Les Dieux S'amusent
s’ébattaient
joyeusement dans l’onde fraîche et limpide, lorsque apparut soudain un jeune et
beau chasseur, nommé Actéon, qui, tout à fait par hasard, passait aussi par là
à la tête de sa meute de chiens. S’il avait su à qui il avait à faire, il
aurait feint sans doute de n’avoir presque rien vu, en disant par exemple, comme
ce gentleman anglais qui avait surpris la reine Victoria sous la douche :
« Excusez-moi, monsieur. » Mais Actéon eut l’imprudence de regarder
avec complaisance et admiration les nudités charmantes qui s’offraient à ses
yeux. Diane, offusquée, aspergea Actéon de quelques gouttes d’eau qui le
transformèrent en cerf. Épouvanté, il s’enfuit, poursuivi et bientôt dévoré par
ses propres chiens.
Niobé
Ce n’était pas seulement la pudeur, mais parfois aussi l’orgueil
outragé qui pouvait conduire Diane à des actes d’une extrême cruauté. Niobé en
fit l’amère expérience. Niobé était reine du puissant royaume de Thèbes. Elle
était belle, elle était riche, elle avait un mari charmant qui l’adorait et
quatorze enfants, moitié garçons, moitié filles, tous plus beaux les uns que
les autres. Tous ces bonheurs l’avaient un peu grisée, et elle eut un jour l’imprudence
de se comparer publiquement, à son propre avantage, à la déesse Latone, mère d’Apollon
et de Diane :
— Cette pauvre Latone, à peine enceinte, a été
abandonnée par Jupiter, alors que mon mari est à mes pieds ; elle vit dans
l’île misérable de Délos, alors que je règne sur la grande ville de Thèbes ;
enfin, mes quatorze enfants sont plus beaux que les deux siens.
Ces propos furent rapportés à Apollon et à Diane, qui
décidèrent aussitôt de venger l’honneur de leur mère.
Sept flèches d’or, tirées par Apollon, mirent fin aux jours
des fils de Niobé ; sept flèches d’argent, tirées par Diane, firent subir
le même sort aux filles. En vain Niobé avait-elle essayé de protéger de son
corps la plus jeune de ses filles ; Diane ne l’avait pas épargnée. La
douleur de Niobé fut si forte qu’elle la priva de toute sensibilité et que la
pauvre femme fut transformée en une statue de pierre ; seuls ses yeux
restèrent vivants, répandant sans fin un flot de larmes amères.
Endymion
Malgré la répulsion que lui inspiraient la plupart des
hommes, Diane tomba pourtant, une fois dans sa vie, amoureuse de l’un d’eux, un
jeune berger nommé Endymion. Elle l’avait aperçu une nuit, endormi auprès de
ses troupeaux. Émue par sa beauté et rassurée par son sommeil, elle prit l’habitude
d’aller le contempler toutes les nuits, sans lui parier, sans le toucher, laissant
seulement les rayons de la lune caresser chastement son front. Une fois, pourtant,
elle finit par céder à son désir, réveilla Endymion et s’unit à lui, avec une
passion d’autant plus violente qu’elle avait été plus longtemps refoulée. De
cet unique amour et de cette seule étreinte — car Diane ne retourna plus
jamais auprès d’Endymion — naquirent d’un coup cinquante filles.
5. Mercure
Mercure était fils de Jupiter et, par sa mère, petit-fils d’Atlas. Malgré ces ascendances colossales,
il était petit et fluet, mais gracieux et bien proportionné. Il portait à ses
pieds et à son chapeau des ailes qui lui permettaient de se déplacer avec une
extrême rapidité aux quatre coins du monde. Son esprit était aussi vif que son
corps. Éloquent, persuasif et menteur, il était le dieu des commerçants et
celui des voleurs, ce qui, pour les Grecs de l’Antiquité comme pour beaucoup de
Français d’aujourd’hui, revenait à peu près au même.
Enfant gâté de Jupiter, il se livra dans son enfance à de
multiples espiègleries que son père lui pardonnait le plus souvent avec une
indulgence amusée. Il commença, le jour même de sa naissance, par voler à
Apollon un troupeau de bœufs auquel le dieu du soleil tenait particulièrement. Pour
ne pas être découvert, Mercure avait eu l’idée de conduire les bœufs en les
faisant marcher à reculons. Ainsi, nul ne songea à suivre des traces qui
paraissaient mener à l’étable. Quelques jours plus tard, Mercure rendait les
bœufs à Apollon et, pour se faire pardonner, lui faisait cadeau d’un instrument
de musique qu’il avait lui-même construit à partir d’une carapace de tortue, et
qui fut la première lyre.
Après le troupeau d’Apollon, Mercure s’amusa à
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