif de vengeance.
Parfois, le seul moyen d’éviter une tragédie, c’est de disperser le groupe...
ou de payer très cher et d’expulser le fauteur de trouble...
Son front se contractait sous l’effet de la souffrance. Il ferma
un instant les yeux, et Ayla se demanda ce qui le faisait souffrir ainsi.
— Mais Frébec et Crozie se querellent sans cesse, et
personne n’aime ça, dit-elle.
— Les autres occupants du Camp savaient à quoi s’en tenir
avant d’accepter de les recevoir, du moins en avaient-ils une bonne idée. Tout
le monde avait eu la possibilité de les
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