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Les Dieux S'amusent

Les Dieux S'amusent

Titel: Les Dieux S'amusent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Denis Lindon
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jalousie, cherchaient en
vain à découvrir chez elle un défaut, si minime fût-il, qu’elles pussent
critiquer.
    Sur les instances de Junon, Jupiter, pour calmer les esprits,
ordonna à Vénus d’aller s’habiller. On lui trouva une tunique et c’est Vulcain
qui, pour gagner ses faveurs, lui fabriqua une ceinture magique d’or et de
pierres précieuses, qui avait la propriété de rendre irrésistible la femme ou
la déesse qui la portait. Enchantée de ce cadeau, dont elle n’avait d’ailleurs
pas besoin pour enflammer tous les cœurs, Vénus eut l’imprudence de promettre à
Vulcain « par le Styx » de lui accorder tout ce qu’il lui demanderait.
    — Sois ma femme, lui répondit instantanément le dieu
difforme, et elle ne put refuser.
    Dès que Vulcain eut obtenu, par les moyens que vous savez, le
consentement de Jupiter et de Junon, le mariage fut célébré en grande pompe et
les jeunes époux s’installèrent dans un palais bâti par Vulcain avec l’aide de
ses Cyclopes.
    Cependant, malgré le luxe dans lequel elle vivait, et bien
que son mari ne lui refusât rien et la comblât de cadeaux, Vénus ne tarda pas à
s’ennuyer. Vulcain, travailleur acharné, se levait dès cinq heures du matin
pour aller à sa forge, consacrait la journée à exécuter les innombrables
commandes que lui passaient les dieux ou à effectuer les dépannages et
réparations urgentes ; il ne revenait chez lui que bien après minuit, sale,
épuisé et de mauvaise humeur. Ce n’était pas une vie pour une jolie femme comme
Vénus, qui n’aimait pas la solitude. Ce qui devait arriver arriva : elle
prit des amants.

Adonis
    Le premier d’entre eux fut un simple mortel, mais le plus
beau sans doute que la terre eût jamais porté. Il s’appelait Adonis.
    Fils du roi de Chypre, il était à la fois un grand séducteur
et un grand chasseur. Il avait vingt ans à peine lorsque Vénus le rencontra et
s’éprit de lui.
    Adonis vécut alors, pendant quelques mois, une existence
épuisante : la nuit, dans les bras de Vénus, il ne dormait guère ; le
jour, au lieu de se reposer, il allait à la chasse. C’est sans doute à la
fatigue qu’il faut attribuer le tragique accident dont il fut bientôt la
victime : un sanglier blessé, qu’il poursuivait, se retourna brusquement, le
chargea et lui perfora l’artère fémorale. En quelques instants, vidé de son
sang, Adonis expirait.
    Arrivée trop tard, Vénus changea la dernière goutte de sang
tombée sur le sol en une anémone, fleur charmante et éphémère du printemps.
    Les aventures d’Adonis n’étaient pourtant pas terminées. Une
fois mort, il descendit aux enfers où Proserpine, qui s’ennuyait autant, avec
son mari Pluton, que Vénus avec Vulcain, ne tarda pas à le remarquer. Après
avoir été l’amant de la déesse de l’amour, Adonis devint celui, de la déesse
des morts. Vénus, qui l’apprit bientôt, en fut indignée. Elle réclama à Jupiter
la restitution d’Adonis, que Proserpine, de son côté, prétendait garder.
    Jupiter allait-il, comme devait le faire plus tard dans une
circonstance analogue le roi Salomon, proposer de couper en deux l’objet du
litige, c’est-à-dire le corps d’Adonis ? Il eut une meilleure idée : Adonis,
décréta-t-il, resterait entier, mais il passerait six mois de l’année avec
Vénus et les six autres mois avec Proserpine.
    À la suite de cet arbitrage, Proserpine eut un emploi du
temps chargé. Déjà, en vertu d’une transaction antérieure, elle devait deux
tiers de son temps à Cérès et un tiers à Pluton. Voici que maintenant elle en
devait la moitié à Adonis. Faites l’addition, en réduisant les fractions à leur
dénominateur commun :

    Comme tous les adeptes du pluri-emploi, dont elle fut le
précurseur, il est clair que Proserpine ne pouvait remplir ses diverses
obligations qu’en faisant des heures supplémentaires.

Un scandale surl’Olympe
    Vénus, au contraire, conservait beaucoup de temps libre
pendant les six mois où Adonis était aux enfers. Pour occuper ce temps, une
femme ordinaire eût pris sans doute un autre amant. Vénus, elle, en prit deux d’un
coup, Mars et Apollon. Cette double liaison était rendue possible par le fait
que les deux dieux avaient des horaires différents et complémentaires :
    Apollon, occupé toute la journée par la conduite du char du
soleil, n’était libre d’aller retrouver Vénus qu’à la tombée de la nuit, cependant
que Mars, comme tous

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